Signature des accords du Latran par le cardinal Gasparri, au nom du Saint-Siège, et Mussolini en personne. © PHOTO NEWS

Le 11 février 1929, le jour où le pape a négocié avec Mussolini

Pie XI est satisfait. Il vient de retrouver un Etat. Un véritable Etat, avec un sol, des services publics, des médias… Mussolini, lui aussi, est content. Voilà l’Italie pleinement reconnue par l’Eglise. Cela devrait l’aider à conquérir l’estime des catholiques, en même temps qu’une large reconnaissance internationale. Comme une manière d’ouvrir une nouvelle ère. Tout avait commencé en 1870.

L’Etat italien, en plein processus d’unification, conquiert alors de nouveaux territoires et s’empare de la ville de Rome. Pour le pape, qui régnait de longue date sur de vastes Etats pontificaux, le coup est rude. Refusant toute négociation, il s’enferme dans son palais et se drape de silence. Entre le Saint-Père et le jeune Etat, une guerre froide vient de s’ouvrir. On l’appellera la  » question romaine « .

Pour que les relations se réchauffent, il faudra du temps. Et deux hommes nouveaux. En 1922, Benito Mussolini s’empare du pouvoir italien, tandis qu’Ambrogio Damiano Achille Ratti est élu sur le trône de Pierre, sous le nom de Pie XI. Les deux hommes n’ont pas le même tempérament. Le leader fasciste est un homme violent, sans foi ni loi. Le chef des catholiques est profondément croyant, intelligent et pieux. Il n’empêche, tout ne les sépare pas : ils sont unis par un même mépris du communisme et une vive contestation des grands principes de la démocratie. Ce sont aussi des pragmatiques, chacun conscient de la valeur de ce que l’autre peut lui apporter. Volontaristes, ils comprennent vite qu’ils pourront mutuellement s’utiliser.

Le rapprochement s’opère en douceur. En autorisant à nouveau les crucifix dans les écoles, Mussolini permet progressivement à l’Eglise de retrouver une place dans l’espace public. Pie XI, pour sa part, se prononce publiquement en faveur du nouvel homme fort, voyant en lui  » un protégé de la divine Providence « . A partir de 1926, d’abord timide, une ébauche de dialogue naît entre les deux pouvoirs. Avant que s’ouvrent de véritables négociations. Au menu : la question des territoires, bien sûr. Mais pas seulement. Il faut également discuter gros sous – le Saint-Siège réclame en effet des dédommagements à la hauteur de son expropriation. Il convient aussi de trancher la place de la religion au sein de l’Etat italien.

Le 11 février, sous haute sécurité, une cérémonie officielle se tient dans la salle des papes, au palais du Latran. C’est Mussolini en personne qui signe les accords. A ses côté, le cardinal secrétaire d’Etat Gasparri représente l’Eglise. Outre un concordat, qui permet au catholicisme de devenir la seule religion officielle du pays, le texte permet à l’Eglise de recevoir quelques centaines de millions de lires. Surtout, elle lui offre une nouvelle indépendance et une véritable liberté. Le plus petit Etat du monde ? Sans doute. Mais c’est au départ de celui-ci que l’Eglise pourra à nouveau agir librement sur la scène internationale. Et s’écarter des excès du fascisme lorsque Mussolini aura définitivement dérapé.

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