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Début d’un pèlerinage historique de sikhs indiens au Pakistan

Le Vif

Des centaines de pèlerins sikhs indiens sont attendus à partir de samedi en visite dans un des lieux les plus saints de leur religion, situé au Pakistan, en un puissant symbole de coopération entre deux nations à couteaux tirés depuis des décennies.

L’ouverture d’un corridor conçu spécialement à cet effet, réclamée de longue date par New Delhi et attendue dans la journée, devrait permettre à des milliers de pèlerins sikhs de participer sans visa aux célébrations du 550e anniversaire du fondateur de la religion dans les prochains jours. Le mausolée de Gourou Nanak se trouve dans la petite ville pakistanaise de Kartarpur, à seulement 4 km de la frontière indienne.

La construction du corridor a été saluée samedi par le Premier ministre indien Narendra Modi dans un discours dans la ville frontalière de Dera Baba Nanak.

« Je voudrais remercier le Premier ministre du Pakistan Imran Khan pour son respect des sentiments de l’Inde. Je le remercie pour sa coopération », a-t-il affirmé. « L’ouverture du corridor de Kartarpur Sahib avant le 550e anniversaire de Gourou Nanak nous a comblés de joie », a-t-il ajouté.

Très tôt samedi, des centaines de personnes dont de nombreux hommes portant des barbes et les turbans colorés caractéristiques du sikhisme, ont commencé à affluer en direction du site de chaque côté de la frontière, a constaté l’AFP.

« Je suis un des rares chanceux à faire partie du premier groupe. Ceci devrait être le début d’un dialogue entre l’Inde et le Pakistan », s’est réjoui l’un d’eux, le professeur Hardev Singh Virk, alors qu’il patientait avant l’ouverture du corridor côté indien.

« J’espère que les relations vont s’améliorer. C’est une bonne initiative », renchérit un autre participant, Harpal Singh, homme d’affaires de 64 ans.

Restrictions de visa

Kartarpur est un des lieux les plus sacrés au monde pour les fidèles sikhs, dont le nombre est estimé à quelque 30 millions dans le monde, dont plusieurs millions en Inde et environ 20.000 au Pakistan.

Le site n’était jusqu’ici que très difficilement accessible aux sikhs indiens, soumis comme la plupart de leurs compatriotes à des restrictions de visa en raison des tensions géopolitiques qui opposent les deux pays depuis leur indépendance de la couronne britannique en 1947.

La violente partition entre Inde et Pakistan qui avait immédiatement suivi la décolonisation s’était traduite par la plus importante migration de masse de l’Histoire et avait causé la mort d’au moins un million de personnes.

Nombre de familles sikhes, musulmanes ou hindoues s’étaient retrouvées brutalement divisées dans le chaos de la partition et restent dans l’incapacité de se retrouver depuis en raison des difficultés à obtenir un visa.

Le projet de corridor sikh vers Kartarpur est longtemps demeuré gelé faute de dialogue entre les deux pays voisins.

Il se réalise paradoxalement à un moment où les relations entre les deux puissances nucléaires sont particulièrement difficiles.

Inde et Pakistan se disputent le territoire du Cachemire et se sont livré trois guerres en l’espace de 72 ans. Ils ont frôlé une nouvelle confrontation militaire en février et tentent chacun de gagner la communauté internationale à leur cause.

Un accord indo-pakistanais pour la création du corridor a malgré tout vu le jour fin octobre après plusieurs mois de discussions parfois houleuses.

Le site de Katarpur, désormais embelli et agrandi, doté d’un nouveau pont et d’un point de contrôle pour l’immigration, pourra accueillir quelque 5.000 pèlerins chaque jour. Au moins 700 pèlerins devraient emprunter le corridor samedi, suivis de nombreux autres dans les jours suivants.

Nombre de sikhs venus du monde entier – munis de visas – sont déjà arrivés au Pakistan ces derniers jours en vue des célébrations, a constaté l’AFP.

« C’est notre souhait d’une vie entière qui se réalise, nous n’avions jamais imaginé cela » s’émeut Manees Kaur Wadha, une pèlerine indienne près du site samedi.

« Depuis l’enfance, nos anciens nous ont raconté tant d’histoires sur le Pakistan, comment ils venaient de là, mais nous n’aurions jamais imaginé que nous pourrions le voir et éprouver de tels sentiments », lance-t-elle.

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