Mossoul © Reuters

Comment reconstruit-on une ville d’un million d’habitants après le passage de l’EI ?

Le Vif

Depuis que Mossoul a été libérée du joug de l’EI, la ville se réveille d’un long cauchemar. Mais comment reconstruire une ville d’un million d’habitant et qui y a aujourd’hui le pouvoir ? De Volkskrant tente d’y répondre au travers d’un reportage sur place.

A Mossoul, l’avenir commence dans une penderie dit le quotidien. Exit le noir jusqu’à couvrir les yeux. La couleur explose dans les rues. Les femmes sont dehors et commandent des Kebab au serveur. Tout cela était normal avant l’arrivée de l’EI il y a plus de deux ans, le 2 juin 2014.

Depuis une semaine, le côté est de la ville est totalement libéré de l’EI. Et s’il y a encore quelques reliquats de leur passage, les gens affluent désormais dans les rues, les magasins ouvrent à nouveau, on rebouche les trous laissés par les balles et il y a même des embouteillages.

Zeinab, Dina (33) et Soera (42) sont trois femmes qui travaillaient au barreau de Mossoul avant que la ville ne soit envahie. Zeinab est avocate et n’a eu depuis deux ans des conversations juridiques qu’avec les femmes de la police morale. Maintenant que la ville est libérée, elle espère que sa pratique va bientôt reprendre.

Mais les racines de l’EI sont profondes et gâchent encore un peu le paysage. « Il faut que vous sachiez une chose, l’élite avait rejoint l’EI. Pas les moins éduqués. C’était des docteurs, des juristes. Un pharmacien que je connaissais a même fait un attentat suicide » raconte Zeinab dans le quotidien hollandais repris par De Morgen. .

Les habitants de la ville n’aiment guère regarder en arrière

Dans un hôpital en partie incendié par l’EI, il n’y a plus ni matériel, ni médicaments. Les médecins essayent de nettoyer ce qui peut être sauvé. Un cardiologue tend le bras ou dessus de sa serpillière en désignant les ruines de Ninevé. « Mousoul est si vieille. Bien sûr que nous la reconstruirons ».

L’école, elle, va reprendre dès que les nouveaux livres scolaires, censés remplacer les manuels délivrés par l’EI, seront livrés. Détail lugubre d’un passé très récent, des tombes récentes se trouvent en bordure de la cour de récré. Mais quel sera le message des enseignants lorsque leurs élèves reviendront? Insisteront-ils sur le fait que l’EI était le mal ? Le nouveau directeur de l’école se tait avant de souffler que la réponse se trouve dans le Coran et de citer de mémoire : « L’écume fini par s’évanouir. Mais ce qui fait du bien aux hommes reste sur terre ». En d’autres termes le mal finira bien par partir de lui-même de Mossoul dit De Volkskrant.

L’université qui avait une réputation internationale et qui a été le siège de l’EI durant l’occupation a été incendiée et piégée par ces derniers avant qu’ils ne quittent la ville. En face se trouve le magasin de Nasr Imad. Où, en vitrine, paradent des « Samsung Galaxy 7 pour 200 dollars et des plus vieux Samsung pour 100 dollars. » Si la devanture attire les regards, peu de gens achètent, car pour cela il faut qu’ils aient de l’argent. Sous l’EI les ventes n’étaient pas mauvaises, mais tout de même avec quelque à côté peu agréable. Imad a été arrêté 5 fois pour des cigarettes ou parce que son pantalon était trop court.

Peu d’aide internationale

Le travail de reconstruction devra probablement être effectué par les habitants seuls, car les membres de l’autorité lui préfèrent la beaucoup plus calme ville d’Erbil, situé à deux heures de là et la ville est quelque peu oubliée par l’aide internationale.

Pour empêcher les djihadistes de revenir, le gouverneur souhaite entourer la ville d’un cordon de troupes de sécurité. Mais comment éviter que les habitants de Mossoul soient à nouveau séduits par l’extrémisme de l’EI ? « Nous devons encore l’étudier. Nous n’oublierons pas. » précise-t-il.

Si la ville semble revivre, l’optimisme béat ne semble pas de mise comme le rappelle Wafaa, une femme de 40 ans. « Au début les habitants de Mossoul étaient contents, car il mettait fin au pouvoir des milices et de leur très arbitraire checkpoint. Moins d’une semaine après le départ de l’EI, on voyait les premiers checkpoint à côté de la grande mosquée. »

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