Légende : "Self as young swimmer", 2016. Courtesy of the Artis and Almoine Rech Gallery. Photo Sven Laurent- Let me shoot for you. © Photo Sven Laurent- Let me shoot for you.

L’oeuvre de la semaine : Le peintre

Guy Gilsoul Journaliste

A première vue, voilà un enfant, debout devant un espace noir. Vêtu du seul maillot, on le dirait baigneur s’il ne portait entre ses bras l’image d’un visage peint à la manière hardie des peintres baroques.

A première vue, voilà un enfant, debout devant un espace noir. Vêtu du seul maillot, on le dirait baigneur s’il ne portait entre ses bras l’image d’un visage peint à la manière hardie des peintres baroques. La position de ses pieds indique un malaise. Ils ne peuvent supporter le corps. Mais d’abord, reposent-ils sur un sol ferme ? On songerait plutôt à du sable et dès lors à une scène des bords de mer. En réalité mêle le souvenir d’un épisode ancien et la situation actuelle du peintre. Elle associe aussi une forme de réalisme apparent et un savant recours à l’histoire de l’art à la fois dans une perspective plastique et anecdotique. Explication. La figuration du personnage relève d’un autoportrait décalé. Le peintre se revoit enfant. C’est de lui qu’il va nous parler et d’un évènement qu’il portera aussitôt comme une allégorie de sa situation d’artiste. La composition s’inspire du souvenir d’un jour inconfortable où Ronsse entra pour la première fois dans la mer en perdant soudain équilibre et certitude. Un de ces jours où comme le dit l’expression, on « perd pied ». Or, cette perte d’assurance est celle si souvent vécue par le peintre face à son marchand. L’image tenue entre les bras précise l’allusion. En fait, il s’agit d’un surpeint qui dissimule la véritable image tout comme, en art, l’essentiel est souvent ce que l’artiste ne montre pas. Mais en même temps, cette figure debout n’est pas sans évoquer, de par l’absence de fond comme de sol ainsi que par la pose elle-même, le tableau fondateur de la peinture moderne, « Le fifre » de Manet. Elle renvoie aussi à une oeuvre de la période rose de Picasso, celui-là même qui dans les esquisses préparatoires des « Demoiselles d’Avignon », avait inscrit la silhouette d’un peintre, la farde de dessins sous le bras, aux côtés des prostituées établissant ainsi le lien entre les deux métiers dans leurs rapports avec « le client ». Le tableau de Matthieu Ronsse accumule les portes d’entrées. A chacun de choisir la sienne.

Bruxelles, Galerie Almine Rech. Rue de l’Abbaye, 20. Jusqu’au 30 juillet. Du mardi au samedi de 11 à 19h.

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