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L’attaque au couteau à Paris revendiquée par l’EI, l’assaillant était fiché « S »

Le Vif

L’auteur de l’attaque au couteau samedi soir à Paris revendiquée par le groupe Etat islamique, dans laquelle un passant a été tué, est un Français de 20 ans né en Tchétchénie fiché pour radicalisation islamiste et dont un ami a été interpellé dimanche dans l’est de la France.

L’assaillant est né en novembre 1997 en Tchétchénie. Cette république musulmane russe du Caucase a été le théâtre de deux guerres dévastatrices qui ont donné naissance à une rébellion islamiste, source importante de combattants dans les rangs des groupes jihadistes en Syrie et en Irak.

« Son père et sa mère ont été placés en garde à vue dimanche matin », a déclaré une source judiciaire. Le domicile familial, dans la capitale française, a été perquisitionné, sans qu' »aucun élément incriminant » n’ait été trouvé, a expliqué une source proche du dossier.

Le jeune homme, Khamzat A., selon les autorités françaises, a grandi dans une famille de réfugiés à Strasbourg (est), dans le quartier populaire d’Elsau où vit une importante communauté tchétchène, a souligné une source proche du dossier.

C’est dans cette même ville qu’un de ses amis, également né en 1997, a été interpellé et placé en garde à vue dimanche, d’après une source judiciaire.

L’agresseur « n’avait pas d’antécédent judiciaire » mais figurait en revanche depuis 2016 sur le fichier « S » des services de renseignement français, ont révélé des sources proches de l’enquête. Le fichier « S » (risque d’atteinte à la « Sûreté de l’Etat ») regroupe plus de 10.000 personnes dont pour moitié environ des islamistes radicaux ou des individus pouvant avoir un lien avec la mouvance terroriste.

Il est devenu Français « en 2010 suite à la naturalisation de sa mère », a déclaré Benjamin Griveaux, le porte-parole du gouvernement. Il avait également été inscrit au fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation islamiste, mais « plutôt » en raison de « ses relations » que de « son propre comportement, ses agissements et prises de position », a assuré une source proche du dossier.

L’auteur de l’attaque avait été « entendu il y a un an par la section antiterroriste de la brigade criminelle car il connaissait un homme lui-même en lien avec quelqu’un parti en Syrie », a noté une source proche de l’enquête.

« Le prix du sang »

Un passant français, âgé de 29 ans, a été tué et quatre personnes blessées, dont un Luxembourgeois, par cet homme qui a crié « Allah Akbar ! », ont raconté des témoins. Les blessés sont hors de danger.

Le groupe jihadiste Etat islamique (EI), qui a frappé plusieurs fois en France depuis 2015, a rapidement revendiqué l’attaque.

« La France paye une nouvelle fois le prix du sang mais ne cède pas un pouce aux ennemis de la liberté », a réagi le président Emmanuel Macron sur Twitter.

Le Premier ministre Edouard Philippe a salué « l’exceptionnelle réactivité des forces de police », dont l’intervention en quelques minutes a permis d’éviter « un bilan plus lourd ».

L’agression a eu lieu peu avant 21H00 (19h00 GMT) en plein coeur de Paris, dans le quartier de l’Opéra Garnier, un lieu touristique fait de bars, restaurants et théâtres très fréquenté le samedi soir.

« A ce stade et sur la foi d’une part de témoignages faisant état du fait que l’agresseur a crié +Allah Akbar !+ en attaquant les passants au couteau » et « compte tenu du mode opératoire, nous avons saisi la section antiterroriste du parquet de Paris », a déclaré le procureur de la République François Molins, deux ans et demi après les attentats sanglants du 13 novembre 2015 qui avaient fait 130 morts dans la capitale française.

L’agresseur « s’est approché calmement, ça contrastait avec la panique qu’il y avait autour de lui, les gens qui criaient et couraient. Il a dit +Allah Akbar !+, deux fois, tout doucement, c’était glaçant », a confié à l’AFP Romain, 34 ans, qui était sur les lieux du drame avec sa femme et son fils de six ans.

« Il faut des actes »

La grande mosquée de Paris a déploré « une attaque lâche et barbare qui ne peut se réclamer d’aucune religion et que nous condamnons fermement ».

A droite et à l’extrême droite, on appelait l’exécutif à la fermeté dans l’action contre le jihadisme.

« Dans la guerre contre le terrorisme, les mots ne suffisent pas, il faut des actes », a écrit sur Twitter le président des Républicains (droite), Laurent Wauquiez.

« Maintenant, nous attendons une information essentielle », a asséné sur le même réseau Marine Le Pen, la présidente du parti d’extrême droite Front national : « Par quelle filière ce terroriste islamiste et sa famille sont-ils présents sur notre territoire ? »

Cette attaque porte à 246 le nombre des décès dus à des attentats sur le sol français depuis 2015. La France fait partie de la coalition militaire internationale intervenant en Syrie et Irak contre l’EI. Dans sa revendication, l’EI affirme que l’assaillant de Paris a agi « en représailles envers les Etats de la coalition ».

Les attentats jihadistes en France depuis janvier 2015

Rappel des attentats meurtriers commis depuis 2015 en France, attribués ou revendiqués par la mouvance jihadiste, après qu’un homme a tué samedi soir à Paris un passant et blessé quatre autres personnes avant d’être abattu par la police.

Selon le procureur de la République François Molins, qui a saisi la section antiterroriste du parquet de Paris, l’assaillant armé d’un couteau avait crié « Allah Akbar ».

– 2018 –

– 23 mars: un Français d’origine marocaine de 25 ans, Radouane Lakdim, vole une voiture à Carcassonne (Aude) en tuant le passager et blessant grièvement le conducteur par balles. Il tire peu après sur quatre policiers devant leur caserne de CRS et blesse l’un d’eux. Il pénètre ensuite au supermarché Super U de la ville de Trèbes aux cris de « Allah Akbar », revendique être un « soldat » du groupe Etat islamique (EI) et tue le boucher et un client. Le lieutenant-colonel de gendarmerie Arnaud Beltrame, qui s’est offert comme otage à la place d’une femme, est mortellement blessé à la gorge, peu avant l’assaut. Le jihadiste est alors abattu par le GIGN dont deux membres sont blessés dans l’assaut. L’attaque est aussitôt revendiquée par l’EI.

– 2017 –

– 1er octobre: un Tunisien de 29 ans, Ahmed Hanachi, attaque et tue deux jeunes femmes sur le parvis de la gare Saint-Charles à Marseille en criant « Allah Akbar » avant d’être abattu par des militaires de Sentinelle. L’attentat est revendiqué dans la soirée par l’EI.

– 20 avril: à Paris, un policier, Xavier Jugelé, est tué par balle et deux autres sont blessés sur les Champs-Elysées par un repris de justice français de 39 ans, Karim Cheurfi, qui est aussitôt abattu. L’attentat est revendiqué peu après par l’ EI.

– 2016 –

– 26 juillet: le père Jacques Hamel, prêtre de Saint-Etienne-du-Rouvray (nord-ouest), est égorgé dans son église par deux jihadistes, Abdel Malik Petitjean et Adel Kermiche, qui sont abattus par la police. L’assassinat est revendiqué par l’EI.

– 14 juillet: un Tunisien de 31 ans, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, au volant d’un camion, fonce dans la foule quelques instants après le feu d’artifice du 14-juillet à Nice, tuant 86 personnes et blessant plus de 400 personnes. Il est tué par la police. L’attaque est revendiquée par l’EI.

– 13 juin: un policier de Magnanville (Yvelines), près de Paris, et sa compagne sont assassinés chez eux par un jihadiste de 25 ans. Larossi Abballa, qui avait revendiqué son action sur Twitter et Facebook au nom de l’EI, est tué par le Raid, une unité d’élite de la police.

– 2015 –

– 13 novembre: la France est frappée par les pires attentats de son histoire. Neuf jihadistes font 130 morts et plus de 350 blessés à Paris, dans la salle de concert du Bataclan (90 morts), aux terrasses de plusieurs bars et restaurants (39 morts) et près du Stade de France (un mort). L’EI revendique les attaques.

– 26 juin: Yassin Salhi tue et décapite son patron Hervé Cornara à Chassieu (Rhône) puis, brandissant des drapeaux islamistes, tente de faire exploser l’usine Air Products de Saint-Quentin-Fallavier (Isère), en précipitant son fourgon contre des bouteilles de gaz avant d’être arrêté.

– 19 avril: Sid Ahmed Ghlam, étudiant algérien en informatique, est arrêté à Paris, soupçonné d’avoir tué une femme et préparé un attentat imminent contre une église de Villejuif, dans la banlieue sud de Paris. En possession d’armes de guerre, il était connu des services de renseignement comme islamiste radical. Il admet avoir projeté d’autres actions.

– 7-9 janvier: les frères Chérif et Saïd Kouachi tuent 12 personnes le 7 janvier au siège de l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo à Paris. Après deux jours de cavale, les deux hommes seront abattus par les forces de l’ordre.

Le 8 janvier, Amedy Coulibaly tue une policière à Montrouge, au sud de Paris. Le 9 janvier, il prend en otage les clients et employés du supermarché Hyper Cacher et tue quatre d’entre eux, tous juifs. Il est abattu dans l’assaut donné par la police.

Les frères Kouachi s’étaient réclamés d’Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa), et Amedy Coulibaly de l’EI.

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