En 2000, Frans-Jos Verdoodt, fils de collaborateur, demande pardon pour les fautes commises au nom du nationalisme flamand. © Danny Gys/photo news

20 mars 2002 : la Flandre regarde son passé de guerre

Enterrer la hache de guerre avec le passé : tel est l’objectif poursuivi par cette résolution. Le passé le plus trouble. Celui qui démange la Flandre depuis un demi-siècle. Qui forge les clichés, forme les consciences et déforme les souvenirs. Qui pourrit le dialogue entre le nord et le sud. Car oui, le nationalisme flamand a largement flirté avec le nazisme pendant la Seconde Guerre mondiale. Mais non, toute la Flandre ne fut pas collabo. Et oui, l’épuration connut aussi ses excès. Voilà pourquoi, en ce 20 mars 2002, le parlement flamand vote un décret relatif aux « recommandations sur l’approche du passé de guerre de la Flandre ».

Les faits sont connus. Dans les années qui suivent la fin de la guerre, 0,73 % des Flamands et 0,52 % des francophones sont condamnés pour collaboration. Le constat est clair : cette dernière n’a épargné aucune des deux grandes communautés nationales. Pourtant, les traces laissées dans les mémoires divergent rapidement. Au sud, on veille à  » oublier  » les faits, les réduisant aux excès commis par Léon Degrelle. Au nord, au contraire, certains nationalistes portent haut la mémoire des collabos, en faisant des victimes ou des héros.

En mai 1996, Herman Suykerbuyk met le feu aux poudres. Le parlementaire CVP dépose une proposition de décret visant à indemniser les victimes de guerre. Mais la perspective sociale se double d’une intention trouble. Car les victimes visées sont autant les anciens combattants que celles de la répression. Patriotes et inciviques sur un même pied ? Alors que le parlement flamand vote le texte, les associations d’anciens résistants condamnent l’amalgame. Le 21 juillet 1998, certaines boycottent même le défilé national, place des Palais ! Les francophones, eux, crient au scandale :  » Ce n’est pas en Wallonie que l’on entend indemniser les collaborateurs de l’occupant nazi « , clame le ministre- président Robert Collignon. La cour d’arbitrage remet la balle au centre : arguant que les victimes de guerre relèvent de la compétence fédérale, elle annule le décret.

Dans la foulée de l’affaire, le groupe Voorwaarts voit le jour. Son objectif est de poser un jugement lucide et serein sur le passé. En 2000, à l’occasion du pèlerinage de l’Yser, Frans-Jos Verdoodt, historien et fils de collaborateur, demande pardon pour les fautes commises au nom du nationalisme flamand. Si les radicaux y voient un excès, les modérés s’engouffrent dans la brèche. Après la tenue d’un colloque scientifique consacré à la thématique, l’affaire revient au parlement flamand. Le 20 mars 2002, une résolution équilibrée y est votée, qui condamne la collaboration et reconnaît certains dérapages de la répression.

Affaire classée ? Cela reste à voir. Au nord du pays, certains extrêmes se complaisent toujours à déraper sur ce passé glissant. Et au sud, on se plaît parfois encore à faire semblant de croire que la collaboration n’a touché que les Flamands. Sans doute n’est-ce pas en s’inspirant de ces pages d’histoire que la Belgique parviendra à s’inventer un avenir commun…

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