La tyrannie des minorités

Militants de la théorie du genre, ONG et ASBL aux bonnes causes multiples, spécistes favorables aux Droits des animaux, végétaliens, néo-féministes qui voient en chaque homme un violeur potentiel, théoriciens de l’ouverture totale des frontières aux migrants au nom de la libre circulation planétaire : la vision manichéenne oppresseurs/opprimés de l’idéologie post-moderne fait cruellement penser aux doctrines mortifères marxistes du 20e siècle. Et elle prend une ampleur sidérante.

Caroline de Haas, une des égéries du mouvement #Balance ton porc, a déclaré récemment que « un homme sur deux ou trois est un agresseur ». Outre qu’on appréciera la précision de la statistique, cela voudrait dire qu’il y a plus de violeurs que de femmes violées. Mme de Haas, il est vrai, considère que le bikini est beaucoup plus délétère que le burkini, car le premier incarne bien davantage la sujétion de la femme au regard concupiscent du mâle. On a appris récemment que sous sa présidence, l’UNEF (Union nationale des étudiants de France) avait connu plusieurs affaires de viol. Comment accorder autant de crédibilité à un mouvement qui flique tant le désir masculin que le désir féminin ? La sérénité des relations entre hommes et femmes ces dernières décennies et les apports incontestables du féminisme historique pour l’égalité des droits incarnés par exemple par Anne Morelli méritait mieux que cette hystérie. Golden Globes, Oscars, Césars : le monde des artistes mondialisés se met désormais au garde-à-vous. Quiconque ne brandirait pas son écusson blanc met sa carrière d’acteur en péril. Dans son discours introductif, Jimmy Kimmel a fait l’éloge de la statue de l’Oscar, trop masculine, mais « qui garde ses mains là où on peut les voir, il ne dit rien d’insultant et n’a pas de pénis, on a besoin de plus d’hommes comme ça à Hollywood ». L’homme muet et émasculé, est-ce vraiment l’idéal masculin de la femme moderne ?

Dans la droite ligne de ce mouvement s’impose tout doucement l’écriture inclusive (certains organes de presse s’y sont mis) qui rendra bientôt l’orthographe française encore plus complexe à apprendre pour nos écolier.es et plus difficile à enseigner pour nos enseignant.es. Une réforme vitale, vraiment, pour lutter contre le décrochage scolaire et remonter aux scores de PISA ? On imagine déjà les grand.es auteur.es français.es, comme Victor Hugo ou George Sand, réimprimé.es à l’aune de ce joug orthographique absurde. Alors qu’il suffit de rappeler qu’au pluriel, le masculin est neutre.

Tout y passe. Ainsi, « l’intelligence artificielle pourrait contribuer à perpétuer les préjugés, notamment sexistes, si on ne prend pas garde aux données utilisées pour la nourrir », ont carrément mis en garde jeudi des expertes réunies au Congrès mondial du mobile (MWC) de Barcelone. Qui s’étonnent voire se scandalisent que l’immense majorité des informaticiens soient des hommes. L’intérêt des jeunes femmes pour les sciences humaines, par contre, ne se dément pas. La faute à l’assignation et à la relégation de type machiste ou serait-ce plutôt physiologique ou génétique ? Jordan B. Peterson, professeur de psychologie clinique à l’Université de Toronto, se bat dans son université, à coups de sérotonine et d’éthologie (étude du comportement animal), pour démontrer que les structures hiérarchiques de nos sociétés ne sont pas que des constructions sociales. Il combat également l’imposition légale de l’usage des pronoms neutres (zhe au lieu de he ou she). Sa chaîne Youtube a 850.000 abonnés et son dernier livre, « 12 Rules of Life, An Antidote to Chaos » (Random House) cartonne. Preuve que la résistance s’organise ?

Aujourd’hui, en Belgique, pour ne pas « hormonaliser » la transexualité, il est possible de changer de sexe sans changer d’apparence. On imagine le chaos suscité par un « homme » au milieu des toilettes dames et brandissant un document d’identité féminin. On voit là aussi comment un combat légitime pour le droit au changement de sexe se transforme en une régression.

Pour rencontrer l’évolution vers des familles « diverses », l’école bruxelloise Catteau-Aurore ne sera pas la dernière à renoncer, au grand dam des parents quels qu’ils soient, à la fête des pères et à la fête des mères pour une « fête des familles ».

Va-t-on bientôt renoncer à la reproduction sexuée et revenir, via le clonage, à l’état de bactérie ? Déjà sur des souris, il est possible de concevoir un embryon sur base de deux femelles. Le monde sans hommes rêvé par des féministes absolutistes bientôt réalité…

Mais le postmodernisme sévit jusque dans nos assiettes. Le végétarianisme voire le végétalianisme (aucune protéine animale d’aucune sorte) sont le régime alimentaire obligé de l’homme nouveau, malgré son absurdité puisque certaines régions du monde ne sont propres qu’à l’élevage. Tous les animaux sans exception seraient maltraités dans les abattoirs ! Leur sort est plus funeste qu’une impala dévorée vivante par une meute de lycaons. L’homme carnivore est culpabilisé. L’humanisme avait fait de l’animal un objet et de l’homme un sujet, voici les humains coupables de s’alimenter. On prépare des Droits des animaux sans voir qu’on devrait tôt ou tard mettre à égalité le chien domestique et la puce. Faudra-t-il épargner les tiques au nom de leurs droits légitimes contre l’arbitraire ?

Au plan migratoire, comme l’avait lancé Michel Onfray lors d’une interview tonitruante au Figaro, quiconque questionne la migration est un facho. Le migrant est le nouvel archange de la gauche radicale : il est la solution au problème lancinant des pensions, des pénuries de main d’oeuvre et à l’épuisement de la civilisation européenne « caucasienne », gréco-latine et judéo-chrétienne. Peu importe que le migrant puisse ou non s’assimiler, qu’il vienne d’une culture patriarcale, étrangère au siècle des Lumières : toutes les cultures se valent. Quiconque se pose des questions à propos de la cohésion sociale et la logistique nécessaire à accueillir, soigner et loger ces millions de gens, se voit rappeler à l’ordre : ce sont des arguments dignes « des heures les plus sombres de notre histoire ».

L’intimidation est la règle pour tous les renégats. Ce sont les minorités qui imposent leur loi à la majorité. L’opprimé est devenu l’oppresseur.

Une situation ubuesque qui pourrait provoquer un retour de balancier comme on le constate élections après élections. Les incontestables acquis du progressisme raisonnable seront alors balayés.

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