Manifestants contre les violences sexuelles faites aux femmes à l'occasion du premier anniversaire du viol collectif d'une jeune femme à Delhi le 16 décembre 2012. Delhi, décembre 2013 © Reuters

Avant ses 20 ans, plus d’une fille sur dix est déjà victime de violence sexuelle

Le Vif

Environ 120 millions de filles de moins de 20 ans dans le monde, soit un peu plus d’une sur dix, ont subi à un moment ou à un autre de leur vie une forme de violence sexuelle (rapports sexuels forcés ou d’autres actes sexuels forcés).

Ce chiffre n’est qu’un des éléments dévoilés jeudi par un nouveau rapport de l’Unicef sur la violence envers les enfants, intitulé « Cachée sous nos yeux » et basé sur des données en provenance de 190 pays.

Le rapport constitue « la plus importante collecte de données jamais effectuée » sur le sujet, indique l’Unicef. Il révèle avant tout « l’ampleur stupéfiante » des sévices divers infligés aux enfants, « dans chaque pays et communauté du monde ». Le but final étant de mieux comprendre le phénomène, jusqu’ici peu documenté, pour ensuite dégager des pistes de prévention.

La violence envers les enfants n’est en effet pas « un problème individuel », prévient l’Unicef. Il est également faux de croire qu’il s’agit d' »un phénomène marginal, qui n’affecte que certaines catégories d’enfants et qui n’est perpétré que par des contrevenants biologiquement prédisposés aux comportements violents ». Le Fonds des Nations Unies pour l’Enfance la définit comme « un problème sociétal, induit par les inégalités économiques et sociales et les faibles niveaux d’instruction », « alimentée par des normes sociales considérant la violence comme un moyen acceptable de résoudre les conflits ».

Concernant la violence sexuelle envers les fillettes et adolescentes de moins de 20 ans, des taux de prévalence de 10 % ou plus sont observés dans 13 des 18 pays d’Afrique subsaharienne où des données sont disponibles, ressort-il du rapport. Une autre forme de violence touchant prioritairement des enfants de pays à revenu faible et intermédiaire est l’homicide. En 2012, environ 95.000 jeunes (de moins de 20 ans) ont ainsi été tués de par le monde, le Nigeria enregistrant le plus grand nombre d’homicides de ce type (13.000), devant le Brésil (11.000).

D’autres violences répandues sont les châtiments corporels dans le cadre de la discipline. « Environ 6 enfants sur 10 dans le monde (presque un milliard) âgés de 2 à 14 ans sont soumis à des châtiments physiques infligés par les personnes qui s’occupent d’eux de manière régulière », indique le rapport. Dans la plupart des pays, ces violences sont davantage considérées comme « nécessaires » pour l’éducation de l’enfant dans les familles où les adultes sont peu ou pas instruits. L’âge de l’enfant avançant, ce sont en général ses camarades de classe et/ou ses partenaires intimes qui prennent le relais de la violence. « Près d’un tiers des adolescents en Europe et en Amérique du Nord ont admis avoir intimidé des jeunes de leur âge, avec une prévalence allant d’environ un sur sept (14 %) en République tchèque et en Suède à près de six sur dix (59 %) en Lettonie et en Roumanie », illustre le rapport de l’Unicef.

Chez les jeunes filles mariées, la violence au sein du couple supplante ensuite les autres formes de châtiments. Dans le monde, près d’une adolescente sur trois âgée de 15 à 19 ans et engagée dans une union officielle a été victime de violences émotionnelles, physiques et/ou sexuelles commises par son mari ou partenaire. Les taux de violence au sein du couple sont particulièrement élevés en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud, en Amérique latine et aux Caraïbes, selon les chiffres rassemblés par l’Unicef.Constat étonnant: peu importe le type de violence subie ou les circonstances, la plupart des victimes, filles ou garçons, gardent le secret et ne demandent pas d’aide. De nombreuses victimes pensent d’ailleurs que ce qu’elles subissent est « justifié » ou ne constitue pas un problème. Ainsi, en matière de violence au sein du couple, près de la moitié des adolescentes de 15-19 ans du monde entier pensent qu’un mari ou compagnon a parfois le droit, en fonction des circonstances, de battre sa femme/partenaire. Cette proportion atteint même 80 % en Afghanistan, en Guinée, en Jordanie, au Mali et au Timor-Leste. Principale circonstance citée (par les deux sexes) comme justifiant un passage à tabac de l’épouse: le fait qu’elle néglige les enfants.

Dans le même ordre d’idée, des enquêtes menées sur la perception par la population des conséquences des violences sexuelles envers les enfants ont mené à des résultats étonnants dans certains pays. « En Norvège, par exemple, une étude sur l’ensemble de la population a montré que les personnes interrogées n’étaient pas certaines que le contact sexuel soit préjudiciable à l’enfant. Au Nigéria, 61 % des parents interrogés pensaient que les violences ne pouvaient avoir d’impact grave sur la santé qu’en cas de rapport sexuel », indique le rapport.

A noter que, comme les données présentées ne proviennent que des victimes ayant accepté de se faire connaître comme telles, elles ne représentent qu’une estimation minimale du problème, le sommet visible d’un iceberg sans doute bien plus impressionnant.

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