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La flambée de violence en Centrafrique vient d' »erreurs de la communauté internationale »

Le Vif

La nouvelle flambée de violences à Bangui est le « résultat d’une accumulation d’erreurs de la communauté internationale » dans la gestion de la crise centrafricaine depuis 2013 nous dit l’analyste Thierry Vircoulon du centre de réflexion International Crisis Group (ICG).

Quelles sont les causes profondes de cette nouvelle flambée de violences, dont l’apparent détonateur est le meurtre d’un conducteur musulman de moto-taxi, dans une ville où la criminalité violente est pourtant relativement commune du fait, entre autres, de la profusion d’armes en circulation dans la ville?

La flambée de violence actuelle est le résultat de l’accumulation des erreurs de la communauté internationale qui veut organiser des élections dans un vide sécuritaire et institutionnel à peu près complet et qui privilégie sa stratégie de sortie de la crise sur une stratégie de résolution de la crise.

Les failles de la feuille de route de sortie de crise sont l’absence de désarmement des miliciens et l’insécurité structurelle qui en découle, des relations intercommunautaires souvent hostiles et au mieux méfiantes, la reconstitution d’une administration locale encore très embryonnaire, ineffective et qui n’inspire pas confiance aux communautés musulmanes, ainsi qu’un calendrier de désengagement des forces françaises en contradiction avec le calendrier politique de la transition

Les autorités de transition, dont la présidente Catherine Samba Panza, ont une nouvelle fois mis en cause ceux qui selon elles « tirent un profit » du chaos dans laquelle la Centrafrique est plongée, et ne veulent pas d’une normalisation. Cette analyse vous paraît-elle pertinente?

L’approche actuelle du désarmement des groupes armés, formalisée par l’accord signé lors du forum de Bangui en mai dernier, sous-estime la dimension communautaire de la violence ainsi que la criminalisation et la fragmentation des groupes armés. A l’ouest du pays, faute d’ennemis après la fuite des combattants de l’ex-Seleka et des musulmans, la nébuleuse de groupes armés locaux communément dénommée anti-balaka n’est parvenue à se structurer ni militairement, ni politiquement: elle constitue maintenant une menace criminelle qui pèse sur les populations locales. L’ex-coalition de la Seleka a implosé en plusieurs mouvements dont les affrontements sont motivés par des rivalités de direction, des querelles financières et des désaccords sur la stratégie à adopter vis-à-vis du gouvernement de transition et des forces internationales. La dynamique de criminalisation et de déstructuration des groupes armés est un obstacle à toute négociation avec eux.

Dans ce contexte, est-il envisageable d’organiser à brève échéance, d’ici la fin 2015, des élections présidentielle et législative, comme s’y engage Mme Samba Panza?

Dans la mesure où les forces internationales ne sont pas capables de reprendre le contrôle de la capitale, on imagine difficilement comment on pourrait organiser des élections d’ici la fin 2015. Le processus électoral et les conditions des scrutins sont très problématiques. Une des séquences essentielles de la feuille de route de sortie de la transition, le DDR (Démobilisation, Désarmement, Réinsertion des combattants) n’a pas pu être mise en oeuvre et cela va bloquer les élections.

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