Angela Merkel et Emmanuel Macron © BELGAIMAGE

UE: la brouille franco-allemande menace le sommet des nominations

Le Vif

Le sommet des nominations aux postes de pouvoir dans l’UE le 20 juin court à l’échec si les chefs de gouvernement et le Parlement continuent de s’opposer sur la personnalité appelée à prendre la présidence de la Commission de Bruxelles, ont averti plusieurs responsables européens.

« Ce n’est pas facile, car la situation politique au sein de l’Union européenne est complexe et nous avons besoin d’un accord avec le Parlement », a reconnu mardi le ministre allemand des Affaire européennes Michael Roth lors d’une réunion avec ses homologues à Luxembourg.

Désaccord au sommet

« Un accord entre la France et l’Allemagne est impératif pour débloquer la situation », mais « Angela Merkel n’est pas dans une situation facile sur le plan intérieur », ont confié à l’AFP deux diplomates de haut rang sous couvert de l’anonymat. « Le sommet du 20 juin ne sera pas décisif », ont-ils estimé. La chancelière, à la tête d’une coalition qui soutient deux prétendants différents, l’a laissé entendre lundi. « Nous prendrons les décisions nécessaires avec calme, mais aussi avec détermination, au plus tard au moment où le Parlement entrera en fonction et élira un président », a-t-elle déclaré.

Le nouveau Parlement doit élire son président lors de sa session inaugurale le 2 juillet. En cas d’échec le 20 juin, une réunion de crise pourrait être convoquée le lundi 1er juillet, au retour des dirigeants européens d’un sommet du G20 au Japon. L’accord sur la présidence de la Commission européenne conditionne toutes les autres nominations. « S’il n’y a pas d’accord sur le président de la Commission, il n’y aura pas d’accord du tout », a expliqué un vieux routier du Parlement européen. Les autres postes sont la présidence du Parlement, celle du Conseil, le chef de la diplomatie et la présidence de la Banque Centrale Européenne.

Le nouveau chef de l’exécutif bruxellois doit obtenir le soutien de 21 des 28 chefs d’Etat et de gouvernement et la majorité des suffrages du Parlement européen, soit au moins 376 voix. La prise de décision est compliquée par les mauvaises relations entre le président français Emmanuel Macron et la Chancelière allemande Angela Merkel, opposés sur les candidats en lice, souligne un diplomate de haut rang.

Angela Merkel soutient la revendication du Parti Populaire Européen d’obtenir le poste et défend son candidat, le Bavarois Manfred Weber, 46 ans, élu comme leur « spitzenkadidat » (tête de liste) par les partis du PPE lors d’un congrès à Helsinki avant les Européennes. Mais Emmanuel Macron bloque sa désignation. Il considère que Manfred Weber n’a ni l’expérience ni l’autorité requises pour diriger l’exécutif bruxellois. Il lui reproche également sa conception des rapports entre les institutions de l’UE, car elle rend la Commission dépendante du Parlement européen, explique-t-on à Paris. Une dizaine d’Etats membres partagent les objections du président Macron, selon une source française.

Le Parlement européen joue sur ces dissensions pour affirmer son pouvoir. Si les dirigeants européens parviennent à imposer un candidat non élu par les groupes, « le Parlement est mort politiquement », ont expliqué à l’AFP plusieurs chefs de groupes.

« Planche de salut » pour Weber

Une course contre le Conseil a été lancée au Parlement au lendemain des Européennes. Les quatre groupes pro-européens (le PPE, les Socialistes, les Libéraux et les Verts) travaillent sur un programme de coalition et cherchent à constituer une majorité en soutien du spitzenkadidat jugé le plus à même de travailler avec le Parlement. Un objectif qui ne sera pas atteint pour le sommet et s’annonce très compliqué à obtenir. L’Allemand « Manfred Weber y voit une planche de salut pour s’imposer au Conseil », a expliqué un membre du groupe socialiste qui défend son candidat, le Néerlandais Frans Timmermans.

Les dirigeants européens cherchent une parade, mais aucun des deux autres spitzenkadidat, Frans Timmermans et la Danoise Margrethe Vestager pour la famille Libérale, ne fait pour l’instant consensus, ont expliqué plusieurs diplomates à Bruxelles. Et les tensions franco-allemandes compliquent aussi la désignation d’un non-candidat. « Si la France bloque la candidature de Manfred Weber, Angela Merkel ne pourra jamais accepter la désignation d’un Français pour la Commission », ont averti les responsables du PPE, douchant les espoirs de Michel Barnier, pourtant membre du PPE.

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