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Le rassemblement des « gilets jaunes » contre hausse des taxes et pouvoir d’achat, du jamais vu

Le Vif

Les « gilets jaunes » ont commencé à se rassembler samedi à l’aube pour bloquer routes et points stratégiques à travers le pays lors d’une « mobilisation générale » citoyenne inédite contre la hausse des prix des carburants, une initiative partie des réseaux sociaux qui inquiète le gouvernement.

« Gilets jaunes, colère noire »: à proximité du périphérique parisien, proche de la porte Maillot, des manifestants munis de quelques pancartes s’étaient regroupés avant 7H00 du matin, tandis que de l’autre côté de la capitale, quai de la Rapée, une trentaine de VTC se rassemblaient, a indiqué une source policière.

Environ 1.500 actions sont attendues sur le territoire- blocage de routes, de supermarchés, de stations essence -, dont seules une centaine auraient été déclarées, selon une source policière.

Paralyser le pays en empêchant toute dépense, c’est le moyen de pression envisagé par les « gilets jaunes ».

« Il est prévu que des gens arrivent tout au long de la journée à Paris », explique Steve, 31 ans, chauffeur de taxi dans la capitale. « Les CRS nous bloquent par endroits mais on va trouver les points d’entrée pour faire une opération escargot sur le périphérique ».

A l’initiative de cette grogne, des membres de la société civile qui se sont mobilisés contre la hausse du prix des carburants avant que les motifs de grief ne s’élargissent à une dénonciation plus globale de la politique du gouvernement en matière de taxation et à la baisse du pouvoir d’achat.

Au 1er janvier 2019, les taxes sur le gazole doivent augmenter de 6,5 centimes d’euro par litre et celles sur l’essence de 2,9 centimes.

Ce « ras-le-bol général du peuple » – comme l’expliquait jeudi Kévin Dujardin, « un Gaulois de Calais » de 27 ans – « c’est un mouvement apolitique, asyndical (…) Si des politiques viennent, on les boycotte. Vous venez avec des drapeaux syndicaux ? On les brûle sur place ».

Jacline Mouraud, Priscillia Ludosky, Tristan Lozach ou Thierry Marre: ces parfaits inconnus, il y a peu, ont utilisé la force de frappe des réseaux sociaux pour fédérer les mécontentements.

Et leur pari semble jusqu’ici avoir fonctionné: d’après un sondage Odoxa réalisé cette semaine pour France Info et le Figaro, les trois-quarts des Français soutiennent le mouvement et 15% projettent d’y participer.

600 villes touchées

Déconcerté par ce mouvement de défiance citoyenne spontanée dont il ne connaît pas encore l’étendue, l’exécutif a tenté mercredi d’enrayer la mobilisation avec des mesures.

Inflexible sur la taxe carbone – et notamment sur les carburants – Edouard Philippe a proposé la mise en place d’une surprime (pouvant aller jusqu’à 4.000 euros) à la conversion pour les foyers modestes ou les gros rouleurs, l’élargissement du chèque énergie, un dispositif d’aide pour les dépenses d’électricité et de gaz.

Le Nord-Pas-de-Calais et l’Alsace sont les deux régions où la mobilisation devrait être la plus forte, d’après une autre source policière, qui précise que plus de 600 villes seront touchées.

« C’est paradoxal, on a les renseignements puisque tout est sur les réseaux sociaux, mais on ne connaît pas la mobilisation, on ne sait pas combien de personnes répondront aux appels », a expliqué un haut fonctionnaire de Beauvau.

« Bloquer un pays » n’est « évidemment pas acceptable », a prévenu vendredi le Premier ministre, qui sera à Matignon toute la journée de samedi, d’où il suivra la mobilisation, selon son entourage.

A Beauvau, on se veut rassurant: « on sera attentif au risque de blocage, au risque d’infiltration. Nous abordons cette journée de manière très sereine et très concentrée », a déclaré Laurent Nuñez, le secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Intérieur.

L’exécutif n’a cessé de mettre en garde contre la récupération politique alors que certains politiques ont annoncé leur participation aux manifestations – le président des Républicains, Laurent Wauquiez, le chef de file de La France Insoumise Jean-Luc Mélenchon et le président de Debout la France Nicolas Dupont-Aignan, comme certains élus RN, mais pas leur présidente Marine Le Pen.

A Nice, le député LR des Alpes-Maritimes Eric Ciotti a matérialisé son soutien aux gilets jaunes en organisant vendredi une table-ronde pour recueillir les doléances des taxis, infirmiers libéraux en zone rurale, médecins, chefs d’entreprise, artisans ou routiers.

A l’inverse, la gauche et les Verts se retrouvent dans une position délicate entre défense du pouvoir d’achat et transition écologique.

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