© Reuters

Le Front national se mue en Rassemblement national mais peine à fédérer

Le parti français d’extrême droite Front national (FN), qui s’est qualifié par deux fois au second tour de la présidentielle, devrait se rebaptiser vendredi « Rassemblement national », nom moins « militaire » destiné à favoriser les alliances, et donc la victoire, mais non sans difficultés.

Consultés par courrier depuis le 9 mai, les militants du FN devraient adopter sans surprise le nouveau nom proposé par leur cheffe Marine Le Pen, qui annoncera les résultats du vote à Lyon (est) vendredi soir, à l’issue d’un conseil national élargi du parti.

Les militants étaient très partagés sur le principe d’un changement d’appellation, mais au congrès des 10 et 11 mars, « ils ont été rassurés parce qu’on garde la flamme et le mot +national+ », explique un cadre du FN. « C’est le changement dans la continuité », renchérit le député FN Sébastien Chenu.

L’enjeu est de séduire les électeurs en vue des élections européennes de l’an prochain face aux ambitions supposées d’Emmanuel Macron dépeint comme le chef des « mondialistes ».

« Il fait l’alliance des mondialistes. A charge pour nous de faire l’alliance de ceux qui défendent la nation. Effectivement, si nous ne le faisons pas, alors nous lui donnerons un avantage considérable », a expliqué mardi Marine Le Pen.

– « Frein psychologique » –

Abandonner le mot « front », trop « militaire » aux oreilles de Marine Le Pen, lui permet de lever le « frein psychologique » à voter pour un parti régulièrement accusé de racisme et d’antisémitisme.

Cette décision historique est ainsi destinée à parachever le travail de dédiabolisation du FN entamé lors de la prise de pouvoir de Marine Le Pen, en 2011, à la suite de son père Jean-Marie après ses propos polémiques sur la Shoah. Marine Le Pen est allée jusqu’à exclure en 2015 son père du parti qu’il lui a légué.

Mais la normalisation du parti est loin d’être achevée. Le 22 mai, le FN a ainsi invité à l’Assemblée nationale, chambre basse du Parlement français, un député égyptien qui tient régulièrement des propos antisionistes et complotistes.

Devenu plus fréquentable, le Rassemblement national devrait plus facilement nouer des alliances, espère l’actuel FN. Mais les candidats au mariage ne se sont toujours pas déclarés.

La droite s’y refuse: le président de LR (Les Républicains) Laurent Wauquiez y oppose en effet une fin de non-recevoir et les personnalités approchées, comme l’ancien ministre LR Thierry Mariani, n’ont pas encore donné de réponse.

Marine Le Pen, qui ne croit plus au clivage gauche-droite, a certes appelé à voter lors d’une législative partielle pour le candidat LR, mais c’était dans un contexte très particulier de crise migratoire sur l’île française de l’océan Indien Mayotte. L’essai ne s’est pas reproduit.

Même son ancien allié à la présidentielle, Nicolas Dupont-Aignan, crédité de 7% aux européennes par Harris Interactive, semble vouloir lancer sa propre liste avec deux autres petits partis eurosceptiques, le Parti Chrétien-Démocrate et le CNIP.

– Petite musique –

Les rapprochements sont rendus d’autant plus hypothétiques que la ligne de préférence nationale du FN n’a, elle, pas changé. Elle est même peut-être devenue plus identitaire.

À défaut de concrétiser le rassemblement en France, Marine Le Pen a tenté de faire affiche commune à Nice (sud-est) le 1er mai avec ses alliés européens et ne cesse de faire l’éloge de la Ligue italienne qui a conclu un accord de gouvernement avec les populistes du M5S.

Manque de chance, son ami chef de la Ligue Matteo Salvini, retenu par des tractations gouvernementales, n’a pas fait le déplacement. Autre invité de marque, le Néerlandais Geert Wilders, tenu par un procès pour incitation à la haine, s’est aussi désisté.

Le conseil national de vendredi pourrait de plus être parasité par l’intervention la veille de la nièce de Marine Le Pen, Marion Maréchal, qui s’exprimera sur Mai-1968 après avoir dévoilé son projet d’école à Lyon où les intervenants viennent de tous les courants de l’extrême droite, fer de lance d’un combat d’idées qui pourrait à terme devenir électoral.

Contenu partenaire