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Le Pakistan, maillon faible du cercle des Etats nucléaires?

Les Etats-Unis craignent que du matériel nucléaire puisse tomber entre de mauvaises mains, notamment au Pakistan.

Avant d’ouvrir le sommet sur la sécurité nucléaire, ce lundi à Washington, Barack Obama a donné le ton. « Ce sommet a pour but principal de mettre la communauté internationale sur la voie d’une maîtrise du matériel nucléaire » alors que « nous savons que des organisations comme Al-Qaeda sont en train d’essayer d’obtenir une arme nucléaire, une arme de destruction massive qu’elles n’auront aucun scrupule à utiliser ».

Un responsable anti-terroriste américain, sous couvert d’anonymat, estime cependant qu’ « à ce stade, ces organisations ne semblent pas avoir fait beaucoup de progrès. Développer une bombe nucléaire requiert un processus sophistiqué que Al-Qaeda ne maîtrise visiblement pas ». « Il serait beaucoup plus probable qu’un groupe terroriste cherche à acheter ou voler des armes nucléaires », estime Dan Byman, expert à l’institut Brookings.

Il existe quelque 1600 tonnes d’uranium hautement enrichi et 500 tonnes de plutonium dans le monde, soit suffisamment pour fabriquer 120.000 bombes nucléaires. Or leur accès n’est pas toujours suffisamment sécurisé. L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a recensé une quinzaine de cas de trafic d’uranium enrichi ou de plutonium entre 1993 et 2008, notamment dans l’ex-bloc soviétique.

Les Etats-Unis craignent que cette prolifération de matériel nucléaire passe en particulier par des Etats comme la Corée du Nord ou le Pakistan, dont les services secrets sont soupçonnés de soutenir les taliban et Al-Qaeda. Le Pakistan est aujourd’hui l’une des plus grandes sources d’inquiétude pour la sûreté nucléaire, selon une étude menée par la Kennedy School of Government de l’Université de Harvard.

Le Pakistan a vendu des technologies à l’Iran, la Corée du Nord, la Libye…

Il était déjà le plus important proliférateur de la planète… En 2004, le père de la bombe atomique pakistanaise, Abdul Qadeer Khan, considéré comme un héros national dans son pays, avait confessé publiquement à la télévision avoir vendu de la technologie, des équipements et du savoir-faire à l’Iran, la Corée du Nord et la Libye dans les années 1990.

Mais l’arme pakistanaise, conçue comme une force de dissuasion face à l’Inde, son rival historique, également nucléaire, pourrait-elle cette fois tomber aux mains des taliban et d’Al-Qaeda?

Les Etats-Unis s’inquiètent de la course à l’armement menée par les deux géants voisins, et du flou qui entoure les infrastructures pakistanaises. Infrastructures qui feraient d’ailleurs l’objet d’attaques: d’après un article publié en 2009 par l’Académie militaire américaine de West Point, des militants islamistes proches d’Al-Qaeda ont attaqué ces dernières années trois de ces installations.

Quel dispositif de sécurité?

Les autorités d’Islamabad se veulent rassurantes. Le Premier ministre Yousuf Raza Gilani a qualifié son pays de « puissance nucléaire responsable ». Le dirigeant du seul pays musulman au monde qui soit une puissance atomique déclarée, pays sur lequel comptent les Etats-Unis pour combattre l’islamisme radical dans la région, participe au sommet nucléaire de Washington.

Le ministre pakistanais des Affaires étrangères Shah Mehmood Qureshi a par ailleurs affirmé que le Pakistan avait donné des précisions aux Etats-Unis sur les dispositifs de sécurité « de première classe » qui protègent l’arsenal nucléaire d’Islamabad.

Notre envoyée spéciale, en 2009, décrivait les précautions prises par Islamabad: « Non seulement les armes sont réparties sur une dizaine de sites secrets et ultraprotégés, mais elles sont conçues en kit. Les engins sont entreposés à l’écart de leurs vecteurs, et les coeurs de matière fissile sont séparés des armes. Toute manipulation suppose l’accord d’au moins deux personnes tout au long de la chaîne de commandement. Et la procédure d’activation comprend un double système de codage permettant, d’une part, d’authentifier le donneur d’ordre, d’autre part, d’activer l’arme. »

Méfiants, les Etats-Unis auraient discrètement mis en place un commando d’élite susceptible de se rendre rapidement au Pakistan pour tenter de sécuriser l’arsenal nucléaire d’Islamabad si le gouvernement venait à se désintégrer ou à être affaibli.

LExpress.fr

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