© Reuters/Charles Platiau

La fortune de DSK lui permettra-t-elle de se tirer d’affaire ?

Dominique Strauss-Khan, le directeur du FMI, risque aujourd’hui 74 ans de prison pour sept chefs d’accusation dont agression sexuelle et tentative de viol. Son impressionnante caution d’un million de dollars a été refusée par le juge. Il reste donc en prison jusqu’à nouvel ordre. Mais même si cette fois ça n’a pas marché, DSK risque bien d’encore se servir de sa fortune (et de celle de sa femme) pour tenter de s’en tirer. Etat des lieux de la fortune dont il dispose.

Le directeur général du Fonds monétaire international est exempté du paiement de l’impôt sur le revenu, comme la plupart des salariés des organisations internationales. Dans un communiqué daté du 2 novembre 2007, le FMI détaillait : « Cher Monsieur Strauss-Kahn, votre salaire [à] s’élèvera à 420 930 dollars par an. »Sa rémunération est indexée sur le coût de la vie locale et agrémentée d’une enveloppe annuelle discrétionnaire de 75 350 dollars, destinée « à [lui] permettre, dans l’intérêt du Fonds, de maintenir un train de vie approprié à [sa] fonction et à la représentation du FMI ».

De plus, les frais professionnels du directeur et de son épouse, à Washington ou lors de leurs voyages, sont remboursés par le FMI sur présentation de justificatifs. Ces avantages rivalisent avec ceux du président des Etats-Unis, rémunéré 400 000 dollars par an et doté d’une allocation annuelle, non imposable, de 100 000 dollars. Mais alors que les Obama sont nourris et logés à la Maison-Blanche, les Strauss-Kahn ne sont pas hébergés par le FMI. Anne Sinclair a donc acquis, pour 4 millions de dollars, une demeure située dans le quartier de Georgetown, à Washington. L’endroit offre 380 mètres carrés de surface habitable (cinq chambres, six salles de bains…), une piscine et un vaste jardin.

Un couple plein d’adresses

Dans la capitale française, les Strauss-Kahn disposent de deux logements : un vaste appartement place des Vosges et un autre dans le XVIe arrondissement. Le couple a eu un coup de coeur dès que l’agent immobilier a poussé la porte cochère qui masque à la vue des passants un jardin à la française tiré au cordeau. Au premier étage, les 240 mètres carrés se répartissent harmonieusement, faisant la part belle au salon. D’immenses fenêtres (la pièce principale a plus de 4 mètres sous plafond) éclairent un parquet Versailles. L’appartement compte aussi trois chambres, dont deux à l’entresol. La transaction se conclut à plus de 4 millions d’euros, frais d’agence compris. Une somme réglée comptant par les Strauss-Kahn. Ce qui signifie qu’ils n’ont pas eu recours à un emprunt bancaire.

Dans les années 1980, Micheline, la mère de la journaliste, fille d’un marchand d’art réputé, habite au premier étage d’un immeuble construit deux décennies plus tôt, et situé le long d’une avenue huppée. Le 23 avril 1990, Anne Sinclair achète l’appartement du quatrième et dernier étage à une femme de 70 ans, traductrice de profession et héritière du président d’honneur des avions Marcel Dassault.

Cet impressionnant penthouse compte six pièces, dont trois chambres, ainsi que des boudoirs et une « roberie ». Outre l’immense balcon qui permet d’en faire le tour, son atout majeur est l’accès, par un escalier privé, à une terrasse aménagée sur le toit, avec vue imprenable sur le bois. Montant de la transaction : 17 millions de francs (2,59 millions d’euros), réglés comptant. Selon un proche des Strauss-Kahn, l’argent de cet achat provient de la fortune de Micheline, désireuse que sa fille demeure près d’elle.
Après la mort de sa mère, en juillet 2006, Anne Sinclair cherche un nouvel appartement. Et finit par repérer celui de la place des Vosges… Pour en financer l’achat, elle vend le logement qu’occupait sa mère dans le XVIe, dont elle est l’unique héritière. Depuis, son penthouse personnel du XVIe arrondissement aurait été mis en vente. Aux dernières nouvelles, il n’aurait pas encore trouvé acquéreur.

Un riad à Marrakech

DSK et Anne Sinclair ont acheté ce petit palais du XIXe siècle en octobre 2000 pour un peu moins de 500 000 euros. Avant d’y entreprendre d’importants travaux. Anne Sinclair précise régulièrement qu’elle a acheté ce petit bijou grâce aux indemnités de départ que TF1 lui a versées. Dans un ouvrage paru en 2006 (1), Dominique Strauss-Kahn fournissait une autre explication : « Anne possédait une maison à Valbonne, dans le Midi. […] Elle l’a revendue pour acheter, il y a cinq ans, un riad au coeur de Marrakech. Tout était à refaire. Il n’y avait ni eau ni électricité. Aujourd’hui, c’est parfait. Marrakech, c’est ma base arrière. »
Combien vaut une telle propriété aujourd’hui ? « Tout dépend des travaux de rénovation effectués, indique un agent immobilier français installé dans la ville ocre. Quoi qu’il en soit, une demeure de cette dimension, dans la médina, est extrêmement difficile à trouver aujourd’hui. Même à rénover entièrement, ce genre de bien ne se négocie pas à moins de 3 millions d’euros. » Les travaux d’embellissement ont d’autant plus dopé la valeur de ce petit palais qu’ils ont été effectués dans les règles de l’art.

L’art d’un grand-père

Anne Sinclair est la petite-fille de Paul Rosenberg (1881-1959), l’un des plus grands marchands d’art du xxe siècle, de la trempe des Durand-Ruel, Vollard et Kahnweiler. Si elle n’a jamais caché cette filiation, elle a toujours cultivé la discrétion. Mais la collection de son grand-père continue de susciter la curiosité.

Depuis le décès de sa mère, Micheline (fille de Paul), Anne Sinclair est devenue l’héritière directe de cette fabuleuse aventure. Elle n’est toutefois pas la seule, car Micheline avait un frère, Alexandre, qui a repris le flambeau de la galerie new-yorkaise à la disparition de Paul, perpétuant le nom jusqu’à sa propre mort, en 1987. La collection, si elle existe encore, doit donc se partager entre la France et les Etats-Unis, mais certains tableaux peuvent aussi se trouver ailleurs, en Suisse ou en Russie par exemple. Car, à la suite des spoliations nazies, de nombreuses pièces se sont volatilisées.

Ces dernières années, quelques-unes ont pu être restituées à la famille, grâce à l’action des héritiers de Paul, Micheline, sa fille, et Elaine, sa belle-fille, veuve d’Alexandre. Aucun de ces tableaux n’est toutefois resté dans le giron familial, car ils ont été rapidement remis sur le marché. Et, chaque fois, ce fut le jackpot. Les Nymphéas de Monet auraient été vendus, en transaction privée, il y a une dizaine d’années, pour une vingtaine de millions de dollars. Le tableau de Fernand Léger a été adjugé à New York, en novembre 2003, par Christie’s, pour 22,4 millions de dollars, afin sans doute de permettre un règlement de succession entre la France et les Etats-Unis. En novembre 2007, un peu plus d’un an après le décès de Micheline, L’Odalisque, harmonie bleue, de Matisse, s’envolait, toujours à New York et sous ce même marteau, pour 33,6 millions de dollars. Le jour de la vente, Anne Sinclair se trouvait aux premières loges.

Le Vif.be, avec Philippe Coste, Éric Pelletier, Jean-Marie Pontaut, Boris Thiolay et Annick Colonna-Césari

(1) Majesté, je dois beaucoup à votre père, par Jean-Pierre Tuquoi. Albin Michel, 2006.

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