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Justin Trudeau ouvre une nouvelle ère pour le Canada

L’écrasante victoire des libéraux aux législatives donne au futur Premier ministre Justin Trudeau la liberté d’instiller un nouveau style de gouvernement avec un retour au multilatéralisme et un élan pour l’environnement, deux points noirs de la diplomatie canadienne depuis dix ans.

Le Canada « est de retour », a lancé mardi Justin Trudeau aux « amis (du Canada) à travers le monde » qui « se sont inquiétés du fait que le Canada avait perdu sa compassion et sa voix constructive dans le monde au cours des dix dernières années ».

Pour M. Trudeau, « les Canadiens ont choisi le vrai changement ». Et il aura vite l’occasion de le mettre en pratique sur la scène internationale en raison à la fois du calendrier (G20, Apec, COP21 à Paris…) et des engagements pris lors de sa campagne.

« Nous allons observer un réengagement auprès des organisations internationales comme les Nations unies, principalement à l’approche de la conférence sur le climat à Paris », estime Lauchlan Munro, chercheur en développement international à l’Université d’Ottawa.

Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a estimé mardi à New York que le prochain gouvernement canadien avait « un rôle particulier à jouer pour donner une impulsion sur les questions de changement climatique », particulièrement à la conférence sur le climat de Paris en décembre (COP21).

Après avoir félicité Justin Trudeau pour sa victoire aux législatives, le président français François Hollande, hôte de la COP21, a indiqué que les deux hommes voulaient que cette conférence soit « une précieuse occasion » d’illustrer la « volonté d’agir ensemble au service de la paix et de l’avenir de la planète ».

Le Canada, sorti par les conservateurs du protocole de Kyoto en 2011, est régulièrement critiqué pour son manque d’engagement dans la lutte contre le réchauffement climatique et l’exploitation pétrolière des sables bitumineux, figurant parmi les formes les plus polluantes d’énergie.

« Le monde attend un changement de ton »

« Il faut faire plus » dans ce domaine, a convenu Justin Trudeau au cours de la campagne mais sans donner réellement les moyens d’y arriver, souligne Jonathan Paquin, professeur de sciences politiques à l’Université Laval à Québec.

« Le monde attend un changement de ton », a déclaré mardi Philippe Couillard, Premier ministre de la province du Québec. Libéral comme M. Trudeau, il a estimé nécessaire de fixer des objectifs de réduction des gaz à effet de serre (GES) plus ambitieux que ceux fixés par le Premier ministre sortant Stephen Harper.

Sur le plan international, l’engagement du Canada dans les frappes contre le groupe Etat islamique en Irak et en Syrie au sein de la coalition internationale emmenée par les Etats-Unis va rattraper M. Trudeau, pour qui « le rôle du Canada doit être de former les forces irakiennes et d’apporter une aide humanitaire ».

Avec sa promesse de retirer les forces canadiennes des frappes aériennes de la coalition, M. Trudeau va être soumis à la pression « des alliés », analyse Lauchlan Munro. « Il sera difficile de résister car quelle sera la réaction des Américains, des Britanniques et des Français si nous nous retirons » de la coalition, s’interroge-t-il.

Dès mardi, la Maison Blanche a d’ailleurs exprimé son « espoir » que le Canada « continue de jouer son rôle » sur le front syro-irakien.

« Si Justin Trudeau est cohérent, il devrait procéder à un retrait graduel des forces armées engagées », estime de son côté Jonathan Paquin.

Tenir la promesse d’accueillir 25.000 réfugiés syriens avancée pendant la campagne « est un casse-tête logistique » s’il faut le faire en trois mois, poursuit ce dernier.

Dans ses relations directes avec les Etats-Unis, écornées par le différend sur la construction de l’oléoduc Keystone XL face aux réserves de l’administration Obama, M. Trudeau devra « faire profil bas », éviter tout débat public et « reprendre les discussions à huis clos avec le gouvernement américain pour trouver une solution », dit encore M. Paquin.

De façon générale, la fin d’une décennie de Stephen Harper est un signe pour la communauté internationale car, selon Roland Paris, spécialiste de politique étrangère à l’Université d’Ottawa, le Canada va « être un acteur plus constructif sur le plan international ».

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