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Opinions publiques européennes : barre à droite toute

Le Vif

Les opinions publiques européennes connaissent une indéniable droitisation, en particulier en matière d’immigration et de sécurité, mais cette évolution convient d’être nettement nuancée, par exemple sur les questions sociétales, selon une enquête de l’institut de sondage français Ifop.

« La fermeté prévaut très largement en matière d’immigration et de sécurité », écrit Jérôme Fourquet, de l’Ifop, en résumant les résultats de cette enquête réalisée du 16 au 29 mai auprès de 4.512 personnes en France, Allemagne, Belgique, Pays-Bas, Espagne, Italie et Suisse. L’enquête et ses résultats ont fait l’objet de discussions d’experts et universitaires, lors d’un colloque organisé mercredi au Sénat français.

« On ne se sent en sécurité nulle part »

Indicateur de cette droitisation: l’idée selon laquelle « on ne se sent en sécurité nulle part » recueille l’assentiment de 70% des Italiens, 65% des Espagnols, 64% des Français, contre 44% en Suisse et 43% en Allemagne.

Le thème « il y a trop d’immigrés » recueille aussi l’adhésion de 83% des sondés en Belgique et 60% en Allemagne. En France elle atteint 66%, en Suisse 73% et en Italie 71%.

La droitisation se traduit aussi par le fait que les opinions publiques considèrent majoritairement que l’Etat doit donner davantage de liberté aux entreprises: 88% des Italiens, 73% des Français, 79% en Belgique, 61% en Allemagne et en Espagne.

« Les chômeurs pourraient trouver du travail s’ils le voulaient vraiment »

Il y a de même un « jugement assez critique sur les chômeurs », indique M. Fourquet. Le soutien au thème « les chômeurs pourraient trouver du travail s’ils le voulaient vraiment » s’échelonne de 54% en France à 64% en Belgique. L’idée est minoritaire uniquement en Espagne (23%) et en Italie (41%), deux pays particulièrement frappés par la crise.

Un autre « symptôme » de la droitisation réside dans les opinions des sympathisants de gauche. Une majorité d’entre eux « campe sur des positions généralement associées à la droite », souligne M. Fourquet. Sur le thème « il y a trop d’immigrés », 74% des sympathisants de gauche sont d’accord en Belgique, 63% en Espagne mais 41% en France.

M. Fourquet souligne toutefois que « l’hypothèse d’une droitisation des sociétés européennes mérite d’être nuancée ». Même si les opinions publiques souhaitent davantage de liberté pour les entreprises, une large majorité considère également que l’Etat doit corriger et encadrer le marché: 61% en France, 65% en Italie, 64% en Allemagne.

Au sujet du mariage et de l’adoption pour les couples homosexuels, les opinions sont largement acquises, notamment en Europe du Nord: 85% aux Pays-Bas, 74% en Allemagne, 71% en Belgique, 52% en France.

Selon M. Fourquet, « une certaine forme de libéralisme sociétal prévaut donc en Europe ».

L’universitaire Laurent Bouvet explique la différence entre la France et les autres pays voisins sur le mariage homosexuel par le fait que le débat autour de l’ouverture de ce nouveau droit « a duré très longtemps et qu’il y a eu aussi pour beaucoup un effet ras-le-bol ».

Les opposants au mariage gay étaient de surcroît beaucoup plus mobilisés que ses partisans, ajoute-t-il pour l’AFP. « Cela renvoie aussi au fond catholique français, qui n’est plus un fond religieux, mais qui reste un fond culturel très fort », poursuit-il.

Mais pour lui, au delà de ces indicateurs de droitisation des opinions publiques européennes, « sur le long terme, les sociétés en Europe évoluent vers plus de tolérance et d’ouverture ».

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