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Les man½uvres d’Ankara en Libye

De la gestion de l’aéroport de Benghazi au refus des frappes aériennes, le Premier ministre turc Erdogan est prudent dans ses interventions sur la crise libyenne. La défense des nombreux intérêts turcs peut expliquer son attitude modérée.

A la demande des insurgés libyens, la Turquie va se charger de la gestion de l’aéroport de Benghazi afin de faciliter le transport de l’aide humanitaire vers la Libye. C’est ce qui ressort des dernières déclarations du Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan.

Pourquoi la Turquie ?
La stratégie turque en Libye mûrit au fil des jours. Seul pays musulman de l’OTAN et incontournable acteur diplomatique en Méditerranée, la Turquie a tout de suite manifesté des réserves sur la prise en charge par l’Alliance atlantique du commandement militaire de l’intervention en Libye, tout en condamnant les frappes aériennes de la coalition internationale et assurant qu’elle ne « pointerait jamais une arme sur le peuple libyen« .

En tant que membre de l’OTAN, Ankara a accepté d’envoyer des navires de guerre au large de la Libye, pour faire respecter l’embargo sur les armes.

Selon plusieurs sources, la Turquie a accepté ce compromis en échange de certaines concessions: des pays membres de l’OTAN opposés aux bombardements surveilleraient la zone d’exclusion et les batteries de défense antiaérienne, tandis que d’autres se chargeraient de la zone élargie, où les bombardements seront autorisés. D’après certaines rumeurs, Ankara voudrait aussi négocier la pérennité d’une partie de ses installations qui pouvaient être menacées par le plan de restructuration de l’OTAN approuvé en novembre 2010, à Lisbonne.

Des intérêts à protéger
Seul pays du Moyen-Orient à vocation européenne, la Turquie est très proche de la Libye de Kadhafi. En 2010, les deux pays ont conclu des contrats pour un montant de 2,2 milliards de dollars, soit 60% d’augmentation par rapport à 2009. A l’heure actuelle, la Libye compte environ 200 entreprises turques actives sur son territoire. C’est en 2009, après l’opération israélienne « Plomb durci » dans la bande de Gaza, que les relations entre Ankara et Kadhafi sont montées en flèche. Pendant que ses rapports avec Israël se détérioraient, Erdogan a trouvé en Kadhafi un nouveau partenaire. En novembre 2010, pour son positionnement pro-palestinien, Erdogan a même été décoré du « prix Kadhafi », remis chaque année à ceux qui se sont distingués dans la tutelle des droits humains.

A la lumière de ce lien privilégié, et étant donné que Kadhafi n’est pas encore déchu, l’attitude modérée d’Ankara n’étonne pas. D’autant plus que ce pays, contrairement à l’Europe ou aux Etats-Unis, paraît aujourd’hui le seul en mesure de renouer un dialogue entre l’Occident et le monde arabe.


A.S.


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