Fernando Haddad © REUTERS

Les grands enjeux des élections générales au Brésil

Le Vif

Le premier tour des élections (présidentielle, gouverneurs, députés et deux tiers des sénateurs) aura lieu dimanche au Brésil dans un climat très polarisé et un contexte de crises multiples et profondes pour le plus grand pays d’Amérique latine. On fait le point en six questions sur le scrutin des 7 et 28 octobre.

1. Le candidat d’extrême droite peut-il être élu?

Les sondages le disent depuis des semaines, le député Jair Bolsonaro est assuré de se retrouver au deuxième tour, sous l’étiquette de son petit parti, le PSL (Parti social libéral). Mais alors qu’il gagnait certains de ses duels au second tour, depuis le 24 septembre il est donné perdant dans presque tous. S’il était élu chef de l’Etat, le Brésil se choisirait pour la première fois un président d’extrême droite, chantre de la dictature (1964-85) et apologue de ses tortionnaires.

2. Le parti de gauche de Lula peut-il revenir au pouvoir ?

La candidature de l’ex-président Luis Inacio Lula da Silva, emprisonné pour corruption, ayant été invalidée, son remplaçant, Fernando Haddad, ex-maire de Sao Paulo, n’a cessé de progresser dans les intentions de vote depuis son entrée tardive en campagne, le 11 septembre. M. Haddad, à la tête du Parti des Travailleurs (PT), semble assuré d’aller au deuxième tour, pour un duel avec Jair Bolsonaro. Pour la première fois la semaine dernière un sondage l’a donné victorieux, et au-delà de la marge d’erreur.

Si M. Haddad était élu président, le PT remporterait la 5e présidentielle consécutive depuis 2002, après les élections de Lula (2002 et 2006) puis de sa dauphine Dilma Rousseff (2010, 2014). Le président sortant Michel Temer (MDB, centre droit) avait accédé au pouvoir après la destitution de Mme Rousseff, dont il était le vice-président.

3. Pourquoi cette campagne a-t-elle été inédite?

– Le grand favori Lula (près de 40% des intentions de vote), a finalement été écarté de la course en août après des mois de rebondissements politico-judiciaires. Le brouillard autour du sort de Lula a fait pendant des mois de ce scrutin le plus incertain des temps modernes au Brésil, laissant son propre parti mais aussi tous les autres en suspens.

– Celui qui est devenu ensuite le favori du 1er tour, Jair Bolsonaro, a frôlé la mort après avoir été poignardé à l’abdomen début septembre lors d’un bain de foule. Hospitalisé plus de trois semaines, il n’a plus pu faire campagne dans la rue.

Après un premier règne ayant soulevé bien des espoirs, le président Luiz Inácio Lula da Silva fut rattrapé par des affaires de corruption.
Après un premier règne ayant soulevé bien des espoirs, le président Luiz Inácio Lula da Silva fut rattrapé par des affaires de corruption.© PAULO WHITAKER/REUTERS

4. Quel est l’impact sur le scrutin de la corruption ?

Limité. A part Lula, écarté pour corruption, la majeure partie de l’élite brésilienne mise à l’index par la justice devrait rester aux commandes. Les grands caciques régionaux seront réélus. Ou leurs enfants. En ce sens, l’enquête gigantesque « Lava jato » (Lavage express), si elle a permis de mettre en cause — et même parfois d’incarcérer — des dizaines de responsables de quasiment tous les partis, n’a pas révolutionné la pratique de la politique au Brésil.

5. Quelle attitude des marchés au lendemain du 1er tour ?

L’arrivée au pouvoir de Bolsonaro serait pour eux un moindre mal, même si celui-ci a avoué sa totale incompétence en économie. Il a déjà désigné son « super ministre de l’Economie », Paulo Guedes, un « Chicago boy » ultra-libéral. En revanche ils ne veulent pas du retour de la gauche avec Haddad. Pourtant Lula, qui leur faisait si peur au début des années 2000, avait su se concilier les marchés.

6. Quels défis majeurs pour le prochain président?

Donner un sérieux coup de fouet, grâce à de courageuses réformes d’austérité, à une économie qui ne redémarre pas après deux années de récession historique (2015-16) et compte près de 13 millions de chômeurs. Enrayer la spirale de la violence armée, autre préoccupation majeure des Brésiliens, avec la santé, l’éducation et le logement — des secteurs qui manquent cruellement de moyens.

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