Michel Platini © Belga

Derrière Platini, en garde à vue, la cible est Sarkozy

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Avec la mise en garde à vue de l’ancien patron de l’UEFA et l’audition de l’ancien secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant, comme  » suspect libre « , la justice se rapproche de l’ancien président français.

Ce n’est pas véritablement une surprise. Mais cela reste un nouveau coup de tonnerre dans le ciel du football mondial – et potentiellement, au-delà, dans la politique française au sens large. Le site d’investigation Médiapart a révélé ce mardi matin que l’ancien président de l’UEFA et ancien capitaine mythique des Bleus, Michel Platini, est placé en garde à vue dans l’enquête concernant l’attribution de la Coupe du monde au Qatar en 2022. Mis en examen, il verrait sa carrière irrémédiablement brisée, après avoir déjà raté la présidence de la FIFA. « Platoche » n’est pas le seul visé : Claude Guéant, ex-secrétaire général de l’Elysée, est auditionné en tant que « suspect libre ».

Selon nos informations, la cible ultime derrière ces démarches judiciaires est, potentiellement, l’ancien président français Nicolas Sarkozy, sur fond de relations plus qu’ambiguës entre la France et le Qatar au début de la décennie. Le parquet national financier (PNF) français s’intéresse notamment à un célèbre déjeuner qui a réuni à l’Elysée, le 23 novembre 2010, le président français, Michel Platini et Tamin ben Hamad al-Thani, alors prince héritier du Qatar, devenu émir trois ans plus tard. Bien qu’il nie les faits, Claude Guéant aurait bien été présent à l’Elysée ce jour-là. Neuf jours plus tard avait lieu le scrutin de la FIFA au cours duquel la Coupe du monde 2022 a été attribuée au Qatar dans des circonstances rocambolesques, avec le soutien Michel Platini, alors que tout allait à l’encontre de ce choix : manque de popularité du foot dans cet émirat, conditions sociales et environnementales dantesques…

D’autres sujets brûlants auraient été abordés avec le Qatari au cours de ce fameux déjeuner, probablement liés à cette attribution de la Coupe du monde. Il est notamment question du rachat du Paris Saint-Germain, effectif depuis juin 2011, le club dont Sarkozy est l’un des plus fervents supporters ou encore de la création de la chaîne de télévision BeIN Sports, attaque en règle contre Canal+ en ce qui concerne la couverture du sport. Il pourrait encore être question de l’octroi au fils de Platini d’un poste de directeur au sein de la firme de vêtements sportifs qatarie Burrda Sport, quelques mois à peine après l’attribution au Qatar du Mondial 2022. Il reste des questions très sensibles auxquelles la justice tente d’apporter des réponses, notamment le fait de savoir si les principaux intéressés – Michel Platini et Nicolas Sarkozy en tête – auraient bénéficié de largesses financières à titre personnel. Pour le président français, cette nouvelle affaire s’ajouterait à d’autres, notamment le financement de sa campagne électorale par le régime libyen de Mouammar Kadhafi.

Ce coup de tonnerre témoigne une nouvelle fois du fait que, dans un passé pas très lointain, le football mondial fut l’objet de manoeuvres peu glorieuses dont les effets sont palpables aujourd’hui. Il prouve aussi que des grands de ce monde, et non des moindres, ont sans doute été en première ligne de l’exploitation nauséabonde du pouvoir énorme de ce sport-roi devenu un outil de « soft power ».

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire