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La médecine ouvre les Nobel, avant la littérature et le prestigieux prix de la paix

La médecine ouvre lundi une saison Nobel exceptionnelle, avec deux prix de littérature pour tourner la page du scandale d’agression sexuelle qui a mis l’Académie suédoise en lambeaux, puis le prestigieux prix de la paix que ses soutiens voudraient voir récompenser Greta Thunberg.

Le prix de médecine est annoncé lundi à Stockholm à 11h30, heure de Bruxelles. Suivront la physique mardi, la chimie mercredi, la littérature jeudi avant l’économie lundi 14 octobre. Entretemps à Oslo, le 11, sera dévoilé le nom du ou des lauréats du Nobel de la paix. La militante suédoise Greta Thunberg, à l’origine du mouvement « Fridays for Future », est la favorite des bookmakers.

Dans chaque spécialité, les spéculations vont bon train mais tout pronostic est hasardeux, sinon impossible, car les listes nominatives des candidats restent cinquante ans secrètes. Pour la paix, le Comité Nobel norvégien, qui décerne le prix, a enregistré 301 candidatures cette année. Traditionnellement sensible aux préoccupations de l’opinion, le comité n’a pu passer à côté du phénomène « Greta » et de l’engouement qu’elle suscite auprès des jeunes générations dans son combat pour alerter les dirigeants du monde sur l’urgence climatique. Les experts restent cependant divisés sur la réalité du lien entre conflits armés et dérèglement climatique.

Le directeur de l’Institut de recherche sur la paix d’Oslo (Prio), Henrik Urdal juge, « extrêmement improbable » que la jeune fille obtienne le prix, soulignant aussi son jeune âge. Greta Thunberg a 16 ans. La plus jeune lauréate, Malala Yousafzai, s’était vu décerner le prix Nobel à 17 ans en 2014. Parmi les nobélisables sont aussi cités le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, artisan de la réconciliation avec l’Erythrée, et des ONG comme Reporters sans frontières (RSF) et le Comité pour la protection des journalistes (CPJ). Pour la médecine, l’institut Karolinska a reçu 633 nominations. Selon la radio publique suédoise SR, le prix pourrait récompenser les recherches de l’Américaine d’origine libanaise Huda Zoghbi sur les mutations du gène Mecp2 à l’origine de maladies cérébrales, tandis que le quotidien Dagens Nyheter (DN) parie sur les immunologistes Marc Feldmann (Australie) et Ravinder Maini (Grande-Bretagne) pour leurs travaux sur la polyarthrite rhumatoïde.

Le nom de l’Américaine Mary-Claire King, qui a découvert le gène BRCA1, responsable d’une forme héréditaire de cancer du sein, est également cité. Dagens Nyheter imagine un jury de physique plébiscitant la mécanique quantique avec l’Américain John Clauser, le Français Alain Aspect et/ou l’Autrichien Anton Zeilinger. SR mise, elle, sur le Néerlandais Ronald Hanson pour ses recherches pour l’intrication quantique. En chimie, l’Américain John Goodenough, inventeur des batteries au lithium, pourrait devenir, à 97 ans, le doyen des lauréats Nobel. Mais le prix pourrait aussi aller à deux femmes, la Française Emmanuelle Charpentier et l’Américaine Jennifer Doudna, qui ont mis au point un outil révolutionnaire de modification du génome, le « CRISPR-Cas9 ». Un autre chercheur, l’Américain d’origine chinoise Feng Zhang, revendique la paternité de la découverte – qui pourrait également être récompensée en médecine. Et la littérature dans tout ça?

En 2018, l’Académie suédoise, créée sur le modèle de l’Académie française et bouleversée par l’exposition de ses turpitudes internes après un scandale d’agression sexuelle, avait dû reporter d’un an l’annonce du Nobel – une première depuis 70 ans – faute du quorum d’académiciens requis. Il y a donc cette année deux médailles l’une pour 2018, l’autre pour 2019. Mais pour Madelaine Levy, critique au quotidien Svenska Dagbladet, les lauréats pourraient ne « pas accepter le prix » dévalorisé à leurs yeux. Comme chaque année depuis 1901, la liste des potentiels lauréats est aussi longue qu’incertaine mais les académiciens devraient éviter des choix disputés, pour faire oublier les déboires passés.

Ils pourraient sacrer la Polonaise Olga Tokarczuk, le Kényan Ngugi Wa Thiong’o, l’Albanais Ismaïl Kadaré, l’Américaine Joyce Carol Oates ou le Japonais Haruki Murakami, selon les critiques interrogés par l’AFP. Dernier né des Nobel, le prix d’économie, créé en 1968 pour célébrer les 300 ans de la Banque de Suède, sera décerné le 14 octobre. Parmi les potentiels lauréats, Micael Dahlén, professeur d’économie interrogé par l’AFP, avance un trio de femmes: les Américaines Anne Krueger pour ses recherches sur le commerce international, et Carmen Reinhart, qui travaille sur les dettes publiques et la croissance, ainsi que la Française Esther Duflo, spécialisée dans l’économie du développement. Accompagné d’une médaille à l’effigie d’Alfred Nobel, chaque prix est doté de 9 millions de couronnes (830.000 euros), que se partagent les candidats s’ils sont plusieurs.

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