Boris Johnson © AFP

Comment Boris Johnson soigne déjà sa relation avec Trump

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

En refusant de soutenir l’ambassadeur britannique dans la tourmente, le probable futur Premier ministre a fait un choix politique. L’occasion, sans doute, de lui nommer un successeur plus  » pro-Brexit  » et de tendre, au passage, la main au président américain.

Selon plusieurs médias britanniques, dont The Guardian et The Independent, la démission de l’ambassadeur britannique aux États-Unis, Kim Darroch, fait suite au refus de Boris Johnson de le soutenir publiquement lors de son débat avec Jeremy Hunt, l’autre candidat au 10 Downing Street.

Boris Johnson et le leadership

Si la décision de Darroch de démissionner est motivée par le fait qu’il ne peut se permettre d’être un obstacle à la bonne continuation de la mission qui était la sienne – assurer les bonnes relations entre deux pays « amis » -, Johnson est tout de même accusé d’avoir « exécuté les ordres de Trump ». Dans le collimateur du président américain, Darroch aurait en outre eu peur que lui, et surtout sa famille, soient pris pour cible tant qu’ils restaient à Washington. Mais c’est surtout la position prise par le probable futur Premier ministre qui crée désormais la polémique au Royaume-Uni. En refusant à six reprises d’apporte son soutien à l’ambassadeur, « Johnson l’a jeté sous un bus », dit le secrétaire d’État aux affaires étrangères, Alan Duncan. Sans le soutien du président américain et de son futur patron, Darroch aurait donc naturellement conclu qu’il n’avait aucun avenir en tant qu’interlocuteur entre Londres et Washington.

« Boris Johnson n’est même pas encore Premier ministre qu’il est déjà responsable d’un coup dur porté à la réputation internationale du Royaume-Uni », estime le député indépendant (ex-Tory) Nick Boles, cité par The Independent. Une critique partagée par l’ancien président conservateur Patrick McLoughlin qui trouve « édifiant » pour un futur leader de ne pas défendre ses fonctionnaires face aux attaques de gouvernements étrangers : « Le leadership, c’est défendre son équipe ».

Accord avec Trump sur fond de Brexit

La démission de Darroch signifie aussi dire que la personne à l’origine de la fuite, qui n’a toujours pas été identifiée, a eu ce qu’elle voulait. Pour le Guardian, « il était assez clair, dès le départ, que le but politique était de faire enlever Darroch de son poste, pour être remplacé par un vrai Brexiter comme Nigel Farage – et apparemment Johnson – le souhaite si le Royaume-Uni veut retirer un maximum de valeur politique et économique du Brexit ». Si Theresa May ne nomme pas un ambassadeur avant son départ, c’est en effet au futur Premier ministre que reviendra cet honneur.

La décision de Johnson de ne pas le défendre est donc vue comme un acte de sabotage. « Johnson a choisi de le trahir parce qu’il considère sa relation avec Trump comme cruciale pour le succès du Brexit, et il ne pouvait tout simplement pas se permettre de commencer son mandat de Premier ministre avec une impasse avec les États-Unis sur un émissaire pour qui il avait peu de sympathie », écrit encore The Guardian, qui juge que l’évitement de la responsabilité personnelle est déjà en train de devenir la caractéristique négative déterminante de la candidature de Johnson.

Cet évènement dresse sans doute déjà les lignes de la nature de la relation spéciale entre Trump et Johnson. L’ancien ministre des Affaires étrangères David Miliband estime que l’empressement de Johnson à plaire à la Maison-Blanche, tout en tournant le dos à ses voisins européens, montre une faiblesse dans le processus du Brexit. En misant tout sur Trump, Johnson espère obtenir facilement et rapidement un accord de libre-échange généreux entre les deux puissances.

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