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Cinq points de discorde entre la Turquie et les Etats-Unis

Le Vif

Les tensions entre Washington et Ankara ont franchi un nouveau palier avec la décision américaine d’imposer des sanctions contre deux ministres turcs en lien avec la détention d’un pasteur américain.

La Turquie a juré de répliquer. Cet épisode apparaît comme le point d’orgue de deux années de relations tendues entre ces deux alliés au sein de l’Otan.

Voici les principaux sujets qui les divisent:

Fethullah Gülen

La présence aux Etats-Unis depuis 1999 du prédicateur turc Fethullah Gülen est probablement le principal objet de la colère d’Ankara. La Turquie accuse en effet cet ancien allié du président Recep Tayyip Erdogan d’avoir fomenté le putsch manqué du 15 juillet 2016, et traque depuis sans relâche ses partisans. La Turquie a demandé à plusieurs reprises l’extradition de M. Gülen, qui dément toute implication dans le coup d’Etat raté. Mais à ce jour, ces demandes sont restées lettre morte. « La question est y a-t-il des preuves suffisamment claires de l’implication personnelle de Fethullah Gülen?« ,a affirmé fin juillet un haut responsable américain.

Américains détenus en Turquie

La détention pendant un an et demi puis le placement en résidence surveillée d’un pasteur américain, Andrew Brunson, la semaine dernière, a été l’affaire qui a fait éclater la crise actuelle entre Ankara et Washington. M. Brunson, qui dirigeait une église protestante à Izmir, est accusé d’espionnage et d’avoir agi pour le compte du réseau de Fethullah Gülen, mais aussi pour le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Ces deux organisations sont considérées comme terroristes par la Turquie. C’est en appelant à sa libération immédiate que Washington a menacé la Turquie de sanctions, avant de mettre cette menace à exécution dès mercredi soir. Outre M. Brunson, deux employés locaux des missions américaines en Turquie sont en détention et un autre en résidence surveillée.

Le procès Halkbank

En mai, Mehmet Hakan Atilla, ex-directeur général adjoint de la banque publique turque Halkbank, a été condamné par un tribunal américain à 32 mois d’emprisonnement pour fraude bancaire et conspiration dans une affaire impliquant des milliards de dollars. Il a fait appel et Ankara a vivement protesté après sa condamnation. Cette affaire fait planer la menace d’une amende colossale contre Halkbank, une perspective qui inquiète le pouvoir turc. Un homme d’affaires turco-iranien, Reza Zarrab, est au coeur de cette affaire explosive. Lors du procès, il a impliqué le président Erdogan et des ministres du gouvernement turc.

Ankara a qualifié ce procès de « complot » manigancé par Fethullah Gülen.

Les milices kurdes en Syrie

La Turquie ne cesse de reprocher aux Etats-Unis le soutien apporté en Syrie aux Unités de protection du peuple kurde (YPG) pour lutter contre le groupe Etat islamique (EI). Ankara considère en effet cette milice comme une émanation du PKK, classé « terroriste » par la Turquie mais aussi les Etats-Unis. Après une première offensive en 2016 visant les combattants kurdes et les jihadistes, la Turquie a lancé cette année une opération pour déloger les YPG de l’enclave syrienne d’Afrine. Elle a menacé d’étendre cette offensive vers Minbej où sont stationnés des soldats américains. Mais Ankara et Washington se sont accordés sur une « feuille de route » prévoyant le retrait des YPG de Minbej et l’instauration de patrouilles conjointes. La Turquie a assuré en début de semaine que cet accord ne serait pas affecté par les tensions actuelles. « Je ne vois pas comment (cette feuille de route) pourrait fonctionner avec les sanctions imposées à la Turquie », estime toutefois Asli Aydintasbas, chercheuse au European Council on Foreign Relations.

Le rapprochement entre Ankara et Moscou

Ankara et Moscou coopèrent étroitement sur le dossier syrien, mais le principal sujet d’inquiétude pour Washington est l’accord conclu pour l’achat par la Turquie de systèmes de défense antiaérienne russe S-400, incompatibles avec les systèmes de défense de l’Otan. Le Congrès américain a approuvé mercredi un budget interdisant au Pentagone de remettre à la Turquie le moindre avion de combat F-35 tant qu’Ankara ne se sera pas engagé à ne pas finaliser ses négociations pour l’achat de S-400. Mais M. Kalin a affirmé cette semaine qu’Ankara disposait de moyens de recours légaux pour s’opposer à ce blocage.

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