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Brésil: les huit moments-clés de la chute de Dilma Rousseff

La présidente du Brésil Dilma Rousseff a été destituée mercredi par le Sénat pour maquillage des comptes publics mais garde ses droits civiques, ce qui lui permettra d’exercer une fonction publique.

Dans le cadre d’un second vote où une majorité des deux tiers (54) était également requise, 42 sénateurs ont voté pour qu’elle conserve ses droits, 30 contre et trois se sont abstenus, a indiqué le président du Tribunal suprême fédéral (STF) Ricardo Lewandowski.

La présidente brésilienne destituée du Brésil Dilma Rousseff a dénoncé mercredi « un coup d’Etat parlementaire » commis par le Sénat. S’exprimant après le vote des sénateurs qui ont décidé à une large majorité de l’écarter du pouvoir, Dilma Rousseff a prévenu qu’elle « reviendrait ».

« Nous reviendrons », a-t-elle lancé, avant d’ajouter: « Il ne s’agit pas d’un adieu, mais d’un ‘à bientôt' ». Dilma Rousseff n’a pas perdu ses droits civiques malgré son éviction. Les parlementaires l’ont reconnue coupable de maquillage des comptes publics, motif de sa destitution. Le Sénat a pris une décision qui entre dans l’histoire des grandes injustices. Il a commis un coup d’Etat parlementaire », a déclaré l’ancienne guérillera de 68 ans, réaffirmant son « innocence ». La dirigeante de gauche avait été élue en 2010 à la tête du plus grand pays d’Amérique latine.

Michel Temer, nouveau président

Michel Temer a prêté serment mercredi comme nouveau président du Brésil, quelques heures après la destitution de Dilma Rousseff, marquant la fin de 13 ans de gouvernements de gauche dans le plus grand pays d’Amérique latine.

Levant la main droite et posant l’autre sur la Constitution brésilienne, M. Temer, du parti PMDB (centre droit), a été investi dans ses fonctions lors d’une courte cérémonie au Sénat.

Corruption, crise économique et tensions au sein de la coalition gouvernementale ont marqué le second mandat tourmenté de Dilma Rousseff. Voici huit moments-clés de la crise politique historique qui ont abouti à la destitution de la présidente de gauche.

L’économie chute, sa popularité aussi

La plus grande économie d’Amérique latine est en récession depuis le deuxième trimestre 2015 avec un cocktail qui combine hausse de l’inflation, chômage et profonde détérioration des comptes publics.

L’activité se contracte de 3,8% en 2015, et la crise finit par affecter Mme Rousseff, qui enregistre des taux d’impopularité record.

Lula réveillé par la police

Le 4 mars 2016, l’ex-président Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010), fondateur du Parti des travailleurs (PT, gauche) au pouvoir et père de Mme Rousseff en politique, est réveillé par la police. Il sera brièvement interpellé et interrogé dans le cadre de l’enquête sur le scandale de corruption entourant le géant public pétrolier Petrobras.

Au cours des mois suivants, il sera successivement inculpé pour tentative d’entrave à la justice, corruption passive et blanchiment d’argent dans ce dossier.

‘Dilma dehors !’

Le 13 mars 2016, trois millions de Brésiliens défilent dans tout le pays aux cris de « Dilma dehors ! » lors de manifestations d’ampleur historique. C’est l’apogée de mois de mobilisations orchestrées par l’opposition de droite pour demander le départ de Dilma Rousseff ou protester contre la corruption.

Le scandale Petrobras éclabousse tout autant le PT – mais pas directement Mme Rousseff – que le PMDB de Michel Temer et la majeure partie de l’élite politique.

Lula ministre, une manoeuvre osée

Dilma Rousseff nomme le 16 mars 2016 Lula chef de cabinet (quasi Premier ministre). Le soir-même, le juge Sergio Moro, en charge du dossier Petrobras, divulgue l’enregistrement d’une conversation téléphonique entre la présidente et Lula suggérant que la nomination de ce dernier a pour objectif de le protéger d’une possible mise en détention.

Sa nomination sera bloquée le jour-même par la justice.

La coalition explose

Fin mars 2016, la crise redouble d’intensité lorsque la direction du PMDB, pilier de la coalition gouvernementale, claque la porte, poussé par son dirigeant Michel Temer.

Cette décision entraînera une réaction en chaîne : d’autres alliés politiques quittent le navire présidentiel. Le sort de la présidente est presque scellé.

Défaite dans les deux chambres

En avril, les députés approuvent à une écrasante majorité la procédure de destitution de Mme Rousseff et son renvoi au Sénat.

Le sénat réagit après la séance de vote de démission de la présidente Dilma Rousseff.
Le sénat réagit après la séance de vote de démission de la présidente Dilma Rousseff. © REUTERS

Le 12 mai, la présidente est temporairement écartée du pouvoir par un vote historique du Sénat ouvrant la voie à son procès en destitution qui s’est ouvert jeudi. Son vice-président Michel Temer, 75 ans, qu’elle accuse d’avoir monté un « coup d’État » parlementaire, assume la présidence par intérim. En cas de destitution, il restera à la tête du pays jusqu’aux élections législatives et présidentielle de fin 2018.

‘Votez contre ma destitution’

Le 29 août, Dilma Rousseff fait la preuve de sa combativité en venant assurer elle-même sa défense au Sénat, avant de répondre, patiemment et calmement, pendant plus de 14 heures aux questions des parlementaires.

Rappelant avec émotion qu’elle a été emprisonnée et torturée sous la dictature militaire, l’ancienne guérillera de 68 ans dit craindre « la mort de la démocratie ».

« Votez contre la destitution, votez pour la démocratie », lance-t-elle en guise de conclusion aux 81 sénateurs, dont plus de la moitié sont soupçonnés de corruption ou visés par une enquête.

Au Sénat, le couperet tombe

Le 31 août, 61 sénateurs – plus que les deux tiers requis – votent pour la destitution de la dirigeante de gauche. Seuls 20 votent contre. Dilma Rousseff est alors définitivement écartée de la présidence, laissant la place à Michel Temer.

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