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La dure vie quotidienne des habitants de Ouagadougou

Le Vif

Banques, stations-essence et magasins fermés, grève, chômage forcé, manque d’argent… la crise politique au Burkina Faso pèse sur la vie quotidienne des habitants de Ouagadougou qui doivent se débrouiller.

Pour s’opposer au coup d’Etat perpétré le 17 septembre par des militaires du Régiment de sécurité présidentielle, les syndicats et la société civile ont appelé à la grève et la capitale burkinabè est paralysée depuis une semaine. « C’est un mal nécessaire », constate, philosophe, Alpha Sidi, un jeune technicien qui soutient le mouvement. « On fait appel à la solidarité africaine ! On fait crédit chez le boutiquier pour des petits sacs de riz. » En ville, seul le commerce informel marche mais il fonctionne au ralenti. Kontogomda Kady vend des fruits de karité près de l’aéroport. D’habitude les clients s’arrêtent en moto ou en voiture. « Depuis ce matin, je n’ai pas fait 1500 francs CFA (2,30 euros). D’habitude c’est 20 ou 25.000 (30 -40 euros). Avec la crise, on ne gagne plus rien. », explique-t-elle. Mère de quatre enfants, elle souligne que son mari est cultivateur de mil et de maïs et que c’est elle qui normalement « gagne l’argent pour l’école des quatre enfants, pour les ordonnances (médicales) et le reste ».

‘On mange notre épargne’

Quelques mètres plus loin, Amadou Sawaro expose à bout de bras des pièces de boeuf qui seront bientôt faisandées avec la chaleur. Il se désespère: « Je n’ai rien vendu ! ». Son collègue marchand de pommes de terre se morfond également: « C’est dur, trop dur même! Les gens sont restés chez eux. Ils ont peur de sortir avec la situation. Je n’ai pas gagné un franc depuis le matin. Comment je ramène à manger à la maison? », s’interroge André Taspoba en écoutant la radio.

« Ils se foutent de nous » crie-t-il en écoutant une interview du chef des putschistes, le général Gilbert Diendéré.

Les clients eux aussi se plaignent

« Les prix ont augmenté, les denrées sont rares. Certains en profitent », croit savoir Abdelkrim Sanon, consultant. « Les gens ne peuvent s’approvisionner financièrement ». En ville, la plupart des distributeurs sont vides et quand un guichet automatique fonctionne, il est pris d’assaut. « Cette queue ce sont les gens qui ont la chance d’avoir de l’argent sur le compte. Mais pensez à tous ceux qui n’ont pas été payés ou n’ont pas d’argent », expliqué André, délégué médical au centre-ville. « On mange notre épargne ». Les « chercheurs » (ceux qui louent leur force de travail à la journée), les ouvriers, et toutes les personnes payées de la main à la main sont au chômage forcé. « Je suis un vagabond », plaisante avec autodérision Antoine, qui vend de l’essence dans des bouteilles et des bidons sur le bord de la route. « Normalement, je fais de la mécanique moto, mais il n’y a plus de travail ». Se déplacer est devenu un problème, les stations service étant fermées, le gasoil est presque introuvable et l’essence est devenue chère. Le litre de carburant atteint 1500 francs CFA, et risque de monter encore. Natacha Da, stagiaire de banque, remplit son réservoir moto. « Globalement on dépense plus. Les condiments ont augmenté, d’autres produits aussi. Parfois on fait une bonne affaire. Comme ils vendent moins, certains produits sont trop murs. Hier, j’ai pu acheter 10 bananes pour 100 au lieu de 500 », raconte-t-elle. Mais elle s’inquiète : le « maquis » (petit restaurant) de sa mère avec qui elle vit est « fermé en raison de la situation ». « On espère que la crise va s’arrêter. On a peur. On tient encore mais c’est dur. »

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