Jair Bolsonaro. © Reuters

Bolsonaro défie encore Macron et sème la confusion sur l’aide à l’Amazonie

Le Vif

Le président brésilien Jair Bolsonaro a de nouveau alimenté la polémique mercredi avec le président français Emmanuel Macron, semant la confusion quant à l’aide internationale que le Brésil serait prêt à recevoir pour lutter contre les incendies en Amazonie.

Il a également accusé « l’Allemagne, et particulièrement la France, d’être en train d’acheter (la) souveraineté brésilienne » avec l’offre d’aide du G7 contre les incendies qui font rage dans la plus grande forêt tropicale du monde.

Ces incendies sont loin d’être « sous contrôle », contrairement à ce qu’affirme le gouvernement depuis plusieurs jours : 1.044 nouveaux départs de feu ont été constatés mardi dans tout le Brésil, dont plus de 50% en Amazonie, a indiqué mercredi l’Institut national de recherche spatiale (INPE). Le nombre feux de forêt depuis janvier dans le pays (83.329), est le plus élevé depuis 2010, selon l’INPE. Ils sont souvent provoqués par des agriculteurs ou éleveurs de bovins qui veulent plus de terres, et que la politique du gouvernement actuel encourage.

Après avoir reçu le président chilien Sebastian Piñera, invité à Biarritz (France) en marge du G7 le week-end dernier, Jair Bolsonaro, qui ne s’est toujours pas rendu en Amazonie, a fait des déclarations belliqueuses et créé la confusion. On ignorait si le Brésil, qui a rejeté l’aide financière du G7 mardi matin en attendant que M. Macron « retire ses insultes » contre M. Bolsonaro, puis l’a acceptée mardi soir sous certaines conditions, l’a effectivement de nouveau rejetée mercredi matin.

M. Macron « m’a traité de menteur et à deux reprises a dit que la souveraineté (brésilienne sur) l’Amazonie devait être relativisée », a dit Jair Bolsonaro à des journalistes. « Nous pourrons nous parler quand il se sera rétracté après ce qu’il a dit contre ma personne. » Les dramatiques incendies qui sévissent en Amazonie ont provoqué une crise diplomatique entre Brasilia et Paris, qui menace de ne pas signer l’accord de libre-échange UE-Mercosur. M. Macron avait accusé la semaine dernière M. Bolsonaro d’avoir « menti » sur ses engagements environnementaux. La France a été copieusement attaquée par ailleurs par le gouvernement brésilien, et M. Bolsonaro a traité de M. Macron de « colonialiste » avant de s’en prendre à son épouse Brigitte. Mercredi, M. Bolsonaro a retiré un commentaire offensant pour Mme Macron publié sur Facebook afin d' »éviter une mauvaise interprétation », a indiqué le porte-parole du président brésilien.

« Le Brésil n’est pas à vendre »

Au grand dam de Brasilia, Emmanuel Macron s’était aussi interrogé sur l’opportunité de conférer un statut international à la forêt amazonienne, au cas où les dirigeants de la région prendraient des décisions nuisibles pour la planète. « Il est important de redire que l’Amazonie du Brésil est sous souveraineté brésilienne », a martelé M. Bolsonaro, dont le pays abrite 60% de la gigantesque forêt tropicale. « Le Brésil n’est pas à vendre pour 20 millions (de dollars), ni 20 milliards », a-t-il poursuivi. Il a toutefois ajouté que « le Brésil peut accepter toute aide bilatérale ». M. Bolsonaro a également signé mercredi un décret interdisant les brûlis agricoles dans tout le pays pendant soixante jours.

Le président chilien Sebastian Piñera a apporté mercredi son soutien au Brésil: « il faut se souvenir que certaines années il y a eu des incendies bien pires », a-t-il dit, reprenant des propos de Jair Bolsonaro. « Nous aimons tous l’Amazonie, les neuf pays (qui l’abritent) y exercent leur souveraineté », à dit M. Piñera. Il a annoncé l’envoi de quatre avions du Chili, qui vont s’ajouter à la quinzaine d’appareils que le Brésil a déployés depuis le week-end dernier, avec 2.500 soldats.

A Washington, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale Garrett Marquis a lui aussi affirmé dans un tweet que « les Etats-Unis se tiennent prêts à assister le Brésil dans ses efforts pour combattre les incendies ». Le Brésil a accepté une proposition du Pérou et de la Colombie d’un sommet régional le 6 septembre dans une ville frontalière des trois pays pour coordonner la préservation de l’Amazonie.

Dans l’Etat de Rondônia (nord-ouest), l’un des plus affectés par les incendies, la capitale Porto Velho se retrouvait sous un couvercle de fumée. La Bolivie frontalière connaît également des incendies dramatiques qui ont entraîné la suspension de la campagne électorale.

Par ailleurs, plusieurs marques internationales de l’habillement ont menacé de suspendre leurs achats de cuir brésilien en raison de la politique environnementale menée par le Brésil en Amazonie, une mesure qui ne s’est toutefois « pour l’heure » pas concrétisée selon les professionnels du secteur. « Nous avons reçu récemment avec beaucoup d’inquiétude un communiqué nous informant de la suspension des achats de cuir au Brésil de certains importateurs mondiaux parmi les plus importants », écrit le Centre des industries de tannerie du Brésil, cité par le journal Folha de S.Paulo.

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