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Ivan, le « migrant OVNI » a été régularisé

Rosanne Mathot
Rosanne Mathot Journaliste

Happy End, pour Ivan Jankowiec, ce « migrant OVNI argentin », qui se retrouve enfin en situation régulière en France, libre de circuler dans l’UE.

La justice française, souhaitant peut-être éviter que l’affaire ne remonte jusqu’à la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), a en effet basé sa décision sur l’article 8 de la CEDH, protégeant la vie privée et familiale.

Tout est (presque) fini, pour Ivan Jankowiec, ce jeune « migrant argentin sans papiers » qui avait… presque tous ses papiers. Mais pas assez, en tous cas, pour avoir le droit de rentrer chez lui, à Madrid, après avoir assisté, début novembre, en France, à l’enterrement de son beau-frère, le franco-argentin Joaquim, assassiné en pleine rue, à Montpellier. « Toute cette histoire m’a énormément coûté », commente Ivan Jankowiec : « J’ai perdu ma dignité. J’ai perdu ma sérénité. Tout cela a aussi couté beaucoup d’argent à l’Etat français : la détention, les audiences, les traductions… J’aurais préféré que tout cet argent dépensé inutilement, par le biais de cette machinerie administrative, ait servi à aider des personnes vulnérables ou à combattre la prolifération de mafias, de trafics et de délinquance ».

C’est en se basant sur la justice européenne que le Tribunal Administratif de Montpellier a décidé, vendredi 8/12/17, d’annuler l’OQTF (l’Obligation de Quitter le Territoire Français), ainsi que l’interdiction de retour, opposées à Ivan Jankowiec. Le fait que le juge ait fondé sa décision en s’appuyant sur l’article 8 de la CEDH (Cour Européenne des Droits de l’Homme), protégeant la vie privée et familiale, est loin d’être anodine, comme le souligne le conseil d’Ivan, Me Mazas : « Le juge aurait parfaitement pu se baser sur le droit à la libre circulation, dans l’UE. Il a préféré opter pour l’article 8, ce n’est vraiment pas rien ». Il faut dire que cette avocate militante pro-droits de l’Homme avait fait miroiter, par voie de presse, à la justice française, sa détermination à saisir la justice européenne, si son affaire était déboutée.

Retour sur un imbroglio administratif

Vivant et travaillant sur le territoire communautaire, en passe d’obtenir sa carte de séjour, en Espagne, pacsé avec une Européenne (ce qui, dans le droit espagnol, donne, de facto, un droit de séjour en Espagne, même pour un non Européen), Ivan Jankowiec a donc eu gain de cause : il ne sera pas expulsé vers l’Argentine. A l’issue d’une audience corsée, jeudi 7/12/17, devant le Tribunal Administratif (TA) de Montpellier, Ivan est donc reparti rasséréné. Il faut dire qu’une cinquantaine de personnes, des anonymes, des sympathisants, avait fait le déplacement, dans un élan spontané de solidarité, avec Ivan. Des gens qui, via la presse, avaient eu vent de la situation du jeune Argentin. Cela a-t-il joué en la faveur du migrant OVNI ? « Je dirais que la publicité et la médiatisation de cette audience ont évidemment été un élément important de la procédure équitable » estime Me Mazas.

Le tribunal a donc enjoint à la délivrance d’une autorisation provisoire de séjour, en France, pour Ivan Jankowiec qui pourra donc rendre visite à sa famille qui réside à Montpellier, quand il le souhaite. Reste maintenant à faire sortir ce jeune homme du SIS (le « Système d’Information Shengen » : le fichier informatisé européen qui recense tous les migrants illégaux, dans l’UE ). Normalement, cela ne devrait être qu’une formalité. Pour Me Sophie Mazas, c’est le soulagement. Mais un soulagement en demi-teinte. Elle souligne l’absurdité du système administratif français, pour ce qui est des migrants : « L’administration française aurait pu (et aurait dû) épargner à la famille d’Ivan la durée et l’épreuve de passer devant une juridiction et d’avoir à se justifier devant le juge administratif. Elle a commis une boulette ».

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