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Nouveau tir de missile nord-coréen: une « provocation irresponsable »

Le Vif

La Corée du Nord a mis à l’épreuve dimanche, avec un nouveau tir de missile, la politique des Etats-Unis et du nouveau président sud-coréen Moon Jae-In, partisan d’une reprise du dialogue sur le dossier nucléaire nord-coréen.

Il s’agit du deuxième tir nord-coréen en 15 jours, et du premier depuis la prestation de serment, mercredi à Séoul, de M. Moon, qui a dénoncé une « provocation irresponsable », quand Donald Trump a lui demandé un durcissement des sanctions contre le Nord.

Lancé de la base militaire nord-coréenne de Kusong, dans la province du Nord Pyongan, vers 05h30 (20h30 GMT samedi), le projectile a parcouru environ 700 km avant de s’abîmer en mer du Japon, selon l’état-major interarmes sud-coréen.

Le commandement américain du Pacifique a estimé de son côté qu’il ne s’agissait vraisemblablement pas d’un missile intercontinental.

« Que cette nouvelle provocation soit un appel à toutes les nations pour mettre en oeuvre des sanctions bien plus fortes contre la Corée du Nord », a indiqué la Maison Blanche dans un communiqué.

Après une réunion d’urgence avec ses conseillers à la sécurité nationale, M. Moon a affirmé que son gouvernement condamnait fortement ce « défi grave à la paix et la sécurité sur la péninsule coréenne et à la communauté internationale », a déclaré son porte-parole Yoon Young-Chan.

Contrairement à sa prédécesseur Park Geun-Hye, M. Moon défend l’idée d’un dialogue avec le Nord pour apaiser une situation particulièrement tendue sur la péninsule. Mais il a averti dimanche qu’un tel dialogue serait possible « seulement si le Nord change d’attitude ».

Visite à Pyongyang

Lors de sa prestation de serment, le nouveau président, issu du Parti démocratique (centre-gauche), qui avait été la cheville ouvrière du dernier sommet intercoréen en 2007, s’était dit prêt à se rendre « à Pyongyang si les conditions (étaient) réunies ».

La situation s’est crispée sur la péninsule en raison de l’accélération des programmes balistiques et nucléaire nord-coréens.

La Corée du Nord, qui cherche ouvertement à développer des missiles intercontinentaux susceptibles de porter le feu nucléaire sur le sol américain, a réalisé cinq essais nucléaires, dont deux depuis le début 2016.

Dans ce laps de temps, elle a aussi effectué des dizaines de tirs de missiles.

Les choses se sont envenimées ces derniers mois, à mesure que Pyongyang a surenchéri verbalement aux déclarations belliqueuses de l’administration Trump, qui s’est dit prête à régler seule, si besoin par la force, le problème nord-coréen.

Les choses avaient cependant paru s’apaiser récemment, Donald Trump déclarant même qu’il serait « honoré » de rencontrer le leader nord-coréen Kim Jong-Un.

Samedi, c’est Pyongyang qui a évoqué une possible ouverture, par la voix de la cheffe du département Amérique du Nord au ministère nord-coréen des Affaires étrangères.

Cette diplomate, Choe Son-Hui, a déclaré aux journalistes à l’aéroport de Pékin, où elle faisait escale avant de repartir pour Pyongyang, que son pays pourrait « avoir un dialogue, si les conditions s’y prêtent », avec le gouvernement du président américain Donald Trump, selon l’agence sud-coréenne Yonhap.

‘Maximiser l’influence’

Mme Choe venait d’Oslo où elle avait rencontré des universitaires et d’anciens responsables américains comme Thomas Pickering, ex-représentant des Etats-Unis aux Nations unies, et Robert Einhorn, ancien conseiller spécial au Département d’Etat pour la non-prolifération et le contrôle des armements, a précisé l’agence.

« Le Nord cherche apparemment à tester M. Moon et à voir comment prendront forme sa politique nord-coréenne ainsi que la coordination politique entre le Nord et les Etats-Unis », a déclaré Yang Moo-Jin, professeur à l’Université des études nord-coréennes de Séoul.

Ce tir vise à « maximiser l’influence politique du Nord », dans la perspective d’éventuelles négociations avec les Etats-Unis, a-t-il encore estimé.

« Le Nord entend montrer, avant des négociations, qu’il ne renoncera pas aussi facilement à ses armes puissantes et précieuses », a-t-il poursuivi.

Il s’agit aussi du premier tir de missile nord-coréen depuis que le bouclier antimissile américain Thaad, installé en Corée du Sud, a été déclaré opérationnel le 2 mai. Son déploiement avait suscité la colère de la Chine, principal allié de Pyongyang, qui y voit une atteinte à ses propres capacités militaires.

Le Premier ministre japonais Shinzo Abe a qualifié dimanche le tir de « totalement inacceptable », parlant d’une « grave menace » pour Tokyo. « Nous protestons fermement contre (ce tir de) la Corée du Nord », a-t-il insisté dimanche.

Selon le chef de cabinet du gouvernement nippon, Yoshihide Suga, le missile tiré par l’armée nord-coréenne a volé environ 30 minutes avant de s’abîmer dans les eaux de la Mer du Japon, entre le Japon et la péninsule coréenne.

La plupart des experts sont nombreux à reconnaître que Pyongyang a fait de gros progrès dans ses programmes nucléaire et balistique depuis la prise de pouvoir de Kim Jong-Un, après le décès de son père Kim Jong-Il, en 2011.

Un « rappel » en vue de « sanctions bien plus fortes »

Le président américain Donald Trump « ne peut imaginer que la Russie est heureuse » de ce nouveau tir, le missile ayant trouvé son impact « si près du territoire russe – en vérité, plus près de la Russie que du Japon », indique un communiqué de la Maison Blanche.

« La Corée du Nord est une menace flagrante depuis beaucoup trop longtemps », peut-on encore lire dans le texte.

Les Etats-Unis se sont engagés « dur comme fer » à faire face à la menace nord-coréenne aux côtés de leurs alliés, rappelle le communiqué. « Que cette nouvelle provocation serve de rappel à toutes les nations, d’implémenter des sanctions bien plus fortes envers la Corée du Nord », conclut-il.

Xi et Poutine « préoccupés »

La Russie et la Chine sont pour leur part « préoccupées par l’escalade des tensions » dans la péninsule coréenne, a indiqué dimanche le Kremlin.

Le président russe Vladimir Poutine et le président chinois Xi Jinping « ont discuté en détail de la situation dans la péninsule coréenne » lors d’une rencontre à Pékin et « les deux parties ont exprimé leur préoccupation pour l’escalade des tensions », a déclaré à la presse le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.

La Chine avait auparavant fait part de son opposition « aux violations par la Corée du Nord des résolutions du Conseil de sécurité » et appelé toutes les parties en présence à « la retenue ».

Vladimir Poutine et Xi Jinping se sont entretenus lors d’une rencontre bilatérale, puis autour d’un déjeuner de travail, après avoir participé dans la matinée à l’ouverture du sommet des Nouvelles routes de la soie à Pékin.

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