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L’illisible politique étrangère de Donald Trump

Face au tintamarre anti-Trump qui sévit tant aux Etats-Unis où j’ai passé trois semaines récemment (CNN consacre près de la moitié de son antenne à traquer les déboires du président des Etats-Unis – ce qui nous rappelle Bill Clinton en pleine affaire Monica Lewinski) qu’en Europe (où la quasi-totalité des médias livrent au milliardaire une guerre sans merci), on est un peu peiné d’en rajouter. Mais la politique étrangère de l’actuel président semble à la recherche d’une certaine cohérence et c’est un euphémisme.

Face au tintamarre anti-Trump qui sévit tant aux Etats-Unis où j’ai passé trois semaines récemment (CNN consacre près de la moitié de son antenne à traquer les déboires du président des Etats-Unis – ce qui nous rappelle Bill Clinton en pleine affaire Monica Lewinski) qu’en Europe (où la quasi-totalité des médias livrent au milliardaire une guerre sans merci), on est un peu peiné d’en rajouter. Mais la politique étrangère de l’actuel président semble à la recherche d’une certaine cohérence et c’est un euphémisme.

Face à « l’ennemi héréditaire » tant d’Israël (depuis l’empereur Xerxes Ier qui approuva un décret d’extermination de tous les Juifs vivant dans les 127 provinces de l’empire achéménide, les Perses sont un peu les Huns du Moyen-Orient) que de l’Arabie saoudite, à savoir l’Iran, Donald Trump est entre deux rives. Alors qu’il a choisi d’appuyer sans sourciller l’Arabie saoudite dans la logique de plusieurs de ses prédécesseurs (notamment les Bush) pour assurer les Etats-Unis en hydrocarbures, il a souligné que l’accord nucléaire signé entre l’Iran et Obama tenait ses promesses et qu’il n’avait aucune raison de le dénoncer. Mais une série de sanctions vont frapper à nouveau l’ancienne Perse. Au niveau de la perception, l’Amérique donne l’impression de choisir les sunnites contre les chiites.

Conspuant l’inutilité de l’Union européenne que l’un de ses conseillers a appelé « l’UERSS », mettant en doute la pertinence de l’OTAN maintenu en vie par le baxter étasunien et poursuivi par des accusations de collusion avec Vladimir Poutine (non démontrées à ce jour il faut le souligner), Donald Trump a dû récemment contre son gré accepter le volet de sanctions contre la Russie votées par le Congrès dans la droite ligne de la politique d’Obama (dit-on à Moscou pour obliger l’Europe à acheter le gaz de schiste américain plus coûteux que le gaz russe). Résultat : le retour d’une drôle de guerre (froide) avec l’expulsion de plus de 500 « espions » américains et des manoeuvres militaires sans précédent de l’ex-Armée rouge.

Après le bombardement de la base aérienne d’Al-Shayra en Syrie suite à l’utilisation supposée de gaz de combat par Bachar el Assad sur les populations civiles, le président des Etats-Unis souligne que Assad n’est pas légitime à rester au pouvoir lorsque la paix sera revenue et l’Etat islamique éradiqué mais coupe subitement les vivres de plusieurs factions démocratiques d’opposition au dictateur syrien.

En Asie, il est vite revenu de ses déclarations selon lesquelles la Chine « n’avait qu’à s’occuper de la Corée du Nord » et semble prendre toute la mesure du danger que constitue notamment pour son allié japonais le psychopathe Kim-Yong-Un qui dirige la dernière véritable dictature stalinienne du monde. Le dernier tir de missile commandité par le digne successeur de Kim-Yong-Il est à cet égard un avertissement direct à Donald Trump. En réponse à cette véritable provocation atomique, les USA ont déployé deux bombardiers B1 dans la zone et lancé un missile intercontinental non armé.

Rares sont les thuriféraires de Trump, tel Guy Millière, spécialiste des Etats-Unis qui écrit régulièrement sur le site pro-Trump Dreuz info, qui louent la sagacité de Donald Trump.  » Une recomposition révolutionnaire du Proche-Orient prend forme grâce à Donald Trump », écrit-il. « Cette recomposition sera, si elle aboutit, l’un des changements géopolitiques les plus importants de ce début de vingt-et-unième siècle. » Pour Millière, l’alliance sunnite de Trump doit servir de tremplin à une pacification du Moyen-Orient. La nouvelle main tendue de l’Arabie saoudite envers Israël en est-elle le prélude ? Il faut avouer que si Trump parvenait à une paix entre Israéliens et Palestiniens, ce serait un fameux pied de nez pour ce président qualifié d’inepte et d’inapte.

Avec cette sorte de candeur qui le caractérise, Trump avait confié à son gendre, Jared Kushner, juif observant promu conseiller spécial : si toi tu ne fais pas la paix au Proche-Orient, qui le fera ? Mais sa tonitruante promesse de campagne de déplacer l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem est restée lettre morte. Pour le meilleur sans doute car on imagine qu’elle aurait pu à elle-seule relancer une troisième Intifada. Quant à la décision du premier ministre israélien de renoncer aux portiques de sécurité autour de l’Esplanade des Mosquées/Mont du Temple, a-t-elle été soufflée par l’administration américaine ? Une modération qui cadre peu avec Donald Trump.

Moralité : à quelques exceptions près, les experts ont le plus grand mal à lire la politique étrangère de Donald Trump qui semble improviser au coup par coup. Ceci cacherait-il une tactique ? Dans The Art Of The Deal (l’Art de la négociation, essai de Donald Trump), le président des USA expliquait qu’être sous-estimé par ses adversaires vous donne un avantage stratégique.

En chute dans les sondages (56% des Américains sondés ne lui apportent plus leur soutien), Donald Trump peut en tout cas se réjouir que les Démocrates ne font guère mieux et ont perdu quasi toutes les élections intermédiaires. La presse libérale elle-même a perdu beaucoup de crédibilité comme CNN qui a dû se défaire de trois journalistes réputés, dont un Prix Pulitzer, pour délit de fake news dans le dossier russe en juin dernier. Mais Fox News, soutien principal de Trump, n’est pas en reste, accusée d’avoir publiée de fausses infos à la demande de Trump, ce que la chaîne nie.

Derrière le brouhaha qui entoure l’actuelle présidence des Etats-Unis, on doit donc continuer à donner à Trump le bénéfice du doute. Un cabinet stable pourrait être la clé d’une approche internationale plus cohérente. Mais on en est encore loin actuellement lorsqu’on voit les démissions et évictions en chaîne ces dernières semaines dont celle de « Scaramouche » (Anthony Scaramucci), l’éphémère directeur de la communication de Trump…

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