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Hollande et la famille rassemblée

Très impopulaire, le président socialiste français François Hollande a rappelé jeudi les écologistes au gouvernement pour élargir son assise politique à 14 mois de la présidentielle, et nommé aux Affaires étrangères son ex-Premier ministre Jean-Marc Ayrault, un revenant surprise.

« C’est un gouvernement qui doit agir, réformer, avancer ». « C’est vrai qu’il est élargi, mais il doit garder sa cohérence », a déclaré jeudi le président lors d’une interview aux chaînes de télévision TF1 et France 2.

« Tout ça pour quoi? Sans changement de cap, c’est un simple jeu de chaises musicales », a réagi de son côté une responsable de la gauche radicale, Clémentine Autain, illustrant l’émiettement d’une majorité déboussolée par les virages social-libéral et sécuritaire de l’exécutif.

Paradoxalement, Jean-Marc Ayrault, 66 ans, fait son retour dans un gouvernement dirigé par celui qui avait largement contribué à l’évincer de son poste au printemps 2014. Social démocrate revendiqué, il succède à Laurent Fabius, choisi mercredi pour devenir président du Conseil constitutionnel.

Jamais encore sous une même présidence, un chef du gouvernement n’était revenu au pouvoir depuis 1958 avec un « simple » portefeuille ministériel.

Germanophone, c’est « un homme expérimenté qui a une grande connaissance des questions européennes et du couple franco-allemand », a fait valoir l’entourage de la présidence française. Le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, s’est félicité de la nomination de Jean-Marc Ayrault, « homme très attaché à l’Allemagne ». « Bienvenue en ces temps troublés sur la scène européenne et internationale », a renchéri son homologue belge, Didier Reynders.

Au Quai d’Orsay, Jean-Marc Ayrault sera secondé par trois secrétaires d’Etat, un pour le Commerce extérieur et le Tourisme (Matthias Fekl), un pour les Affaires européennes (Harlem Désir) et un nouveau venu pour le Développement et la Francophonie (André Vallini).

Autre surprise du remaniement : les écologistes, qui avaient quitté le gouvernement en avril 2014, y reviennent pour prendre trois postes ministériels dans cette équipe élargie à 38 ministres (19 hommes, 19 femmes), contre 32 précédemment.

Faisant fi de l’avis de son parti opposé à une entrée au gouvernement, la dirigeante du parti écologiste Europe Ecologie-Les Verts, Emmanuelle Cosse (Logement), s’est dite « heureuse » de poursuivre son « engagement pour une écologie en action », avant d’annoncer quitter son poste de secrétaire nationale.

Objectif: une ‘famille rassemblée’

Au total, quatre ministres s’en vont (Affaires étrangères, Culture, Logement et Fonction publique) et les écologistes qui y reviennent vont s’occuper du Logement, de la Biodiversité et de la Réforme de l’Etat.

Le cap politique reste le même avec le maintien aux commandes du Premier ministre, Manuel Valls. Les ministres régaliens (Intérieur, Défense) conservent également leurs portefeuilles, la stabilité l’ayant emporté dans un contexte de menace terroriste très élevée depuis les attentats jihadistes de 2015.

Ségolène Royal, ex-compagne de François Hollande et qui avait été citée en tant que possible ministre des Affaires étrangères, reste également ministre de l’Environnement.

Au plus bas dans les sondages, confronté à un chômage record qu’il n’arrive pas à endiguer, critiqué au sein de sa majorité sur ses choix économiques et sécuritaires, François Hollande veut reprendre l’initiative pour 2017.

« On ne peut pas aborder une présidentielle sans une famille socialiste rassemblée derrière son candidat et sans les écologistes », analysait avant le remaniement un intime du président sous couvert d’anonymat.

François Hollande a fort à faire pour redorer son blason. Après une remontée spectaculaire au lendemain des attentats, sa cote de popularité s’est effondrée ces dernières semaines. Trois Français sur quatre (75%) considèrent que sa réélection en 2017 n’est pas « souhaitable », selon de récents sondages.

L’élan recherché par le chef de l’Etat se heurte à une fronde croissante, depuis la nomination en mars 2014 de Manuel Valls, chez une partie des socialistes. Les écologistes restent de leur côté profondément divisés avec des défections régulières.

Symbole de cette désunion dans la majorité de gauche, l’idée d’une primaire à l’approche du prochain scrutin présidentiel, déniant à François Hollande toute qualité de « candidat naturel », progresse. « Je ne vais pas rentrer dans ce débat de primaire », a affirmé jeudi le président français. « Je prendrai ma décision le jour venu », a-t-il ajouté.

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