Nicolas Sarkozy et François Fillon © AFP

France: la rivalité Fillon-Sarkozy tourne au scandale à droite comme à l’Elysée

En France, la rivalité à droite en vue de l’élection présidentielle 2017 tourne au scandale: l’ex-Premier ministre de Nicolas Sarkozy, François Fillon, est accusé d’avoir voulu faire accélérer les procédures judiciaires contre l’ex-président par la présidence socialiste au pouvoir à l’Elysée, également éclaboussé.

Deux journalistes du journal Le Monde affirment, dans un livre, que M. Fillon a sollicité un proche collaborateur de François Hollande, le secrétaire général de l’Elysée Jean-Pierre Jouyet, pour qu’il accélère une des procédures judiciaires portant sur les comptes de campagne de M. Sarkozy, lors d’un déjeuner le 24 juin.

François Fillon a vivement démenti et porté plainte contre les deux reporters et leur quotidien. « Je ne peux pas ne pas voir dans ces attaques invraisemblables une forme de déstabilisation et de complot », a-t-il dénoncé dans le Journal du dimanche.

M. Jouyet, par ailleurs ami de 35 ans de François Hollande, a d’abord démenti jeudi avoir évoqué cette affaire avec M. Fillon. Sous la pression médiatique, il a reconnu dimanche auprès de l’AFP, que celui-ci lui avait « fait part de sa grave préoccupation concernant l’affaire Bygmalion (nom de l’affaire portant sur le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2012) ».

« Il s’en est déclaré profondément choqué (…) Il a également soulevé la question de la régularité du paiement des pénalités payées par l’UMP (le parti de MM. Sarkozy et Fillon) pour le dépassement des dépenses autorisées dans le cadre de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy », a ajouté M. Jouyet.

« Tapez vite, tapez vite ! Jean-Pierre, tu as bien conscience que si vous ne tapez pas vite, vous allez le laisser revenir (en politique). Alors agissez! « , aurait lancé M. Fillon à son interlocuteur, selon les deux journalistes, allant jusqu’à accuser son ex-mentor d' »abus de bien social ».

L’ex-Premier ministre François Fillon a démenti la nouvelle version de M. Jouyet corroborant celle des journalistes, accusant de « mensonge » le plus proche collaborateur de François Hollande à l’Elysée.

« Je rendrai coup pour coup », a ajouté l’ancien Premier ministre, menaçant M. Jouyet, qui a fait partie de son gouvernement en 2007 et 2008, de suites judiciaires. Il a aussi demandé aux journalistes du Monde de produire l’enregistrement de leur entrevue avec M. Jouyet.

L’affaire, qui témoigne de la vivacité de la guerre des chefs à droite, n’est pas bonne non plus pour la gauche au pouvoir. Le fonctionnement de l’Elysée, déjà critiqué par la presse, est une nouvelle fois en cause alors que le président François Hollande bat des records d’impopularité.

Depuis juin, François Fillon assure avec les anciens Premiers ministres de droite Alain Juppé et Jean-Pierre Raffarin la gestion provisoire du parti UMP. Le poste de président de l’UMP est à pourvoir fin novembre et Nicolas Sarkozy, qui a toutes les chances de l’emporter, veut se servir de cette fonction comme d’un tremplin pour la présidentielle de 2017.

Face à lui, François Fillon, ainsi qu’un autre ancien Premier ministre, Alain Juppé, comptent lui barrer la route, lors d’éventuelles primaires à droite en 2016.

A gauche, si le président François Hollande n’est pas directement mis en cause, les tergiversations et le rôle central dans l’affaire de M. Jouyet, son ami de longue date, pourraient être gênants pour lui.

« C’est très grave », estime sous couvert d’anonymat un membre de l’exécutif, assurant que nombre de ministres voient en Jean-Pierre Jouyet « un personnage intrigant » qui « manipule tout le monde » et entretient des relations « troubles » avec l’opposition de droite. Bruno Le Maire, candidat à la présidence de l’UMP que brigue Sarkozy, a d’ores et déjà réclamé la démission de M. Jouyet, l’accusant d’avoir « menti aux Français ».

Marine Le Pen, présidente du Front national (extrême droite) a aussitôt critiqué la collusion entre les partis traditionnels qu’elle a surnommés ironiquement « UMPS » (contraction de UMP –Union pour un mouvement populaire–, et de PS, Parti socialiste).

« Cette affaire est symbolique (…) M. Jouyet, aujourd’hui secrétaire général de l’Elysée dans un gouvernement socialiste, hier sous-ministre de François Fillon (…) Tous ces gens-là travaillent ensemble », a lancé Mme Le Pen, que des sondages placent en tête des intentions de vote au premier tour en 2017. M. Jouyet avait en effet été secrétaire d’Etat aux Affaires européennes en 2007-2008 dans un gouvernement de François Fillon sous la présidence de Nicolas Sarkozy.

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