© Antoine Repessé

Le photographe Antoine Repessé met en scène les déchets qu’il a accumulés durant quatre ans

Le Vif

Pour montrer, mieux que les statistiques, l’ampleur du problème. Et accélérer les solutions.

Si vous vous rendiez il y a peu dans son appartement, vous auriez pu soupçonner Antoine Repessé d’être atteint du syndrome de Diogène, ce trouble qui touche les personnes qui n’arrivent pas à jeter et entassent bibelots et déchets, transformant souvent leur foyer en gigantesque dépotoir.  » J’avais finalement accumulé 70 mètres cubes de déchets… C’était ultraprésent. Par bonheur, j’ai un grand appartement, explique le photographe lillois. J’avais quasiment monté un centre de tri chez moi, pour garder ce qui est stockable. Je rangeais mes déchets par pièce et par thème. Dans la chambre, c’était les clopes et les cartons de papier toilette. Mon bureau était condamné, je ne voyais même pas le bout de la pièce. Il y avait parfois des détritus jusqu’au plafond ! Les gens, ça les a fait marrer… Il y avait un côté un peu oppressant, mais je savais que c’était ponctuel.  » Le but de la démarche ? Montrer, en images, la quantité de déchets accumulés par chaque citoyen.

Le photographe Antoine Repessé met en scène les déchets qu'il a accumulés durant quatre ans
© Antoine Repessé.

Prévue pour être mise en boîte en une année, la série – intitulée #365 Unpacked (1) – lui en a finalement pris quatre, calée entre tous ses différents projets. Pas facile, en effet, de récolter assez de déchets pour obtenir des amas d’ordures très impressionnants et ainsi arriver à capter le regard du public. Les chiffres témoignent de la galère de l’entreprise : 5 000 paquets de cigarettes, 1 600 bouteilles de lait, 1 800 briques de lait, 4 800 rouleaux de papier toilette…

Heureusement, Antoine Repessé a pu compter sur l’aide de ses amis et connaissances pour poser sur ses clichés et l’aider à empiler ses déchets.  » Beaucoup de gens ont gravité autour du projet. Pour charger le camion, dans la mise en scène, etc. Par exemple, on ne peut pas faire des montagnes de canettes, ça tombe tout le temps. J’ai donc passé des soirées entières avec des copines à confectionner des colliers de canettes.  »

Le photographe Antoine Repessé met en scène les déchets qu'il a accumulés durant quatre ans
© Antoine Repessé.

Jouer les  » orfèvres du pauvre  » valait le coup, puisque ses 26 images, on ne peut plus éloquentes, ont fait le tour du monde.  » Elles font beaucoup réagir les gens. On a beau être conscient de la problématique que posent les déchets, on peut évoquer des statistiques, ce n’est pas parlant pour autant. C’est ça qui est intéressant dans la photo : elle passe la barrière de la langue et de la culture. L’amoncellement des déchets, ça concerne tout le monde et pas que les pays développés. J’ai reçu des messages d’Europe, des Etats-Unis mais également de Chine, de Taïwan ou du Vietnam.  »

D’où l’intérêt aussi pour ce photographe engagé de sensibiliser à l’environnement les jeunes générations biberonnées au consumérisme à outrance. Des écoles ont ainsi repris son concept pour photographier les enfants au milieu des pots de yaourt et des bouchons de bouteille de la cantine.  » L’idée, à chaque fois que je réalise une série, c’est aussi d’accompagner le projet. Je ne fais pas des photos uniquement pour le côté esthétique.  » Une démarche nécessaire quand on sait que, selon les derniers chiffres officiels, en 2014, l’ensemble des ménages belges a produit 5 647 017 tonnes de déchets sur l’année.

(1) La série d’Antoine Repessé est exposée jusqu’au 30 septembre prochain à la Maison du zéro déchet, à Paris. www.lamaisonduzerodechet.org

Par Jacques Besnard.

Le photographe Antoine Repessé met en scène les déchets qu'il a accumulés durant quatre ans
© Antoine Repessé.

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