Barbarin © Belga

« Incompréhension » des fidèles après le refus du Pape d’accepter la démission de Barbarin

Le Vif

Le refus du pape François d’accepter la démission du cardinal Philippe Barbarin a suscité mercredi l’incompréhension de nombreux fidèles catholiques, jugeant que cette décision « désespérante » empêche l’Eglise de « passer à autre chose ».

Le Pape a accordé un répit à l’archevêque de Lyon dans l’attente de son procès en appel pour non dénonciation des abus sexuels d’un prêtre de son diocèse. Mgr Barbarin, condamné à six mois de prison avec sursis, a toutefois annoncé se mettre en retrait de la direction de son diocèse.

Au lendemain de cette annonce, des fidèles catholiques se disent « désorientés », dans un contexte où les accusations d’agressions sexuelles par des membres du clergé se multiplient dans le monde. Des révélations qui ont amené le Pape à organiser en février un « sommet » sur la lutte contre la pédophilie en promettant « une lutte à tous les niveaux ».

Alexandre, catholique pratiquant de 29 ans, admet une décision du Pape « cohérente du point de vue juridique, dans la mesure où le cardinal a fait appel et donc il y a présomption d’innocence ».

Pour autant, « quand on en parle avec d’autres catholiques, on ne comprend pas bien », témoigne-t-il à l’AFP. « On attendait un signal fort de l’Eglise sur les affaires d’abus sexuels et l’acceptation de la démission » de Mgr Barbarin en aurait été un. « C’est une occasion loupée ».

« On se retrouve à porter comme un fardeau des fautes qui ne sont pas les nôtres », déplore-t-il, saluant toutefois la décision du primat des Gaules de se mettre en retrait de la conduite de son diocèse.

« Consternant »

Patrick Terrasse, rédacteur en chef de l’hebdomadaire chrétien Golias, se dit « très consterné, en premier lieu pour les victimes », des scouts ayant dénoncé des agressions pédophiles imputées au père Bernard Preynat dans les années 1980-1990.

« C’est aussi consternant pour François, qui avait parlé de +tolérance zéro+ pour les affaires de pédophilie. Or on constate qu’il n’a pas de volonté politique ni de vision politique pour ces affaires. Il gère au cas par cas ».

« Pour l’opinion publique catholique ou non catholique, cela paraît contraire au message évangélique que l’Eglise se doit de porter », estime encore Patrick Terrasse.

La non acceptation du Pape est également « un camouflet pour l’Eglise de France », juge-t-il: « cela montre que François connaît mal la France et qu’il n’a pas mesuré la portée de son geste », rappelant « la position médiatique » du prélat des Gaules. Le cardinal a annoncé lui-même mardi la décision du Pape.

L’institution ecclésiale ne cachait pas son embarras mardi, le président de la Conférence des évêques Mgr Georges Pontier se disant « étonné » d’une « situation inédite ».

La semaine dernière, un haut responsable religieux, en envisageant les divers scenarii possibles, avait estimé qu’un refus du Pape d’accepter une démission « mécontenterait tout le monde: Mgr Barbarin, le diocèse et ça n’aiderait pas l’Eglise à passer à autre chose ».

Cette situation est à la fois « terrible pour le cardinal, compliquée pour l’Eglise de France, très violente pour les victimes et désespérante pour les catholiques comme moi », a résumé Christine Pedotti, directrice de Témoignage chrétien.

Dès cette annonce mardi, les victimes à l’origine du procès Barbarin ont été abasourdies. « L’erreur de trop », a jugé François Devaux, cofondateur de l’association La Parole libérée. « L’Eglise n’est plus crédible à mes yeux », a déclaré à La Croix Alexandre Hezez, autre cofondateur.

La présidente d’une association de femmes catholiques à Versailles venant en aide aux victimes de pédophilie « Comme une mère aimante », raconte à l’AFP avoir reçu des messages de victimes « abasourdies et assommées par la décision du Pape ».

« Les plus petits se sentent une nouvelle fois piétinés et abandonnés », estime Camille de Metz-Noblat.

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