Jaroslaw Kaczynski, leader du parti Droit et Justice (PiS) et sa candidate pour le poste de Premier ministre Beata Szydlo. © REUTERS

Pologne: les conservateurs eurosceptiques reviennent au pouvoir

Le Vif

Les Polonais ont voté dimanche pour le changement en portant au pouvoir les conservateurs catholiques eurosceptiques qui ont surfé sur une vague de promesses populistes et la peur de l’arrivée massive de réfugiés du Proche-Orient.

Le parti Droit et Justice (PiS, opposition) de Jaroslaw Kaczynski a obtenu la majorité absolue aux élections législatives, avec 38% des voix, soit 238 sièges sur 460, selon des projections de trois chaînes de télévision mises à jour dans la nuit de dimanche à lundi, fondées sur des résultats affichés dans un échantillon de bureaux.

Ainsi, les mises en garde des adversaires de M. Kaczynski et de son parti, qui évoquaient le souvenir de la période 2005-2007, quand il était au pouvoir, marquée par des rapports difficiles avec Bruxelles, l’Allemagne et la Russie, au nom de la défense des intérêts nationaux, ainsi que par des tensions sociales et une « décommunisation » controversée, n’ont pas produit l’effet escompté.

D’autres critiques avaient dit craindre que, proche sur bien des questions de société de l’Eglise catholique, le PiS ne rende encore plus strictes les conditions d’accès à l’avortement en vigueur, plus difficile la fécondation in vitro et ne renforce la place du catéchisme dans l’éducation.

Les vainqueurs, qui ont prôné « le bon changement » et chauffé leurs troupes au cri de « Ca ira ! » (remplacé dimanche soir par « On a réussi ! »), ont fait nombre de promesses comme la baisse des impôts et de l’âge de la retraite et l’augmentation substantielle des allocations familiales.

Les pronostics des télévisions ne seront officiellement confirmés que mardi soir, la marge d’erreur étant de 2%, ce qui peut encore influer sur le résultat final, mais pas enlever la victoire au PiS.

Toujours d’après ces projections, les libéraux centristes de la Plateforme civique (PO), au pouvoir pendant huit ans, de la Première ministre sortante Ewa Kopacz ont obtenu 23,4% des voix, soit 135 sièges.

La participation a atteint 51,6% des inscrits.

« Changer la Pologne »

Dans ses premiers commentaires, Jaroslaw Kaczynski a souligné que c’était la première fois dans l’histoire de la Pologne depuis la chute du communisme qu’un seul parti allait gouverner ce pays de 38 millions d’habitants, membre de l’UE et de l’Otan et devenu un poids lourd économique en Europe orientale.

Le nouveau gouvernement doit être dirigé par une femme, Beata Szydlo, qui a mené tambour battant sa campagne électorale.

Qui est Beata Szydlo, future Première ministre polonaise ?

BeataSzydlo, 52 ans, désignée par avance pour le poste de Premier ministre par Jaroslaw Kaczynski, le chef du parti conservateur Droit et Justice (PiS) vainqueur dimanche des législatives polonaises, applique à la lettre les idées de son mentor.

Fille de mineur, diplômée en ethnographie de l’Université Jagellonne de Cracovie, elle s’était lancée dans la politique en se faisant élire maire de la petite ville de Brzeszcze, dans le sud de la Pologne. Elle est députée du PiS depuis 2005 et vice-présidente de son parti.

Au parlement, Mme Szydlo a défendu les positions conservatrices du PiS, proches de celles de l’épiscopat, sur des questions telles que l’avortement, la fécondation in vitro et la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes.

Mais ce n’est que récemment que Mme Szydloa fait ses preuves au grand jour, en conduisant avec succès la campagne électorale du nouveau président élu en mai, Andrzej Duda, qui a démissionné du PiS après sa victoire, comme le veut la tradition.

M. Kaczynski, conscient de l’image d’homme rancunier et querelleur qu’il traîne – souvenir de son passage à la tête d’un gouvernement de coalition en 2006-2007 – a cherché à rassurer ses compatriotes.

« Il n’y aura pas de coups de pied donnés à ceux qui sont déchus, même s’ils sont tombés de leur propre faute et à juste titre », a-t-il dit, « il n’y aura aucune vengeance ».

« Nous tendons la main à tous ceux qui veulent changer la Pologne », a ajouté M. Kaczynski qui avait commencé son intervention par un hommage rendu à son frère jumeau, Lech, mort en 2010 dans un accident d’avion à Smolensk (Russie), dédiant à ce dernier sa victoire politique.

La Première ministre sortante Ewa Kopacz a reconnu sa défaite, tout en déclarant que son parti « n’avait pas perdu ces huit dernières années ».

La défaite des libéraux s’explique, selon des politologues, par l’usure du pouvoir, par le départ pour Bruxelles de leur chef charismatique Donald Tusk, devenu président du Conseil européen, et aussi par une affaire d’enregistrements illégaux de conversations de plusieurs hauts responsables révélant leur cynisme et leur langage parfois vulgaire.

Les conservateurs ont quant à eux souligné que leur gouvernement allait avoir d’excellents rapports avec le chef de l’Etat. C’est en effet M. Kaczynski qui avait propulsé un jeune eurodéputé, Andrzej Duda, élu en mai à la magistrature suprême en battant Bronislaw Komorowski proche des centristes.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire