Golda Meir et Margaret Thatcher (en 1976) : le masculin pluriel. © BELGAIMAGE

Femmes au pouvoir, guerre au placard

Pierre Havaux
Pierre Havaux Journaliste au Vif

Trump, Poutine, Erdogan : les rouleurs de mécaniques sont de sortie. Une touche plus féminine dans un monde de brutes ne ferait pas de tort à la paix sur Terre, relève une étude universitaire belge.

Elles sont combattantes, résistantes,  » terroristes « , bombes humaines. Du Congo à la Syrie, elles contestent à l’homme le monopole de la violence armée. Les femmes aimeraient-elles pour autant faire la guerre ? Seraient-elles prêtes à la déclencher ? Des historien(ne)s, psychologues, sociologues et politologues francophones posent la question (1). Et incitent à ne pas désespérer du genre humain s’il est féminin. Explication en compagnie de Nicolas Van der Linden, docteur en psychologie à l’ULB.

La femme aime-t-elle autant en découdre que l’ homme ?

Les études convergent pour conclure à un effet pacificateur relativement robuste de l’exercice du pouvoir politique par les femmes. Plus les femmes sont au pouvoir, plus les sociétés sont pacifiques… sauf quand le chef d’Etat est une femme. Quand deux pays, l’un dirigé par une femme et l’autre par un homme, entrent en conflit, le chef d’Etat masculin développe une telle peur de véhiculer l’image de quelqu’un qui se ferait rouler par une femme, qu’il en devient encore plus intransigeant et belliqueux. Les femmes ont tendance à moins soutenir l’usage de la violence.

Par quel mystère ?

L’explication biologique, au stade des recherches, n’est pas concluante. La piste liée à l’instinct maternel ne tient pas : les mères n’adoptent pas des attitudes plus négatives à l’égard de la guerre que les femmes qui n’ont pas d’enfant.

Où réside alors l’explication ?

Les hommes ont toujours tendance à occuper des rôles sociaux plus prestigieux, qui développent un goût plus prononcé pour l’agressivité. Les femmes restent davantage cantonnées dans des créneaux moins valorisés, mais plus axés sur l’empathie et le refus d’infliger du mal à autrui. C’est pourquoi une société plus égalitaire pourrait être moins pacifique si une plus grande adhésion des femmes à la norme masculine n’est pas contrebalancée par une plus grande adhésion des hommes à la norme féminine. Une égalité totale entre les sexes pourrait ainsi gommer les différences d’attitudes face à la guerre.

Le pouvoir virilise-t-il la femme ?

En accédant aux rôles sociaux assurés par les hommes, la femme intériorise les valeurs féminines et masculines. Elle devient androgyne en politique. Deux dames de fer, l’Israélienne Golda Meir, dans les années 1970, et la Britannique Margaret Thatcher, dans les années 1980, ont été de beaux spécimens à la tête de leurs Etats… Parce que pour arriver au sommet, elles ont dû s’afficher plus masculines que les hommes.

Vivement les femmes au pouvoir ?

L’augmentation de leur pouvoir politique donnerait un visage plus amical aux actions gouvernementales. A condition d’atteindre un seuil critique. Selon l’écrivaine anglaise Virginia Woolf, le seul moyen d’oeuvrer efficacement pour la paix serait de valoriser les métiers plus largement exercés par les femmes, ceux qui véhiculent des valeurs incompatibles avec l’usage de la violence.

(1) « Les femmes aiment-elles la guerre ? », numéro coordonné par Annalisa Casini et Anne Morelli, revue Sextant, éd. ULB, 2017.

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