Donald Trump © REUTERS

Nouveau Super Tuesday: les scénarios pour et contre Trump

Rudi Rotthier
Rudi Rotthier Journaliste Knack.be

Si les primaires de cette nuit, qui auront lieu dans cinq états, tournent à son avantage, Donald Trump est bien parti pour remporter la nomination. Cependant, ses adversaires républicains envisagent encore quelques manoeuvres pour l’empêcher d’emporter une majorité absolue de délégués.

Parmi les démocrates, les primaires sont relativement simples et elles diffèrent peu d’un état à l’autre. Il y a un système proportionnel, complété par les superdélégués, les ténors du parti qui bénéficient d’une voix au congrès du parti où l’on choisit le candidat nominé. Théoriquement, il se pourrait que Bernie Sanders l’emporte dans davantage d’états, mais qu’Hillary Clinton obtienne la majorité, même sans superdélégués, parce qu’elle l’emporte plus largement dans ses propres états.

Parmi les républicains, les états déterminent leur propre système, et l’enchaînement est conçu de façon à ce qu’au début il y ait beaucoup de petites élections ouvertes et relativement proportionnelles et qu’après viennent les états « winner-takes-all » ou « winner-takes-most », et aussi plus de grands états. L’objectif est d’accélérer et d’éclaircir la situation.

Sur les cinq états où l’on vote aujourd’hui, il n’y en a qu’un, la Caroline du Nord, qui possède un système proportionnel, où les 72 délégués sont répartis parmi les quatre candidats présidentiels restants. Sur les autres états, il y en a deux qui appliquent le système « winner-takes-all »: si le gagnant remporte une voix de plus que le deuxième, il obtient tous les délégués, c’est-à-dire 99 en Floride et 66 dans l’Ohio. Dans l »Illinois (69 délégués) et le Missouri (52 délégués), ce sont des élections winner-takes-most : celui qui l’emporte dans un district électoral, gagne tous les délégués de ce district.

Cette nuit, il y aura donc 367 représentants en jeu (à titre de comparaison : le 1er mars, le jour du premier et véritable Super Tuesday, il y en avait 595).

Jusqu’à présent, après un mois et demi de primaires et de caucus, Donald Trump devance Ted Cruz de 90 délégués. Trump a 460 délégués alors que Cruz en compte 370. Marco Rubio en a 163 et John Kasich 63. Pour une majorité, il faut 1 273 délégués. Pour l’instant, Trump a remporté un peu moins de 40% des délégués nécessaires.

Après cette nuit, la moitié des délégués seront répartis. S’il gagne en Floride, ce que suggèrent les sondages, Trump aura doublé son avance. S’il gagne en Ohio aussi, il devra gagner moins de la moitié des délégués restants pour obtenir la majorité, ce qui, à moins d’un effondrement de ses partisans, est facilement réalisable.

L’establishment mise sur l’Ohio

Or, l’establishment républicain espère que John Kasich, gouverneur de l’Ohio, et récemment réélu avec une majorité absolue, battra Trump dans son état. Les derniers sondages, et un sondage de sondages donnent l’avantage à Kasich, soutenu dans sa campagne par Mitt Romney et John Boehner, le précédent orateur de la Chambre des Représentants.

Si Marco Rubio perd dans son état natal, il perd toutes ses chances de gagner. Et même si Kasich l’emporte dans l’Ohio, en pratique il n’a aucune chance. Même mathématiquement, c’est presque impossible. Le seul candidat qui peut vraiment menacer Trump, c’est Ted Cruz, le sénateur conservateur du Texas. Mais ses meilleurs états, où vivent le plus de chrétiens évangéliques, généralement au sud, sont déjà passés. Pour ce Super Tuesday, Cruz a le plus de chances de l’emporter dans le Missouri, un état relativement chrétien évangélique. À en croire les sondages, il n’a aucune chance de l’emporter en Floride et dans l’Ohio. Trump caracole en tête des sondages en Caroline du Nord et dans l’Illinois.

Les sondages n’ont pas mesuré l’impact des événements récents, le flux ininterrompu d’annonces anti-Trump que lancent les républicains contre les membres de leur parti et les troubles lors d’un meeting de Trump finalement annulé, mais selon les bureaux de paris, les chances de Trump de nomination ont augmenté de 5% suite aux troubles. Quoi qu’il en soit, l’homme d’affaires a de nouveau fait la une de l’actualité.

Le meilleur scénario pour Trump, c’est qu’il remporte les cinq états haut la main et obtienne 800 délégués après cette nuit. Si ensuite, comme il le prétend, il réalise de bons scores dans le New Jersey, en Philadelphie, à New York et en Californie, il est assuré d’une majorité de délégués.

L’opposition espère qu’il perdra dans l’Ohio et de préférence aussi en Floride, et qu’il obtiendra de moins bons résultats dans toutes les autres villes.

Dans ce cas, Trump augmente encore son avance en délégués sur Cruz, mais il ne crée et pas de différence écrasante et une majorité absolue devient difficile pour lui : réalisable s’il perd uniquement dans l’Ohio, mais à peu près impossible s’il perd tant dans l’Ohio qu’en Floride.

Un ou plusieurs adversaires?

Certains ténors du parti sont persuadés qu’il vaut mieux garder tous les candidats dans la course. Jusqu’à présent, on pensait que Marco Rubio, plus ou moins à sec, jetterait l’éponge après une défaite en Floride, mais à présent il se dit qu’on essaierait de faire baisser le nombre de délégués affiliés à Trump en conservant plus de candidats. Tous les délégués subtilisés à Trump pourront en effet être attribués au candidat non-Trump lors du congrès du parti à Cleveland en juillet.

Cependant, les intérêts restent divisés. Cette nuit, le camp Trump souhaite mettre Rubio et Kasich KO. Cruz souhaite que Rubio et Kasich jettent l’éponge de sorte que la lutte s’articule autour de Trump et d’une voix unanimement non-Trump.

Alors que Rubio et Kasich souhaitent gagner dans leur état et garder leur campagne à flot – car qui sait ce qu’il se passera au congrès du parti – Kasich espère devenir le candidat de l’establishment et du bon sens.

Ce Super Tuesday est important aussi parce que ce sont trois états à l’issue électorale incertaine : lors des élections en novembre, l’Ohio, la Floride et la Caroline du Nord seront très fort disputées entre les démocrates et les républicains. On étudiera notamment le taux de participation : quel parti mobilise plus d’électeurs ?

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