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Jésus, la nouvelle hype et Kanye West, le nouveau messie ?

Muriel Lefevre

Le rappeur Kanye West est de ceux qui réussissent des miracles si on en croit De Morgen. A lui seul, il est parvenu à ressusciter une foi et une spiritualité qui avait quitté beaucoup de stars de ce monde. Mais aussi, par percolation, à la réveiller chez de nombreux jeunes qui arborent aujourd’hui sans vergogne les signes d’une foi qui se veut branchée.

Le cliché a déjà tout d’une icône. On voit le rappeur sur une colline, vêtu d’une tunique pourpre et entourée de chanteurs gospel extatiques avec les bras tournés vers le ciel. Il ne s’agit pourtant pas vraiment stricto sensu d’une messe, mais plutôt du dernier projet musical de monsieur Kim Kardashian. « Sunday Service » est une version gospel de son oeuvre bien qu’il prêche tout de même un peu, en passant.

Jésus, la nouvelle hype et Kanye West, le nouveau messie ?
© Isopix

Que le chanteur se lance dans un tel projet n’a pourtant rien de surprenant puisqu’il se fait régulièrement appeler « Yeezus » et a déjà posé avec une couronne d’épines pour la une d’un magazine. Il ne cache pas non plus qu’il a retrouvé la foi chrétienne et décrit certaines des chansons de son avant-dernier album The Life of Pablo (à partir de 2016) comme  » le nouveau gospel ».

Jésus, la nouvelle hype et Kanye West, le nouveau messie ?
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Messe façon Kanye

Depuis le mois de janvier, Kanye West, organise donc à Los Angeles des « Sunday Service », soit des concerts dominicaux, pensés comme des offices à l’église, où il apparaît tout de blanc vêtu devant des invités triés sur le volet. Si les premières sessions de ces petits rendez-vous hebdomadaires se voulaient familiales, voire très intimes et uniquement partagées sur l’Instagram de Kim Kardashian, elles semblent aujourd’hui plus ouvertes. De quoi entretenir l’image de gourou mystique de Kanye. Sa dernière messe, ou plutôt expérience spirituelle, aura même les honneurs du très couru festival de Coachella en Californie.

Jésus, la nouvelle hype et Kanye West, le nouveau messie ?
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S’il pouvait peut-être inspirer certains, il n’était, en tout cas, pas une parfaite illustration de la charité, vu le prix du ticket.

1.0Kanye West’s Coachella Edition Of « Sunday Service » Draws 50,000 Fans
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Kanye West’s ongoing Sunday Service recently reached an apex this past weekend, when Ye brought the tradition to the Coachella ground
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📸 @real923la .
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On n’oubliera pas de mentionner le marchandising du meilleur goût qui l’accompagnait. L’offre allait de la chaussette avec l’inscription « Jésus marche » (50 dollars) ou en des chandails avec  » Trust God  » (225 dollars).

1.0KSS MERCH
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On pourrait parler de blasphème, mais de toute façon Kanye West n’est pas le seul à sortir du streetwear d’inspiration religieuse. C’est même ultra tendance.

Une mode à connotation christique

Une mode qui plait beaucoup à ceux qui sont dans le vent à défaut d’être au ciel. Et qui pousse à suivre des messes, seuls endroits où ces objets sont vendus. A en croire les flux d’instagrameurs, ce serait même le dernier endroit tendance où l’on s’affiche en chantant et sourire aux lèvres. Pour preuve Carl Lentz et Chad Veach, deux pasteurs à l’air ultra branchés, gagnent chaque semaine en ouailles.

1.0Enjoyed working w/ the good people @suitsupply on this “don’t fit in” idea..thought of you the whole time, dad! @slentz love you! #occupyallstreetscarllentzhttps://www.instagram.com/carllentz24765321912736755342470844_2476532Instagramhttps://www.instagram.comrich658

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Mais les prêtres branchés ne sont pas les seuls à occuper ce créneau. De plus en plus de stars ne cachent plus qu’ils sont croyants. Et puis il y a les influenceurs chrétiens qui montrent aussi une facette différente de leur religion. Par exemple le mannequin bruxellois Timothy de Mudiayi (122 000 adeptes sur Instagram) n’hésite plus à montrer les messes auxquelles il assiste.

1.0|| Sunday Afternoon in Brussels 🔥 ||
#blessedtimonthegramhttps://www.instagram.com/timonthegram10540665102032044466207850159_1054066510Instagramhttps://www.instagram.comrich658

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Les célébrités sont-elles les nouveaux dieux ?

Un rappeur qui prêche cela pourrait déjà être saugrenu, mais qu’en plus cela devienne le dernier endroit branché est d’autant plus surprenant. Cela pourrait bien être le symptôme que, dans notre société occidentale qui se veut de plus en plus athée, les célébrités aient pris la place des dieux, dit encore De Morgen. Patrick Loobuyck (professeure de philosophie à UA/UGent), interviewé dans De Morgen, ne pense pas que malgré des prêtres au sommet de la hype, des Godfluencers et autres Yeezus on va tous se ruer à nouveau vers les églises. « Les églises continuent à se vider à un rythme soutenu et la sécularisation progresse à grand train. En nous détachant des institutions catholiques, cela a permis que l’on puisse aujourd’hui vivre la religion d’une manière très individualisée, voire être le symbole d’un style de vie. (…) On remarque que les jeunes sont de plus en plus ouverts à la mystique et à l’holistique, ce qu’on appelle parfois « l’errance consciente », mais c’est diamétralement opposé à la religion organisée. Ce que l’on constate aujourd’hui c’est que beaucoup de jeunes ont entamé une quête individuelle pour découvrir ce qui peut les faire se sentir mieux. Ils tracent eux-mêmes leur chemin et en déterminent les règles. Ils veulent se sentir connectés à un plus grand tout. »

Un patchwork de différentes choses

Plutôt que de s’en tenir à une religion, on remarque que l’époque se prête plus à un patchwork de différentes choses qui sert de base pour construire une identité philosophique essentiellement séculière. On peut croire à quelque chose sans pour autant se dire religieux par peur de se retrouver coincé dans des doctrines strictes ou des autorités extérieures. On se dit donc plus facilement attiré par le spirituel que par la religion. Des recherches récentes montrent que 65% des jeunes belges se considèrent comme non-croyants. Et selon une enquête de l’institut d’études de marché IPSOS, 69% des Belges sont convaincus que la religion fait plus de mal que de bien.

Dick Houtman, professeur de sociologie de la culture à la KU Leuven souligne, toujours dans De Morgen, qu’en mettant de côté notre bible et l’Ave Maria, nous n’éliminons pas le besoin de sens et de ce qu’il appelle le  » désir religieux « . « Au contraire, je vois que les questions de sens deviennent de plus en plus importantes, précisément parce que les réponses chrétiennes d’antan ont perdu de leur crédibilité. Poser des questions de sens et chercher des réponses est ce qui distingue les gens des animaux : les gens sont des animaux qui vivent dans des histoires, des histoires qui leur expliquent le monde en lui donnant structure et sens. Elles nous disent ce qui est bon et ce qui est mauvais, ce qu’il faut faire et ce qu’il ne faut pas faire. Que vous tiriez ces réponses d’une religion, d’une idéologie politique ou de quoi que ce soit d’autre, les gens ont besoin de telles histoires qui font sens »

Pour certains nous aurions ainsi un peu trop vite écarté le système de valeurs chrétiennes en rejetant tout d’un bloc. « C’est précisément en abandonnant les valeurs chrétiennes et ne leur donnant pas une interprétation moderne que d’autres, plus radicaux, ont pu s’en emparer » selon la chercheuse Zonderop. Pour elle, les jeunes de vingt et trente ans, n’ayant pas souffert de la pilarisation de la société, sont beaucoup plus ouverts à la religion aujourd’hui que leurs parents.

Selon Loobuyck, « la religion fait partie de l’humanité, et il y aura toujours quelque chose qui fera que nous serons attirés par les éléments qui étaient à l’origine incarnés par la foi : s’arrêter un instant, donner un sens à des moments particuliers de la vie, construire une communauté, etc. La question n’est donc pas tant de savoir s’il y a un Dieu, mais de que faire quand on a décidé qu’il n’existait pas. »

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