Fatah et Hamas « unis » contre le projet israélien d’annexion en Cisjordanie

Le Vif

Les frères ennemis palestiniens du Fatah et du Hamas se sont engagés jeudi à l' »unité » contre le projet israélien d’annexion de pans de la Cisjordanie occupée, après plus d’une décennie de divisions intestines.

Lors d’une rare conférence de presse conjointe, le Fatah laïc et le Hamas islamiste, respectivement au pouvoir en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, ont assuré vouloir ouvrir « une nouvelle page ».

« Nous mettrons en place tous les mécanismes pour assurer l’unité nationale » contre le projet israélien, a affirmé le secrétaire général du Fatah, Jibril Rajoub, disant vouloir s’exprimer « d’une seule et même voix ».

Saleh al-Arouri, cadre du Hamas qui s’exprimait en visioconférence depuis Beyrouth, a de son côté assuré que « la direction du Hamas est pour le consensus national ».

« Cette conférence de presse conjointe est d’ailleurs une opportunité pour entamer une nouvelle étape au service de notre peuple en ces moments périlleux », a-t-il estimé.

La dernière rencontre connue entre le Hamas et le Fatah remontait à janvier 2020.

Les deux formations sont à couteaux tirés depuis 2007, année où le Hamas a pris le contrôle de la bande de Gaza au terme d’une quasi guerre civile, un an après avoir remporté les législatives. Depuis, tous les efforts de réconciliation ont échoué.

Mais le projet d’Israël, qui souhaite annexer ses colonies et la vallée du Jourdain en Cisjordanie –un territoire palestinien qu’il occupe depuis 1967– semble avoir fait bouger les lignes.

Pour l’analyste palestinien Ghassan al-Khatib, les deux formations considèrent que le projet d’annexion est « très dangereux et « assez important pour mettre de côté leurs différences ».

L’annexion de pans de la Cisjordanie est prévue par le plan américain pour le Proche-Orient, rejeté en bloc par les Palestiniens dès sa présentation fin janvier.

Le texte prévoit aussi la création d’un Etat palestinien démilitarisé sur un territoire restreint avec la Cisjordanie et la bande de Gaza, distantes d’une cinquantaine de km, reliées par un corridor.

Le Hamas avait appelé mi-juin le peuple palestinien à « confronter le projet d’annexion par la résistance sous toutes ses formes » et « à transformer cette épreuve en opportunité pour remettre le projet palestinien sur les rails ».

« Il n’y a pas de place pour un monopole, l’exclusion où la domination au sein du leadership palestinien », avait affirmé un haut responsable du mouvement islamiste.

Tensions avec Washington ?

Côté israélien, le Premier ministre Benjamin Netanyahu multiplie les consultations avec des responsables américains et le gotha sécuritaire sur son projet d’annexion, lui qui avait jugé comme étant une « opportunité historique » le plan de son proche allié, le président américain Donald Trump.

D’après l’accord de gouvernement d’union signé ce printemps, Israël peut en principe se prononcer depuis mercredi sur la mise en oeuvre du plan Trump.

M. Netanyahu a rencontré cette semaine à Jérusalem Avi Berkowitz, conseiller spécial de Donald Trump, et David Friedman, ambassadeur américain en Israël, et « poursuit ses discussions avec les Américains », mais aussi avec de hauts responsables militaires et du renseignement, selon ses services.

« Il semblerait qu’une partie des discussions (avec les Américains) porte sur des gestes envers les Palestiniens », explique à l’AFP Daniel Shapiro, ambassadeur en Israël sous l’ancien président américain Barack Obama.

« Ces mesures sont difficiles à avaler pour Netanyahu à cause de ce sa base électorale qui souhaite une annexion encore plus vaste, avec moins de coordination avec les autres acteurs concernés, le plus tôt possible et sans donner quoi que ce soit aux Palestiniens », précise M. Shapiro. « Je pense qu’il y a des tensions entre Netanyahu et la Maison Blanche sur ce sujet ».

La question qui occupe donc de nombreux observateurs est de savoir si le Premier ministre optera pour une approche maximaliste avec le rattachement à Israël de la vallée du Jourdain et d’une centaine de colonies, ou une approche minimaliste en visant une poignée de colonies.

Il pourrait aussi reporter son projet, mais tout en sachant qu’il bénéficie d’une « fenêtre » de tir de quelques mois car une victoire en novembre à la présidentielle américaine du démocrate Joe Biden, hostile à l’annexion, pourrait anéantir l’appui américain au plan d’annexion.

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