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Parlement européen : 39 millions d’euros d’indemnités de frais, mais aucun contrôle

Kristof Clerix
Kristof Clerix Rédacteur Knack

Outre leur salaire brut de 8484 euros, les 21 parlementaires européens belges perçoivent des indemnités de frais mensuel de 4342 euros. Le Parlement européen ne vérifie pas s’ils dépensent cet argent correctement. À tort, révèle une enquête internationale à laquelle ont participé nos confrères de Knack.

Que font les 748 parlementaires européens des 39 millions d’euros qu’on leur paie chaque année comme « indemnité pour les dépenses générales » ? Pour la première fois dans l’histoire du parlement européen, des journalistes issus des 28 états membres de l’UE ont étudié la question. Nous avons demandé les notes de frais de tous les parlementaires, visité leurs bureaux, analysé leur comportement électoral, vérifié des documents du cadastre et épluché la réglementation. Le résultat est alarmant.

Tous les mois, le Parlement européen à Bruxelles verse 4342 euros sur le compte de tous les parlementaires européens. Cette indemnité destinée aux coûts « directement liés à l’exercice de leur mandat », est forfaitaire. Les parlementaires européens ne doivent pas soumettre de factures ou de notes de frais, même s’ils ne peuvent pas faire n’importe quoi de l’argent. Un simple document interne de deux pages énumère les éléments pour lesquels ils peuvent utiliser les indemnités: coûts de bureau (loyer, électricité, chauffage, entretien, etc.), mobilier et matériel de bureau, abonnements, matériel IT, frais de représentation et comptabilité. Ces directives sont sur papier, même s’il s’agit d’une « liste non exhaustive ». Par ailleurs, le parlement applique une série de principes généraux, tel que l’interdiction d’accorder un soutien direct ou indirect aux partis politiques nationaux.

La question se pose: ces règles sont-elles respectées?

1. Frais de bureau: règles imprécises

Tous les parlementaires européens disposent de bureaux au Parlement européen à Bruxelles et à Strasbourg, mais ils peuvent utiliser leurs indemnités de frais généraux pour louer un ou plusieurs bureaux ailleurs. Curieusement, il n’existe pas d’aperçu global de toutes les adresses de bureau des parlementaires. Comment alors les citoyens européens peuvent-ils s’adresser à eux ? « Je me suis informé et cette liste ne semble pas disponible », déclare Lieven Cosijn du Bureau d’Information du Parlement européen en Belgique.

Knack a contacté les 21 parlementaires européens belges à ce sujet. Nous leur avons demandé s’ils louent un bureau en dehors du parlement européen. Et si oui : à qui, et à quel prix.

Ils ont tous répondu à cette question. 9 sur 21 ont fait savoir qu’ils n’avaient pas de bureau en dehors du Parlement européen. Cela signifie qu’ils n’ont pas besoin des 4342 euros pour un loyer. Ce qui soulève la question : comment utilisent-ils la totalité de ce montant ?

Hilde Vautmans, Guy Verhofstadt et Lieve Wierinck (Open VLD), Bart Staes (Groen) et Claude Rolin (CDH) ont leur deuxième bureau chez eux, mais n’utilisent pas le remboursement de frais pour se payer un loyer. Ivo Belet (CD&V) a d’abord confirmé par e-mail à Knack qu’il se louait un bureau chez lui, mais revient sur ses dires après la publication de cet article et déclare qu’il s’agit d’un malentendu: par contre, il utilise les indemnités de frais pour son matériel de bureau et son aménagement, « mais non pour louer à lui-même ».

Ensuite, il y a trois parlementaires européens qui louent des bureaux à des entreprises, des personnes ou qui louent de l’espace dans un bâtiment public. Tom Vandenkendelaere (CD&V) paie 1330 euros par mois pour une maison de commerce à Roulers. Pascal Arimont (CSP) a deux bureaux dans son district électoral : un à Eupen (1100 euros/mois) et un à Saint-Vith (465 euros/mois). Hugues Bayet (PS) loue un bureau pour 100 euros par mois dans la maison communale de Farciennes où il est bourgmestre.

Il y a un parlementaire européen belge qui refuse de dévoiler les adresses de ses bureaux, « pour des raisons de sécurité » : Gerolf Annemans (Vlaams Belang). Il loue un bureau européen et un bureau privé, pour pas moins de 3700 euros par mois pour les deux. Comme il ne dévoile pas les adresses, Knack n’a pas pu vérifier s’il y a un lien avec son parti. La location de bureaux à son parti politique national est un sujet sensible : le risque de soutien direct ou indirect n’est pas loin.

« Si on a rempli un certain nombre de conditions et que le loyer est conforme au marché, les parlementaires européens ont le droit de louer un bureau à leur parti », déclare Marjory van den Broeke, porte-parole du Parlement européen. Nous lui demandons expressément d’énumérer toutes les conditions. Van den Broeke: « Il faut avoir une raison d’avoir un bureau au sein de son parti politique, par exemple parce qu’on accomplit aussi des tâches pour le parti. En outre, il faut vraiment utiliser le bureau pour exercer son mandat. Il doit être séparé d’autres bureaux, et il faut indiquer clairement à quoi il sert. Il ne peut être utilisé par d’autres personnes ou pour d’autres usages ».

192 parlementaires européens (soit 1 sur 4) indiquent qu’ils utilisent un bureau au sein de leur propre parti politique. Parmi eux, trois Belges. Pour 500 euros par mois, Kathleen Van Brempt (sp.a) dispose de bureaux et d’espace de réunion auprès du département provincial du sp.a à Anvers. Marie Arena (PS) loue également un bureau à 500 euros par mois à la Fédération bruxelloise du PS. Et Philippe Lamberts (Ecolo) paie 3745 euros par an à Ecolo, pour les bureaux utilisés par ses assistants locaux au siège principal du parti à Namur et à son siège local à Bruxelles.

Tant dans les « bureaux-paysages aux clean desks » de Van Brempt à Anvers que dans les bureaux de PS et d’Ecolo nous constatons la même chose : pas de plaque avec le nom, pas de pièce séparée, et les bureaux sont partagés avec les autres.

Quand nous lui soumettons nos constatations, Arena déclare: « La location de mon bureau à la Fédération bruxelloise ne dépasse pas les règles. Le prix est conforme au marché. J’utilise le bureau pour rencontrer des citoyens, pour présenter mon travail politique ou comme espace de travail quand les bureaux au Parlement européen ne sont pas ou moins accessibles. Pour être tout à fait en ordre, je vais rapidement apposer une plaque avec mon nom. »

Lamberts: « Pour des raisons de flexibilité pour mes collaborateurs et parce que les bureaux sont petits, mon arrangement avec Ecolo concerne plutôt un espace ouvert que des locaux séparés. Je vérifierai auprès du Parlement si cet accord – qui reflète la tendance générale d’organisations professionnelles au 21e siècle – est acceptable. »

Entre-temps, Van Brempt a fait de même : alarmée par nos constatations, elle a soumis sa situation au Parlement européen. Marjory van den Broeke lui a donné la réponse suivante : « J’ai consulté la Direction générale des Finances. Le prix du loyer d’un espace et de facilités de bureau dans le bureau du parti est conforme au marché. Il est évident qu’il n’y a pas moyen d’avoir une pièce délimitée dans les bureaux paysagers. Votre arrangement est donc conforme aux règles des indemnités des frais généraux. »

Les critères énumérés par Van den Broeke à Knack n’étaient-ils soudain plus d’actualité ? Elle précise : « Le but des règles et l’interprétation des règles dans ce genre de cas est d’éviter le financement de parti direct ou indirect. Dans le cas présent, il ne semble pas être question d’un tel financement. »

Kathleen Van Brempt se dit soulagée: « Je trouve important que vous écriviez que je n’ai pas transgressé de règles. Je ne transmets par d’argent au parti, bien au contraire. La vérité, c’est que personne ne connaît les règles. Il faut interroger la Direction générale des finances pour savoir ce qui est permis et ce qui ne l’est pas. Il est grand temps que le Parlement prenne ses responsabilités et éclaircisse la situation. »

Van Brempt touche un point sensible. Les entretiens avec de nombreux autres parlementaires européens révèlent que parmi eux aussi, c’est la confusion qui règne. D’après Marjory van den Broeke, le Bureau du Parlement européen, l’organe d’administration qui fixe les règles, l’a compris. « Mi-mai, il a décidé de créer un groupe de travail. Celui-ci doit édicter des directives plus claires pour les frais de remboursement généraux. Le Bureau décidera le 12 juin du mandat, de la composition et du timing de ce groupe de travail. »

Le 28 avril 2016, la séance plénière du Parlement européen avait déjà demandé au Bureau de revoir la liste de frais. Il a donc fallu treize mois pour qu’il s’en occupe. « Il est clair que le Bureau n’a pas la volonté politique de poursuivre », déclare le chercheur Wouter Wolfs de l’Instituut voor de Overheid (KU Leuven) (Institut pour l’État), qui écrit un doctorat sur le financement des partis européens. « En outre, une clarification des règles ne fera pas avancer les choses. Tant que les frais ne seront pas contrôlés, peu importe les directives. Le système actuel est désastreux pour l’image du Parlement européen. Ce n’est plus tenable. »

Le fait que notre enquête révèle qu’il y a un parlementaire européen polonais qui loue pas moins de 13 bureaux ne redorera pas non plus le blason de l’Europe.

2. Notes de frais: personne ne veut les publier

Plusieurs parlementaires européens racontent officieusement qu’à l’époque leurs salaires étaient assimilés à ceux des parlementaires nationaux, avec en conséquence d’importantes différences mutuelles. Quand cette situation a été rectifiée en 2009, les Allemands et les Italiens notamment risquaient de gagner beaucoup moins. Pour répondre à leurs griefs, on aurait instauré les frais de remboursement généraux. Le Parlement européen déclare qu’il ne demande pas de preuves de cette indemnité aux parlementaires européens « parce qu’il s’agit d’un montant forfaitaire ». En outre, il n’exerce pas de contrôle direct.

« Ce n’est que s’il y a de fortes indications que l’argent n’a pas été dépensé à bon escient que l’administration demande des clarifications et des explications », déclare Marjory Van den Broeke. « Si le parlementaire européen ne peut pas démontrer une utilisation correcte, le Parlementaire européen demande de le rembourser. Le secrétaire général affirme qu’une irrégularité commise délibérément équivaut à de la fraude. Cependant, le Parlement européen est uniquement apte à demander des mesures administratives. En 2015, il a réalisé huit enquêtes pour abus possible de l’indemnité de frais généraux. Quatre d’entre elles ont abouti au remboursement complet ou partiel de l’argent. » Van den Broeke refuse d’en dire plus, parce qu’il s’agit d’ « affaires financières de parlementaires européens individuels ».

D’après Van den Broeke, le fait que le Parlement européen ne vérifie pas en détail les 40 millions d’euros consacrés chaque année au remboursement de frais généraux est une question de capacité. « Pour vérifier toutes les notes de frais et les factures des 748 parlementaires européens, nous devrions engager au moins 50 personnes supplémentaires. Cela coûte de l’argent. »

Nick Aiossa de l’ONG Transparency International: « Le Bureau pourrait également obliger les parlementaires européens à réserver un certain pourcentage de leurs frais généraux à payer un audit externe. »

Comme les électeurs européens ont le droit de savoir si leurs contributions sont utilisées à bon escient, nous avons demandé à 667 parlementaires européens de publier leurs notes de frais. Seuls 40 d’entre eux étaient prêts à le faire. Parmi eux : aucun Belge.

« Pour moi, publier une liste de tous les comptes, c’est aller trop loin », déclare Vandenkendelaere. « Je ne trouve pas qu’il y ait une valeur ajoutée pour les gens de connaître les formations suivies par mes collaborateurs, la quantité de fruits que j’achète pour le bureau ou le coût de mon mobilier de bureau. » Van Brempt estime qu' »un tel contrôle de première ligne n’incombe pas à la presse. Ce n’est pas à elle par exemple de vérifier les stratégies politiques développées par les parlementaires européens et pour lesquelles ils font éventuellement des frais. Si les journalistes pouvaient consulter toutes les notes de frais, ce serait le cas. » Staes partage cet avis. Il prévient que certaines dépenses peuvent donner une idée de la stratégie politique et de la préparation de dossiers.

Louis Michel (MR) souligne l’importance de son indépendance. « En tant que parlementaire européen, je rencontre presque tous les jours des chefs d’État africains, des ministres et des hauts fonctionnaires, mais aussi des leaders d’opposition et des rebelles. Ces contacts cadrent dans mon rôle de médiateur pacifique. Si la publication de ces frais nuit à la confidentialité de mes rencontres, elle me pose problème. »

Nick Aiossa de Transparency International ne voit pas le problème. « Il est évident que nous ne voulons pas que les activistes des droits de l’homme ou les lanceurs d’alerte aient des problèmes. Mais expliquez-moi comment vous risquez de révéler une source en soumettant une note de restaurant au parlement européen. Celle-ci ne mentionne pas avec qui vous avez mangé, non ? »

Le président de la délégation N-VA Mark Demesmaeker estime « nécessaire que le parlement européen assure une surveillance objective et correcte des frais généraux ». « C’est primordial », déclare Demesmaeker, « que le Parlement prévoie des garanties supplémentaires. » En attendant un système de contrôle universel, une série de parlementaires européens belges ont décidé de conserver toutes les notes de frais et/ou d’ouvrir un compte en banque séparé pour les frais généraux (une recommandation du Parlement européen). Les écologistes, les délégations PS et N-VA, Van Brempt, Arimont, Vandenkendelaere et Rolin indiquent qu’ils le font de leur propre chef. Van Brempt: « En outre, je vais soumettre mes dépenses à un réviseur, qui vérifierait périodiquement si elles respectent les règles. Je publierai son jugement sur mon site. » Les écologistes ont également décidé de demander un audit indépendant de leur frais à partir du 1er juillet.

3. Transparence: presque tous les Belges votent pour

Pratiquement tous les parlementaires européens belges se disent en faveur de plus d’ouverture. « De toute façon, la transparence maximale en matière de revenu et de frais généraux des parlementaires est la meilleure option », déclare Ivo Belet. « Depuis le début de mon mandat, je me prononce pour une clarté maximale à propos de l’utilisation de l’argent du contribuable », estime Claude Rolin.

Reste à voir si les parlementaires européens font ce qu’ils disent. Knack a analysé le vote le plus récent sur la transparence qui a eu lieu au Parlement européen. Le 27 avril, lors d’un vote sur l’acquittement du budget parlementaire de 2015, les parlementaires européens ont dû se prononcer sur un amendement des écologistes. Celui-ci plaide en faveur de règles plus claires, d’un compte en banque séparé pour les frais, de l’obligation de conserver les notes de frais et de rembourser les frais non occasionnés à la fin du mandat, un audit et une publication des éléments de coût.

La bonne nouvelle: généralement la plupart des parlementaires européens belges votent résolument pour plus de transparence. Le seul Belge à voter contre tous les points de l’amendement a été Guy Verhofstadt, ex-Premier Ministre de Belgique et chef de groupe de la fraction libérale ALDE.

« Notre chef de groupe est toujours censé voter selon la ligne fixée par la majorité de la fraction », explique sa collègue Hilde Vautmans. « C’est ce que Verhofstadt a fait le 27 avril, même s’il est, tout comme ses collègues de la délégation Open VLD, un grand défenseur de la transparence renforcée prévue par l’amendement. »

Knack a demandé à Verhofstadt si pour lui la transparence n’est pas assez importante pour voter exceptionnellement contre la ligne de fraction – comme les socialistes belges, quelques chrétiens-démocrates (Arimont et Vandenkendelaere) et quelques libéraux (Vautmans, Wierinck et Michel). Il a répété : « C’est une règle dans notre fraction que le chef de groupe ne s’écarte jamais de la ligne du groupe. »

Hormis Verhofstadt, quelques Belges ont voté contre des éléments de l’amendement écologiste. Ainsi, Belet, Gérard Deprez et Frédérique Ries (tous deux MR) se sont opposés à un audit et à la publication d’éléments de coûts. D’après leurs dires, Deprez et Ries ont suivi le vote de la majorité qui avait eu lieu dans la commission précédente, où l’on a d’abord discuté de l’amendement. Belet souligne toutefois qu’il a soutenu d’autres amendements pro transparence.

Singulièrement, Rolin et Annemans ont adapté leur vote après que Knack les en ait informés. Rolin : « Merci de me l’avoir signalé. J’ai effectivement commis une erreur en votant, mais c’était de bonne foi. Normalement, je vote toujours pour la transparence des frais. Entre-temps, j’ai fait changer les votes non en oui (cette adaptation est faite sur la feuille de résultats, mais ne pèse pas sur le vote, NLDR). » Même son de cloche auprès d’Annemans : « Ce jour-là, il y a eu des centaines de votes. Manifestement, j’ai été distrait et je me suis écarté de ma feuille de vote. Cependant, il ne peut y avoir de doutes sur mes intentions en matière de transparence des coûts généraux. »

4. Remboursement: aucun Belge ne l’a fait

Les parlementaires européens qui n’utilisent pas leurs indemnités de frais généraux peuvent verser le montant restant en fin de mandat au parlement européen. Cependant, c’est rarement le cas. Marjory van den Broeke: « Depuis 2010, en fonction de l’année, cinq à vingt parlementaires européens ont remboursé au total entre 100 000 et 600 000 euros. Dans ces chiffres, nous ne comptons pas les parlementaires européens qui ont demandé un remboursement de frais moins élevé dès le début. »

Et les Belges? Pour l’instant, onze parlementaires en sont à leur premier mandat et ne peuvent rien reverser. Mais les dix autres n’ont jamais reversé un centime de leurs indemnités de frais généraux. « Ce n’était pas nécessaire », fait savoir la délégation PS, « car l’enveloppe a été presque tout à fait utilisée pour les besoins de chaque parlementaire européen. »

Cinq Belges promettent de rembourser ce qui reste de leurs indemnités de frais généraux à la fin de leur mandat actuel: Staes, Lamberts, Vandenkendelaere, Rolin et Arimont. Inversement, lors du vote susmentionné du 27 avril quatre Belges se sont opposés à la proposition de rembourser le restant : Belet, Deprez, Ries et Verhofstadt. Transparency International ne comprend pas ce point de vue. Nick Aiossa: « Pardon, mais il y a des règles pour cet argent. Si vous ne l’utilisez pas selon les règles, cela signifie implicitement qu’il faut rembourser. »

Transparency International estime que les dispositions autour de l’indemnité de frais généraux sont « absolument scandaleuses », souligne Aïossa, autant en matière de transparence que de justification financière. « Par rapport au budget total de l’UE, 39 millions d’euros ne sont pas une grande somme, mais ce n’est pas non plus une bagatelle. C’est une ligne budgétaire symbolique : il s’agit de la façon dont les parlementaires élus utilisent l’argent du contribuable. Mais personne n’exerce de contrôle. C’est un grand scandale, qui traîne depuis beaucoup trop longtemps. Je ne peux pas m’imaginer que les parlementaires européens donnent 39 millions d’euros à un état membre sans que cet état membre doive présenter la moindre preuve. Je suis très étonné par cette hypocrisie. Les citoyens européens ont toutes les raisons d’être en colère. »

D’après Aiossa, il est urgent d’établir des règles plus claires, à côté d’un contrôle fiscal complet. « D’autant plus qu’on sait que ces dernières années, certains parlementaires européens ont été impliqués dans les scandales financiers, même si ceux-ci n’étaient pas liés à une indemnité de frais généraux. Pensez au Front National en France, à MELD et FELD au Danemark ou au UK Independence Party (UKIP). Pour l’instant, un parlementaire européen britannique purge une peine de prison parce qu’il finançait des voyages de luxe avec les indemnités de staff. Mais malgré la pression publique, malgré les questions de journalistes d’investigation, de Transparency International et de groupes citoyens, le Parlement réagit de façon extrêmement défensive. Il est contre tout changement du statu quo. L’ancienne direction du Bureau s’est opposée à la transparence relative à l’indemnité de frais généraux – y compris Martin Schulz, alors le président du Parlement. »

À une époque où le populisme et l’eurosceptisme font fureur, le Parlement européen doit s’attaquer à ce « problème symbolique », estime Aiossa. « La bonne nouvelle, c’est que ce n’est pas un thème très complexe qui comporte tout un processus législatif. Non, il s’agit de règles internes, que le Parlement européen peut immédiatement adapter. S’il ne le fait pas, il se rendrait, vu les élections de 2019, un mauvais service. »

À l’origine, cet article affirmait qu’Ivo Belet se louait un bureau à lui-même. Ce passage a été adapté.

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