Recep Tayyip Erdogan © Reuters

La défaite à Istanbul risque de coûter cher à Erdogan

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

Dimanche, les Stambouliotes sont retournés aux urnes pour élire leur maire, le premier scrutin remporté par le candidat de l’opposition ayant été annulé sous la pression de l’AKP du président Recep Tayyip Erdogan.

Fin mars, le candidat de l’opposition Ekrem Imamoglu avait déjà remporté le scrutin à Istanbul. Membre du parti républicain du peuple (CHP), il avait battu Binali Yilderim, le candidat du président Erdogan, mais la différence s’élevait à 0,2% à peine. Erdogan s’est saisi de l’occasion pour tenter la reconquête de la capitale, une manoeuvre qu’il avait déjà exécutée, et réussi, en 2015.

Cependant, comme l’écrit le quotidien De Standaard, aujourd’hui cette stratégie lui revient en pleine figure tel un boomerang, car Imamoglu a obtenu 53,86% des voix contre 45,23% pour Yildirim. Aussi l’AKP n’a-t-il eu d’autre choix que de concéder sa défaite. « Je félicite Ekrem Imamoglu qui a remporté l’élection selon les résultats non officiels », a tweeté Erdogan.

À en croire De Standaard, les accusations de « fraude » de l’AKP contre le CHP sont considérées comme peu crédibles et injustes, y compris par une partie de la base de l’AKP. De plus, le nouveau scrutin a attiré l’attention sur Imamoglu, inconnu il y a encore quelques mois.

Interrogé par De Standaard, Nezi Onur Kuru, politologue à l’Université d’Istanbul, invoque plusieurs motifs à la défaite d’Erdogan. « C’était une campagne maladroite pleine de contradictions. L’AKP a d’abord tenté de séduire les Kurdes en laissant le dirigeant kurde PKK les défendre, ce qui lui a valu des critiques. Ensuite, ils ont attaqué l’Université d’Istanbul parce qu’elle était soutenue par le parti pro-kurde HDP, soi-disant également une bande de terroristes. »

Béni-oui-oui

D’après le politologue, le choix des citadins est davantage guidé par une économie déplorable que par la propagande liée aux « ennemis internes et externes ». Et l’AKP n’a pas de solution pour redresser l’économie. Il pointe également un problème de personnel. Selon lui, tous ceux qui désapprouvent Erdogan sont remplacés par des profils moins intellectuels ou des béni-oui-oui.

La rumeur veut que certains partisans d’Erdogan tombés en disgrâce ambitionnent de former un nouveau parti islamiste de droite qui oeuvrerait, tout comme les partis progressistes, à un état de droite fiable. Cependant, Erdogan ne semble pas prêt à abandonner le pouvoir. « Il a commis tant d’abus de pouvoir qu’il faut qu’il soit fort pour ne pas être poursuivi », estime Ayse Berktay, membre de l’opposition HDP.

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