Paul Manafort © Reuters

L’ex-chef de campagne de Trump, Paul Manafort, restera en détention jusqu’à son procès

Le Vif

Une juge fédérale à Washington a révoqué vendredi la liberté conditionnelle de l’ex-chef de campagne de Donald Trump, Paul Manafort, accusé de tentative de subornation de témoin dans l’enquête russe, que le président a jugée ce même jour « totalement discréditée ».

Le lobbyiste a été placé en détention à l’issue d’une audience au cours de laquelle son avocat a demandé en vain un contrôle judiciaire plus strict qui lui aurait permis d’éviter la prison.

M. Manafort est le premier membre de l’équipe de campagne du milliardaire à être écroué. Jusqu’à ce vendredi, il était assigné à résidence, dans l’Etat de Virginie voisin de la capitale, et forcé de porter un bracelet électronique.

« Wow, quelle peine sévère pour Paul Manafort, qui a représenté Ronald Reagan, Bob Dole, et beaucoup d’autres hauts responsables politiques et campagnes. Je ne savais pas que Manafort était à la tête de la Mafia », a réagi le président par tweet, alors que M. Manafort n’a pas été condamné.

Cette décision de la juge fédérale représente une victoire pour le procureur spécial Robert Mueller, qui soutenait que l’incarcération de M. Manafort était nécessaire afin qu’il n’influence pas des témoins à son procès à venir.

Elle intervient quelques heures après que M. Trump a estimé que la crédibilité de l’enquête sur l’ingérence russe dans la présidentielle de 2016 était largement sapée par un rapport officiel rendu public jeudi.

Ce rapport critique « l’insubordination » en 2016 de James Comey, l’ancien chef du FBI limogé plus tard par M. Trump, et indique que certains agents fédéraux ont laissé paraître leur hostilité envers le magnat de l’immobilier.

Il valide en revanche la décision de M. Comey de ne pas poursuivre la candidate démocrate Hillary Clinton, rivale de M. Trump, pour ses emails envoyés d’un serveur privé.

« Fier service »

Exigeant ardemment que M. Mueller clôture son enquête qui empoisonne sa présidence, Donald Trump a exploité vendredi les révélations concernant M. Comey et le FBI, révélant selon lui un « film d’horreur ».

Le rapport « est un désastre total pour Comey, ses sbires et, tristement, le FBI. On se souviendra officiellement de Comey comme du pire chef, de loin, de l’histoire du FBI. J’ai rendu un fier service à la population en le virant », a-t-il tweeté.

Dans un autre tweet début juin, le président avait minimisé le rôle joué auprès de lui par M. Manafort qui, il est vrai, est inculpé pour des faits anciens et apparemment distincts de la campagne électorale de 2016.

Le lobbyiste de 69 ans doit comparaître cet été devant la justice pour blanchiment, fraude fiscale et bancaire et lobbying illégal. Il dément toutes les charges qui le visent.

M. Manafort cultive des liens anciens avec un parti politique pro-Russe en Ukraine et un oligarque proche du Kremlin. Moscou nie s’être immiscé dans la présidentielle américaine de 2016.

« Pas au collège »

Selon M. Mueller, Paul Manafort a ces derniers mois essayé de façon répétée de téléphoner ou d’envoyer des SMS à deux de ses anciens associés, dans l’objectif d’obtenir grâce à eux un tournant favorable de l’enquête en cours.

« Je ne peux pas faire la sourde oreille face à ces accusations », a justifié à l’audience la magistrate Amy Berman Jackson.

« Vous avez trahi la confiance placée en vous il y a six mois », a ajouté la juge fédérale, citée par BuzzFeed.

Mme Jackson a rejeté une requête de l’avocat de M. Manafort, qui suggérait qu’elle restreigne les contacts possibles de son client. « On n’est pas au collège. Je ne peux pas confisquer son portable », a rétorqué la magistrate.

L’enquête russe est entrée dans sa deuxième année, sans apporter pour l’instant une preuve écrasante d’une collusion entre Moscou et l’équipe de campagne de Trump.

Le tournant pourrait être l’éventuelle audition de M. Trump, dont les conditions sont âprement négociées par la Maison Blanche.

Trois sociétés et une vingtaine de personnes –dont 13 Russes accusés de manoeuvres visant à altérer l’élection et quatre collaborateurs de Donald Trump– ont été inculpées dans le dossier.

Les investigations tentaculaires dépassent les frontières des Etats-Unis et portent sur des faits étalés sur plusieurs années.

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