Dans la ville de Salma. © Belga

La moto, arme de guerre en Syrie

Le Vif

Pour reprendre la semaine dernière la ville de Salma aux rebelles, les forces du régime syrien ont compté sur le soutien des avions russes mais aussi sur une arme jusqu’à présent peu utilisée: la moto.

Les combattants ont eu recours à des dizaines de deux-roues pour se faufiler dans les rues étroites de Salma, fief des rebelles et du Front Al-Nosra dans la province de Lattaquié (ouest).

Elles « nous ont été utiles par leur rapidité et leur souplesse », témoigne Hany, un soldat de 25 ans.

« Mon deux-roues est aussi plus difficile à poursuivre et trop léger pour déclencher l’explosion d’une mine », poursuit-il, interrogé par un journaliste de l’AFP au cours d’un déplacement organisé par l’armée à Salma.

Le jeune soldat confie avoir passé sur la selle de sa moto la majeure partie des neuf mois qu’a duré la bataille de rue engagée pour reconquérir la ville perdue par le régime en 2012, dont nombre de rues sont inaccessibles aux voitures blindés ou aux chars.

« Notre manière de combattre a changé depuis le début de la guerre et nous avons fait évoluer nos méthodes offensives », explique le jeune soldat en descendant de sa moto, recouverte de boue après avoir paradé dans Salma.

Dans la ville de Salma.
Dans la ville de Salma. © Belga

Comme lui, de nombreux soldats s’accordent à dire que ces engins ont été la clé de la reconquête de cette localité perchée dans les montagnes de Lattaquié, forteresse de la minorité alaouite dont est issu le président Bachar al-Assad.

« C’est l’utilisation de plus de 80 motos qui a été décisive pour la victoire au cours des dernières 72 heures », témoigne un commandant engagé dans les combats. « Elles nous ont permis d’évacuer les blessés, de transporter les armes légères et la nourriture », ajoute-t-il.

Rouler à moto a également permis aux combattants de mieux esquiver les tirs des snipers rebelles qui visaient régulièrement les véhicules chargées de ravitailler les forces gouvernementales.

L’exemple du Hezbollah

Le commandant reconnaît que les forces gouvernementales ont repris à leur compte une tactique expérimentée depuis longtemps par leurs opposants et leurs alliés du Hezbollah chiite libanais.

« Nous avons observé la grande flexibilité et la rapidité qu’offrent les motos (…), et petit à petit nous avons commencé à les intégrer dans nos équipements », poursuit le trentenaire.

« Combattre à l’aide des motos doit devenir une méthode sur laquelle peut s’appuyer l’armée régulière », renchérit Reda Haj.

Ce soldat de 38 ans raconte avoir vu pour la première fois des combattants du Hezbollah faire la guerre en moto dans le Qalamoun, région montagneuse proche de la frontière libanaise. L’appui du Hezbollah a été déterminant sur plusieurs fronts où se battait le régime.

C’est donc logiquement que les motos ont fait leur apparition il y a neuf mois lorsque l’armée a lancé une nouvelle offensive à Salma.

« Nous étions répartis par groupes auxquels étaient attribuées trois motos pour transporter des provisions, des munitions et évacuer les blessés des zones impraticables pour les ambulances », explique Reda Haj. « Les motos sont sympas à conduire en temps de paix et utiles lorsqu’il y a la guerre », résume-t-il.

La longue bataille de Salma a été féroce, comme en témoignent les façades éventrées des immeubles, qui ont perdu les balcons d’où on pouvait admirer les collines ceinturant la ville.

Assis autour d’un feu, un groupe de soldats savoure la victoire en buvant un maté, un thé originaire d’Amérique latine très populaire au Liban et en Syrie.

« Je n’ai pas rangé mon arme depuis neuf mois », confie l’un d’eux, Abdul Karim Mahfuz, 26 ans. « Nous étions toujours sur le qui-vive… Mais aujourd’hui, je tiens une tasse de thé dans mes mains », sourit-il.

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