Cérémonie de prise de pouvoir du colonel Joseph Désiré Mobutu, le 12 décembre 1965 : deux Congolaises se jettent à ses pieds et essuient ses chaussures. © reporters

24 novembre 1965 : Le coup d’état du « Léopard » Mobutu

Il n’a que 35 ans mais possède déjà une longue expérience. Militaire, journaliste, politique, il a tâté de tout. Avec intelligence et débrouillardise, il s’est hissé jusqu’au sommet de l’armée. Mais il n’a pas encore atteint le sommet de ses ambitions.

Il faut dire que celles-ci sont sans limites. Ce jour-là, quand il lance son coup d’Etat, il ne veut pas seulement prendre la tête de son pays. Quoi qu’il en dise, il veut aussi le mettre sous sa coupe.

Rébellions, stabilisation, pseudo-normalisation, sécessions… C’est au son d’un rythme fou que balance le Congo dans les années qui suivent son indépendance. Dès juillet 1960, quelques jours après avoir acquis sa souveraineté, le pays plonge déjà dans la violence. Au Katanga et au Kasaï, de puissantes forces indépendantistes donnent le ton. Et déchirent le jeune Etat. Début 1961, pas moins de quatre autorités différentes prétendent incarner le seul pouvoir légitime ! En 1963, le calme revient. Mais dès 1964, de nouvelles rébellions mettent à mal l’autorité centrale. Qui se trouve elle-même affaiblie par les rivalités auxquelles s’adonnent le président Kasa-Vubu et le Premier ministre Moïse Tshombe.

C’est dans ce contexte que jaillit l’homme providentiel. Qui n’est pas n’importe qui. Dès 1960, le jeune officier Mobutu était déjà sorti de l’ombre. Après avoir été un proche du Premier ministre Lumumba, il avait retourné sa veste, très provisoirement pris le pouvoir, et participé à l’élimination du chef du gouvernement. Au passage, il avait été nommé chef d’état-major de l’armée congolaise. Et s’était forgé une réputation d’incontournable.

A l’automne 1965, son heure est venue. Mobutu a brillamment réorganisé les forces militaires de son pays. Subtilement, il s’est aussi acquis de larges soutiens dans les réseaux belges et américains. Auprès desquels, élégant, éloquent, il montre son plus beau visage.  » Il manquait de discipline chez nos hommes politiques, clame-t-il au lendemain de son coup d’Etat. Pendant cinq ans, nous allons l’instaurer dans tous les domaines : politique, économique, financier « . Cinq années qui se transformeront en un long règne de trente ans.

Il se présente comme un modéré. Chantre de la cohésion nationale, il promet le bonheur pour tous. Mais ne tarde pas à présenter son vrai visage. Au printemps 1966,  » l’homme-léopard  » fait pendre quatre hommes politiques accusés de comploter contre le régime. En 1967, il fonde le Mouvement populaire de la révolution. Un parti politique ? Non : le parti. Unique. Auquel, dès sa naissance, tout Congolais appartient.

Les Occidentaux l’acclament. En ces temps de guerre froide, ils sont plus soucieux de voir le vaste Etat africain demeurer dans leur sphère d’influence que d’assurer le respect des droits de l’homme. Le général de Gaulle autant que le roi Baudouin se montreront séduits. Mais avec le temps, le charme finira par s’évanouir. Plus le dictateur sera fort, plus il sera seul. Contraint à l’exil, il mourra du cancer. Et d’avoir perdu sa couronne.

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