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Guam: l’île perdue du Pacifique hautement stratégique

Le Vif

Pourquoi l’île de Guam, petit territoire américain perdu au milieu du Pacifique ouest,est-elle menacée par la Corée du Nord ? C’est que l’endroit n’est pas grand mais néanmoins essentiel pour les Etats-Unis. Explications.

L’île de Guam, menacée mercredi par la Corée du Nord, est un petit territoire américain perdu au milieu du Pacifique ouest, mais essentiel pour les Etats-Unis d’un point de vue militaire.

Cette île reculée de quelque 550 km2 est un avant-poste clé pour les forces américaines sur la route de l’Asie, où vivent 162.000 personnes. Environ 6.000 soldats y sont déployés et elle dispose surtout d’une base aérienne capable d’accueillir les bombardiers lourds américains du B-52 au B-2 en passant par le B-1.

Espagnole puis américaine

Guam, île de 550 km2, est découverte en 1521 par le navigateur portugais Magellan, puis occupée dès 1526 par l’Espagne.

L’île devient colonie américaine aux termes du Traité de Paris de 1898 qui met fin à la guerre hispano-américaine. Elle sera envahie par le Japon en décembre 1941, dès le début de la guerre du Pacifique, et libérée en juillet 1944.

Droits limités

Guam a un statut de territoire non incorporé organisé des Etats-Unis, comme Porto-Rico.

Ses 162.000 habitants, dont 40% environ sont issus de la population indigène Chamorro, sont citoyens américains, mais avec des droits limités.

Ils ne peuvent participer aux élections américaines et le seul représentant de l’île au Congrès n’a pas le droit de vote sur les propositions de loi.

Des voix s’élèvent régulièrement pour demander un référendum d’autodétermination, rejeté par la justice fédérale américaine.

Le républicain Eddie Calvo occupe depuis 2011 la fonction de gouverneur.

Sur Guam, qui figure sur la liste de l’ONU des territoires non autonomes, 45.000 personnes reçoivent une aide alimentaire et bénéficient du système de santé publique américain.

Base militaire stratégique

Située dans l’océan Pacifique ouest à quelque 2.600 km à l’est des Philippines, l’île principale de l’archipel des Mariannes est un avant-poste stratégique pour les forces américaines qui comptent environ 6.000 soldats sur une base aérienne et une base navale.

Guam était notamment le point de départ des bombardiers B-52 chargés d’attaquer Hanoï pendant la guerre du Vietnam (1955-1975).

Prisée des touristes

L’armée américaine contribue de façon importante à l’économie locale, également dépendante du tourisme.

Les plages paradisiaques, complexes hôteliers et magasins duty-free ont attiré plus de 1,5 million de visiteurs en 2016, la plupart japonais ou coréens, dont dépendent un tiers des emplois du territoire.

Le PIB par habitant s’élevait à 35.439 dollars en 2015, soit un peu moins que la France (36.527 dollars).

Le calme règne au « paradis »

Le calme régne à Guam où les autorités, rassurantes, invitaient habitants et touristes à « se relaxer et à profiter du paradis ».

Mais sur la scène internationale l’inquiétude règne face au ton belliqueux adopté par le locataire de la Maison Blanche et le dirigeant Nord Coréen.

Pyongyang a en effet présenté jeudi son projet détaillé pour tirer une salve de quatre missiles au-dessus du Japon vers le territoire américain de Guam, dans le Pacifique, surenchère dans sa confrontation avec Donald Trump accusé d’avoir « perdu la raison ».

Ce plan visant un avant-poste stratégique des forces américaines sur la route de l’Asie, constituera « un avertissement crucial aux Etats-Unis », a prévenu la Corée du Nord. Car d’après elle « seule la force absolue » aura un effet sur le président américain.

Cet avertissement fait suite à un tweet menaçant du chef de la Maison Blanche affirmant que l’arsenal nucléaire américain est « plus fort et plus puissant que jamais ». Quelques heures auparavant, Donald Trump avait stupéfait la communauté internationale en promettant au dirigeant nord-coréen Kim Jong-Un « le feu et la colère », mise en garde qui semblait tout droit sortie du répertoire oratoire de Pyongyang.

Cette guerre rhétorique autour des programmes balistique et nucléaire de Pyongyang alimente les craintes d’une erreur de calcul qui aurait des conséquences catastrophiques sur la péninsule coréenne et au-delà.

‘Comparable à la crise de Cuba’

Interrogée sur la succession de notes discordantes depuis 24 heures, Heather Nauert, porte-parole du département d’Etat, a assuré que les Etats-Unis parlaient « d’une seule voix ». « Et d’ailleurs, le monde parle d’une seule voix », a-t-elle ajouté, évoquant le vote par le Conseil de sécurité de l’ONU de nouvelles sanctions contre la Corée du Nord.

Le pays reclus est désormais doté d’armes nucléaires susceptibles d’être embarquées sur des missiles balistiques, y compris des missiles balistiques intercontinentaux (ICBM), selon les conclusions d’un rapport confidentiel achevé en juillet par l’agence américaine de renseignement militaire, la DIA.

Mais les spécialistes divergent de longue date sur les véritables capacités du Nord, en particulier à miniaturiser une tête nucléaire de façon à pouvoir la monter sur un missile.

Seul point de consensus: Pyongyang avance à grand pas depuis l’arrivée au pouvoir de Kim Jong-Un en décembre 2011.

Dans ce climat tendu, l’un des conseillers de Donald Trump, Sebastian Gorka, a appelé à l’unité derrière le président, dressant un parallèle avec la crise des missiles soviétiques à Cuba, qui, au début des années 60, mena le monde au bord du conflit nucléaire. « Durant la crise des missiles de Cuba, nous nous sommes rassemblés derrière JFK. C’est comparable à la crise des missiles », a-t-il déclaré sur Fox News.

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