© Reuters

Les Kurdes de Syrie longtemps marginalisés

Le Vif

Les Kurdes de Syrie, dont l’enclave d’Afrine est bombardée depuis une semaine par la Turquie, ont bénéficié du chaos du conflit syrien pour établir une autonomie de facto dans les territoires qu’ils contrôlent dans le nord et le nord-est du pays. Ils ont adopté une position de « neutralité » envers le pouvoir et la rébellion au début de la guerre.

– Discrimination –

Installés surtout dans le nord de la Syrie, les Kurdes, essentiellement sunnites avec des minorités non musulmanes et des formations politiques souvent laïques, représentent 15% de la population syrienne selon les estimations. Ils ont souffert de décennies de marginalisation et d’oppression de la part du régime du parti Baas au pouvoir, et n’ont cessé de réclamer la reconnaissance de leurs droits culturels et politiques.

– Neutralité et autonomie –

Dès le début du conflit déclenché en 2011 par la répression sanglante d’une révolte pacifique par les troupes du président Bachar al-Assad, le régime fait un geste envers les Kurdes. M. Assad naturalise 300.000 Kurdes « apatrides » après un demi-siècle d’attente et de protestations. Ces Kurdes de Syrie s’étaient vus retirer leur nationalité à la suite d’un recensement controversé en 1962.

Les Kurdes vont ensuite tenter de rester à l’écart du conflit. Ils adoptent une position « neutre » envers le pouvoir et la rébellion, essayant d’empêcher les rebelles de pénétrer dans leurs régions pour éviter des représailles du régime.

A la mi-2012, les forces gouvernementales quittent des positions dans le nord et l’est, qui sont reprises par les Kurdes. Ce retrait est perçu comme destiné essentiellement à encourager les Kurdes à ne pas s’allier aux rebelles.

– ‘Région fédérale’ –

En novembre 2013, le Parti de l’union démocratique (PYD), dont les Unités de protection du peuple (YPG) sont le bras armé, proclame une semi-autonomie.

En mars 2016, les territoires semi-autonomes annoncent la création d’une « région fédérale », composée de trois cantons, Afrine –dans la province d’Alep (nord)–, Jaziré –qui correspond à la province de Hassaké (nord-est)–, et l’Euphrate –sur une partie des provinces d’Alep et de Raqa.

Cette initiative s’apparente à une autonomie de facto et les Kurdes vont s’attirer l’inimitié des forces de l’opposition, en plus de l’hostilité de la Turquie voisine.

En décembre 2016, ils se dotent d’un « contrat social », une Constitution pour la « région fédérale ».

En 2017, les habitants des régions kurdes élisent leurs conseils municipaux.

– Antijihadistes –

Dès 2014, la branche armée du PYD a été l’une des principales forces combattant le groupe Etat islamique (EI) avec l’appui aérien de la coalition conduite par les Etats-Unis.

Début 2015, les forces kurdes soutenues par les frappes de la coalition chassent l’EI de Kobané, à la frontière turque, après plus de quatre mois de violents combats.

En octobre 2017, les Forces démocratiques syriennes (FDS), une alliance de combattants kurdes et arabes, chassent l’EI de son fief de Raqa après des mois de combats.

– Offensive turque –

Le 14 janvier 2018, la coalition annonce oeuvrer à la création d’une « force » frontalière de 30.000 hommes dans le nord de la Syrie, notamment constituée de membres des FDS, dominées par les YPG.

Or, la Turquie considère les YPG comme l’extension en Syrie du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), une organisation kurde qui livre une guérilla contre Ankara depuis 1984.

La Turquie avait déjà lancé une offensive dans le nord de la Syrie en août 2016 pour repousser à la fois l’EI et l’expansion territoriale des milices kurdes.

Le 20 janvier, la Turquie lance une offensive terrestre et aérienne baptisée « Rameau d’olivier » contre les YPG dans la région d’Afrine.

Le 25, le canton kurde d’Afrine exhorte Damas à intervenir contre l’aviation turque.

Le lendemain, Ankara promet d’élargir l’offensive et de lancer ses forces contre la ville de Minbej.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire