Deux djihadistes belges se sont échappés de leur prison en Syrie

Deux hommes djihadistes belges qui étaient emprisonnés dans le nord-est de la Syrie ont pu s’échapper, selon les informations communiquées par le directeur de l’Organe de Coordination et d’Analyse de la Menace (OCAM), Paul Van Tigchelt, devant la commission des Relations extérieures de la Chambre. L’un d’entre eux a été condamné par défaut pour terrorisme en Belgique.

Trois femmes et six enfants qui se trouvaient dans le camp d’Aïn Issa, une ville théâtre des affrontements entre l’armée turque et les forces kurdes, se sont également enfuis et sont dans la nature. Une note remise à la commission fait toutefois état de chiffres plus importants: l’incertitude plane sur 15 combattants terroristes à l’étranger (Foreign Terrorist Fighters -FTF). Outre les deux hommes, il est notamment question de sept femmes qui ont fui leur camp de réfugiés, dont quatre ont été condamnées par défaut pour terrorisme en Belgique, et de quatre hommes et femmes dont la détention ou la localisation n’est pas confirmée.

Vu la confusion qui règne sur place, les chiffres sont mouvants. Selon les dernières données communiquées par le directeur de l’OCAM, 55 combattants terroristes et 69 enfants qui ont un lien avec la Belgique se trouvent dans la région. Il s’agit soit de Belges, soit de ressortissants étrangers mais qui ont séjourné en Belgique avant leur départ en Syrie. Le document transmis à la commission donne davantage de précisions: l’on recense 84 personnes liées à la Belgique qui se trouveraient actuellement dans les camps de réfugiés administrés par les forces kurdes dans le nord de la Syrie: 27 d’entre elles sont des femmes, 56 sont des mineurs de moins de 12 ans, dont 45 accompagnent leurs mères, au nombre de 19 et toutes considérées comme FTF. Un mineur masculin serait décédé.

Toutes ces personnes ne présentent pas le même degré de dangerosité: certains ont abjuré leur idéologie, d’autres en revanche sont toujours des terroristes purs et durs. Il est peu probable actuellement qu’un FTF puisse gagner l’Europe sans être contrôlé, ni même remarqué, selon M. Van Tigchelt. Qui plus est, le principal danger terroriste n’est désormais plus l’envoi de commandos depuis la Syrie, à l’image des auteurs des attentats de Paris ou de Bruxelles, mais plutôt des personnes solitaires qui se radicalisent en Europe.

Que faire de ces combattants? Jusqu’à présent, le gouvernement continue à plaider pour la mise en place d’un juridiction internationale mais l’option est loin d’avoir un soutien suffisant jusqu’à présent dans la communauté internationale. « Si l’on peut mettre un tel tribunal en place, pourquoi pas? Mais ce genre de tribunal est très lourd et cela demandera beaucoup de temps », a expliqué le procureur fédéral, Frédéric Van Leeuw. Des discussions sont également en cours avec les autorités irakiennes en compagnie d’autres Etats européens pour que ces terroristes soient jugés en Irak.

Cette perspective laisse sceptique le procureur fédéral, Frédéric Van Leeuw. Le magistrat s’inquiète du respect du droit à un procès équitable. Il a pris l’exemple des condamnations à mort prononcées jusqu’à présent par la justice irakienne et dont la motivation tient en à peine deux pages. Des procès en Belgique poseraient également des problèmes. Un renvoi en cour d’assises serait très lourd et pourrait enrayer la machine judiciaire vu le nombre de personnes qui comparaîtraient. Quant à la correctionnalisation des crimes, elle implique des peines moins sévères. Le magistrat souhaite donc qu’une chambre correctionnelle professionnelle puisse voir le jour pour juger des crimes commis. Un appel au monde politique entendu par la N-VA. Un procès digne de ce nom implique aussi que suffisamment de preuves soient rassemblées.

Le procureur fédéral souhaite que des enquêteurs belges puissent se rendre sur le terrain, comme l’ont fait les Pays-Bas après le crash de l’avion MH17. Tous les FTF partis en Syrie font l’objet d’un mandat d’arrêt international émis par la Belgique, qui doit être exécuté dès que c’est possible, selon M. Van Leeuw. « On est parfois en train de se dire que s’ils reviennent chez nous, ils vont faire des dégâts. Mais ils peuvent faire des dégâts aussi en Syrie. Est-ce qu’une victime syrienne vaudrait moins d’une victime belge? Si je n’exécute pas mon mandat, il y a aussi une responsabilité à l’égard des victimes là-bas, où ces gens ont déjà fait beaucoup de victimes », a-t-il fait remarquer.

Contenu partenaire