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Politique migratoire : la Commission européenne dresse son bilan et annonce 3 milliards supplémentaires pour la Turquie

Stagiaire Le Vif

La Commission a indiqué ce mercredi vouloir limiter les visas pour les pays tiers qui refuseraient de reprendre leurs migrants en situation irrégulière, et augmenter le financement en direction de la Turquie de 3 milliards d’euros.

Ce mercredi, la Commission européenne a annoncé de nouvelles mesures pour accélérer le retour des migrants en situation irrégulière dans leur pays d’origine. Parallèlement, elle a indiqué dans son communiqué que les derniers chiffres d’arrivées illégales dans l’Union étaient en baisse : « La baisse du nombre d’arrivées irrégulières s’est confirmée tout au long de 2017 et des premiers mois de 2018. Avec 205 000 franchissements illégaux des frontières en 2017, les arrivées dans l’UE ont baissé de 28% par rapport à 2014″.

La population de l’UE s’élève à plus de 500 millions de citoyens. D’après les données des Nations-Unies, en juin 2017 l’Europe accueillait près de 2,5 millions de réfugiés. La Turquie, à elle seule, en accueillait 3,2 millions. Sur un total de 18,5 millions de réfugiés à travers le monde.

3 milliards supplémentaires pour la Turquie

Aujourd’hui, la Turquie est donc, de loin, le pays qui accueille le plus grand nombre de réfugiés sur son territoire. Parmi lesquels 98,5% de Syriens, et un petit nombre d’Irakiens.

L’Union européenne a conclu un deal avec Ankara afin que la Turquie empêche les réfugiés d’essayer de passer les frontières européennes. En échange, l’UE lui fournit une aide financière destinée aux réfugiés syriens. Trois milliards d’euros ont déjà été accordés en 2016. Cet accord suscite de nombreuses critiques et indignations du côté des associations défendant les droits de l’Homme.

De son côté, la Commission estime que « la déclaration UE-Turquie continue de produire des résultats : le nombre d’arrivées irrégulières dans des conditions dangereuses restant inférieures de 97 % à celui de la période antérieure à l’application de la déclaration ».

Ce mercredi, elle a annoncé qu’elle débloquera à nouveau trois milliards à destination des réfugiés en Turquie. Comme en 2016, un tiers de cette somme devrait provenir du budget de l’UE, et les deux tiers restant des contributions des États membres.

L’argent européen doit être livré à des projets destinés à répondre aux besoins des réfugiés syriens et aux communautés d’accueil : aide humanitaire, infrastructures, santé, éducation… « Jusqu’ici, ce fonds a donné à 500 000 enfants un accès à l’éducation, et soutient 1,2 million de Syriens avec des transferts d’argent mensuels », s’est félicité Dimitris Avramopoulos, commissaire européen à la migration.

« La coopération avec la Turquie est cruciale pour faire face à des défis communs », a insisté le Commissaire européen. « C’est une question de volonté politique commune, et dans ce contexte une escalade inutile peut et doit être évitée ». Dimitris Avramopoulos a conclu son discours en appelant au « retour rapide des deux soldats grecs, actuellement en détention en Turquie ».

Une politique de visas plus dure à l’égard des pays « non coopérants »

« Nous avons aussi besoin d’envoyer un message clair : les migrants en situation irrégulière seront renvoyés dans leur pays d’origine », a averti Dimitris Avramopoulos.

En vue d’augmenter le nombre de retours et de rapatriements de ceux qui n’auraient pas réussi à obtenir l’asile dans l’UE, ou de ceux dont le visa serait expiré, la Commission a également présenté ce mercredi sa réforme de la politique européenne commune des visas. Celle-ci prévoit, entre autres, des mesures strictes et restrictives pour les pays qui refuseraient de reprendre leurs citoyens qui n’ont pas réussi à obtenir l’asile dans l’Union.

Un nouveau mécanisme évaluera le degré de coopération des pays tiers. Il pourra déboucher sur des restrictions de délivrance des visas pour les pays « non coopérants », et notamment pour leurs diplomates.

Une réforme des visas touristiques

Dans cette réforme, la Commission a aussi prévu des procédures plus rapides pour l’obtention des visas touristiques : la possibilité de soumettre sa demande six mois à l’avance au lieu de trois, et la réception de la réponse endéans les dix jours et non plus 15. La demande pourra désormais être remplie et signée par voie électronique. En revanche, la réforme prévoit une augmentation des droits de visa, passant de 60 à 80 euros.

« Nous créons aussi un nouveau programme spécial aux pays situés aux frontières extérieures, où les voyageurs pourront demander un visa pour un court séjour », annonce la Commission. Ces visas seront délivrés selon des conditions strictes et ne seront valables que sept jours dans le pays de délivrance. En outre, « les voyageurs réguliers de confiance » auront droit à des visas à entrées multiples valables cinq ans. « Ils ne devront plus passer par une nouvelle procédure de visa chaque fois qu’ils voudront se rendre dans l’UE ».

Le bilan

La Commission européenne a dressé son bilan en matière de migration et fait le point sur les mesures qui lui restent à prendre pour parvenir à un accord global en matière de migration d’ici juin 2018.

L’institution affirme poursuivre ses efforts pour sauver des vies : « Plus de 285 000 migrants ont été sauvés grâce à des opérations de l’UE en Méditerranée depuis février 2016, et en 2017, environ 2 000 migrants ont été sauvés dans le désert après avoir été abandonnés par des trafiquants « .

L’UE a par ailleurs contribué au retour de plus de 15 000 migrants de Libye dans leur pays d’origine, et évacué plus de 1300 réfugiés de ce même pays qui seront réinstallés en Europe. Avec ses partenaires, l’UE entend poursuivre sa collaboration avec les autorités libyennes.

Par ailleurs, l’UE souligne « les progrès importants accomplis pour améliorer la coopération avec les pays d’origine en matière de retour ». Ainsi, depuis octobre 2017, « 135 opérations de retour, concernant quelque 4 000 personnes », ont été effectuées dans l’UE.

Relocalisation et réinstallation

La Commission se félicite des résultats de ses programmes de relocalisation et de réinstallation. 34 000 personnes ont effectivement été relocalisées en plus de deux ans. Or, l’UE avait initialement annoncé la relocalisation de 160.000 personnes (un objectif déjà revu à la baisse à 98.255 personnes)

Du côté de la réinstallation, 19 432 ont été effectuées en deux ans, remplissant presque l’objectif fixé à la base de 22 504 réinstallations. Les réinstallations prévues dans la déclaration UE-Turquie se poursuivent, aujourd’hui, 12 476 ont eu lieu (le principe étant que pour chaque Syrien renvoyé vers la Turquie au départ des îles grecques, un autre Syrien est réinstallé de la Turquie vers l’Union européenne).

En outre, la Commission a lancé un nouveau programme de réinstallation conçu pour au moins 50 000 réfugiés. 19 États membres ont offert jusqu’à présent près de 40 000 places, 1.855 ont eu lieu à ce jour. La Commission invite les États à « commencer rapidement les réinstallations dans le cadre du nouveau programme pour les pays prioritaires », notamment celles des réfugiés évacués de Libye.

La Commission appelle l’UE et ses États membres à « consentir ensemble des efforts supplémentaires », notamment à « accroître les ressources financières «  pour répondre au « défi de la migration ». Plusieurs grands chantiers restent en cours, au niveau politique notamment, avec la réforme du règlement de Dublin. La Commission espère atteindre un accord global d’ici juin 2018.

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