© Belga

Colis piégé au siège parisien du FMI: la piste des anarchistes grecs

Le Vif

Le groupe anarchiste grec Conspiration des cellules de feu est « vraisemblablement à l’origine » de l’envoi du colis piégé ayant explosé jeudi au siège du FMI à Paris, faisant un blessé, a indiqué à l’AFP une source policière grecque.

Cette source a en effet souligné que le ministre adjoint grec de la Protection civile Nikos Toskas avait été avisé par les autorités françaises que le colis envoyé au FMI avait été expédié d’Athènes, comme celui envoyé au bureau du ministre allemand Wolfgang Schäuble ministère allemand des Finances.

A Paris, une source proche de l’enquête a indiqué que des résidus de timbres grecs avaient été retrouvés par la police sur les lieux de l’explosion.

« Compte tenu de ces premières constatations, l’enquête s’oriente plutôt vers la piste d’un groupe anarcho-autonome », a confirmé cette source.

Le groupe anarchiste grec Conspiration des cellules de feu a revendiqué jeudi l’envoi d’un paquet contenant un « mélange explosif » découvert la veille au ministère allemand des Finances, et dont l’explosion a pu être empêchée.

Ce groupe, apparu en Grèce en 2008, avait mis l’Europe en état d’alerte en 2010 avec une série d’envois de colis piégés, notamment à la chancellerie allemande, et à Jose Emmanuel Barroso, alors président de la Commission européenne.

Plus d’une dizaine de ses membres purgent de lourdes peines depuis leur arrestation en 2011.

Le groupe a cependant fait sa réapparition en 2014 en provoquant de petits attentats à l’engin explosif sans faire des victimes.

L’explosion du colis piégé au siège du FMI a « légèrement blessé » aux mains et au visage la secrétaire qui se trouvait dans le bureau, selon la préfecture de police de Paris.

Le président français François Hollande a qualifié cet acte d' »attentat », et annoncé la prolongation de l’état d’urgence du pays « jusqu’au 15 juillet ».

Le responsable de la Protection civile grecque, Nikos Toskas, a expliqué à la télévision privée Antena avoir été informé par la police française que le colis envoyé au FMI « contenait une petite quantité de poudre ».

Quelques heures auparavant le préfet de police de Paris Michel Cadot avait indiqué que l’explosion avait été provoquée par un engin pyrotechnique « relativement artisanal », qui a provoqué des « dégâts assez limités dans le bureau ».

M. Toskas a indiqué que le paquet « portait une fausse adresse d’expéditeur, celle de Nikos Kikilias », député et porte-parole du parti de droite d’opposition grecque Nouvelle-Démocratie, dont l’implication a été exclue.

La police grecque a indiqué être en « étroite collaboration » avec les autorités françaises et allemandes sur cette affaire.

« Nous sommes encore en face d’un attentat »

« Nous sommes encore en face d’un attentat, il n’y a pas d’autre mot face à un colis piégé », a dit le président français. Christine Lagarde, la patronne du FMI, a de son côté condamné un « acte de violence lâche ».

« Nous sommes toujours visés. Là, en l’occurrence, c’est le Fonds monétaire international, mais c’est en France, c’est la France. (…) Nous sommes directement concernés », a déclaré le chef de l’Etat en marge d’un déplacement dans le sud.

« Il y a l’état d’urgence, j’ai annoncé qu’il devait être prolongé jusqu’au 15 juillet », a-t-il rappelé.

Le Premier ministre Bernard Cazeneuve, en déplacement sur le terrain, a écourté sa visite après l’explosion à laquelle est venue s’ajouter, peu après, une fusillade qui a fait deux blessés dans un lycée de Grasse, dans le sud-est de la France.

L’explosion du colis piégé au siège du FMI a « légèrement blessé » aux mains et au visage la secrétaire qui se trouvait dans le bureau, selon la préfecture de police de Paris.

Mercredi à Berlin, un « mélange explosif » a été découvert au ministère allemand des Finances, expédié depuis la Grèce, avec comme fausse adresse d’expéditeur celle d’un député de droite. Le groupe anarchiste grec Conspiration des cellules de feu a revendiqué l’envoi de ce paquet. Pour l’instant, aucun lien avec le colis piégé de Paris n’a été établi.

Engin « relativement artisanal »

L’explosion au siège parisien du FMI a été provoquée par un engin pyrotechnique « relativement artisanal », qui a provoqué des « dégâts assez limités dans le bureau » où il a explosé, a déclaré le préfet de police Michel Cadot au cours d’un bref point de presse sur place.

Selon les premiers éléments de l’enquête, l’engin pourrait être un pétard. Plusieurs personnes ont été évacuées par mesure de précaution après cette explosion survenue autour de 10H30 GMT.

La section antiterroriste du parquet de Paris a ouvert une enquête après l’explosion survenue dans le bâtiment du FMI, au coeur de Paris, non loin de l’Arc de Triomphe, à proximité des Champs-Elysées.

« La cible et le mode opératoire » rendent cette saisine « logique », a indiqué une source proche de l’enquête.

L’enquête en flagrance est ouverte notamment pour tentative d’assassinat et destruction par moyen explosif en relation avec une entreprise terroriste, et association de malfaiteurs terroriste criminelle, a annoncé le parquet. Les investigations ont été confiées à la Sous-direction antiterroriste (Sdat) et la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), a précisé le parquet.

La police scientifique parisienne a été envoyée sur place.

Mercredi, le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas avait estimé que les conditions étaient réunies pour « une sortie de l’état d’urgence », instauré en France au soir des attentats jihadistes du 13 novembre 2015 et prolongé jusqu’au 15 juillet 2017.

La décision reviendra toutefois à la majorité issue des urnes après la présidentielle et les législatives. Toute nouvelle prolongation de l’état d’urgence doit en effet être soumise au Parlement.

La Conspiration des cellules de feu, une signature apparue en 2008

La « Conspiration des cellules de feu » s’inscrit dans la mouvance anarchiste et d’extrême gauche toujours active en Grèce.

Le groupe a fait son apparition en 2008. Après des troubles urbains provoqués par la mort d’un adolescent tué par la police, des attentats signés par la Conspiration avaient notamment visé la résidence d’un procureur en février 2009, le tribunal de Salonique (nord) en mai de la même année et le domicile de l’ex-ministre de l’Ordre public en juillet, puis le Parlement en janvier 2010.

Fin 2010, le groupe avait mis l’Europe en état d’alerte avec une série d’envois de colis piégés, notamment aux dirigeants européens Angela Merkel, Nicolas Sarkozy et Silvio Berlusconi, ou à José Manuel Barroso, le président à l’époque de la Commission européenne. Ces colis n’avaient pas fait de victimes.

La Conspiration avait également envoyé des colis piégés à d’autres institutions et ambassades européennes, mais la plupart avaient pu être interceptés à l’aéroport d’Athènes. Ils contenaient généralement des livres évidés et remplis d’une poudre provenant de pétards.

Le groupe affirmait alors collaborer avec les anarchistes italiens de la FAI (Fédération Anarchique Informelle), également connus pour l’envoi de colis piégés en Italie depuis les années 2000.

En 2011, plusieurs de ses membres ont été arrêtés dont une dizaine de très jeunes gens, et ont été condamnés pour « participation à une organisation criminelle » à de lourdes peines de prison.

Le groupe a cependant annoncé « son retour » en 2014 et a depuis signé des actions sporadiques, sans faire de victimes, dont une attaque contre les locaux du parti socialiste grec Pasok, alors au pouvoir dans un gouvernement de coalition.

La police estimait à l’époque que la Conspiration fédérait des franges radicalisées de la jeunesse grecque, face à la grave crise sociale et économique vécue par le pays.

En avril 2014, la Banque de Grèce avait été la cible d’une explosion, revendiqué cette fois par le groupe « Lutte révolutionnaire ».

Le dernier acte en date de la Conspiration était en octobre 2016 un attentat à l’engin explosif contre le domicile athénien d’une magistrate du parquet.

En novembre 2016, une attaque à la grenade contre l’ambassade de France à Athènes avait très légèrement blessé une policière. Il avait cette fois été revendiqué par un groupe « Organisation d’autodéfense révolutionnaire ». Celui-ci avait revendiqué en juillet 2014 des tirs contre l’ambassade du Mexique à Athènes.

La mouvance anarchiste est toujours active en Grèce mais elle s’illustre avec des actions beaucoup moins violentes que les groupes d’extrême gauche de guerilla urbaine actifs pendant plusieurs décennies après la dictature des colonels (1967-1974), comme celui du 17-Novembre demantelé en 2000.

La situation politico-sociale est moins tendue en Grèce ces dernières années par rapport aux grandes manifestations de 2010-2012. Mais le pays reste en crise, confronté aux mesures d’austérité exigées par les créanciers alors que des différences d’appréciation macro-économiques entre le FMI et le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble bloquent le versement d’une nouvelle tranche d’aide.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire