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Le centenaire de l’armistice en images

Muriel Lefevre

Le président américain, Angela Merkel, Vladimir Poutine, Benjamin Netanyahu, Recep Tayyip Erdogan, Justin Trudeau, Mohammed VI ont assisté peu après 10H00 GMT à une grande cérémonie sous l’Arc de Triomphe, en haut de la célèbre avenue des Champs-Elysées, sous lequel gît le soldat inconnu et brûle perpétuellement la flamme du souvenir, rappelant l’ampleur d’un conflit aux 18 millions de morts. Sous une pluie fine, le groupe des chefs d’Etat et d’organisations internationales ont d’abord pris place sous un abri au pied de l’Arc de Triomphe, survolés par des avions de la patrouille de France laissant un panache bleu blanc rouge. Donald Trump et Vladimir Poutine sont eux arrivés peu après, séparément du groupe de dignitaires qui avait remonté une partie des Champs-Elysées dans des cars.

M. Trump, arborant un bleuet de France, symbole français de la mémoire des anciens combattants, a salué son homologue Emmanuel Macron, la chancelière Angela Merkel et le roi du Maroc Mohammed VI. Vladimir Poutine, arrivé en dernier, a aussi tendu la main à ses homologues français, allemande, et à Donald Trump. Incident notable et rarissime, trois militantes Femen avaient auparavant forcé la sécurité pour s’approcher du convoi de Donald Trump, avant d’être interpellées.

– La « trahison » nationaliste –

« La sécurité du cortège et du président des Etats-Unis n’a été en rien menacée », a assuré le ministre français de l’Intérieur, Christophe Castaner. Le dispositif de sécurité était massif, avec quelque 10.000 membres des forces de l’ordre déployés. La dernière fois que Paris a accueilli autant de dignitaires remonte au 11 janvier 2015, après les attentats islamistes contre Charlie Hebdo et le magasin juif Hyper Cacher.

Le célèbre violoncelliste Yo-Yo Ma a joué du Bach, des lycéens ont lu des témoignages de 1918, et la chanteuse béninoise Angélique Kidjo a chanté en hommage aux troupes coloniales.

« Le patriotisme est l’exact contraire du nationalisme. Le nationalisme en est sa trahison », a souligné le président français dans un discours conjuguant mémoire de la Grande Guerre et affres contemporains, dénonçant le nationalisme dont se revendique Donald Trump et plaidant une fois encore pour une approche multilatérale de la gouvernance mondiale, à l’heure où de plus en plus de pays semblent enclin à lui tourner le dos.

Emmanuel Macron a ensuite ravivé la flamme du Soldat inconnu avant de converger avec des dizaines de dignitaires vers le palais présidentiel pour un déjeuner.

« C’est une très belle cérémonie, très émouvante », a commenté aux côtés de son fils de 3 ans Jessie Rumbaugh, 25 ans, originaire de l’Idaho aux États-Unis, venue spécialement pour le centenaire, célébré aussi en d’autres points du globe, en Australie, en Inde, ou à Londres.

– Homard de Bretagne –

« Mon grand-père a fait la Première Guerre mondiale », expliquait non loin Nevan Lancaster, Néo-zélandais de 47 ans. « Il est mort quand j’avais 8 ans. Je suis là pour lui ». Autour de homard de Bretagne, volaille et pommes de terre de la Somme, Vladimir Poutine et Donald Trump ont longuement échangé, aux côtés d’Emmanuel Macron et du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres, selon l’Elysée. Une « bonne » conversation, a déclaré M. Poutine à un média russe.

Après le déjeuner, Donald Trump s’est rendu au cimetière américain de Suresnes, en banlieue parisienne, pour rendre hommage à ses concitoyens tombés, au lendemain d’un rendez-vous manqué à Bois Belleau, haut lieu de la mémoire militaire américaine pendant la Première Guerre mondiale. Le déplacement du président à ce mémorial avait été annulé à cause de la météo empêchant l’hélicoptère présidentiel de voler, suscitant de vives critiques aux Etats-Unis.

Sous la pluie, le locataire de la Maison Blanche a « rendu hommage » aux « courageux Américains qui ont donné leur dernier souffle », avant de regagner l’aéroport.

Les autres dirigeants avaient eux rendez-vous dans l’Est parisien pour participer au Forum de la paix, deuxième temps fort de cette journée point d’orgue pour Emmanuel Macron, après une semaine de commémorations en France. A la grande halle de la Villette, aux côtés de représentants de la société civile, ils ont débattu de la gouvernance mondiale et affiché leur attachement au multilatéralisme, socle idéologique des relations internationales depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

– Funestes mises en garde –

En l’absence d’un se ses principaux contempteurs – Donald Trump -, plusieurs de ses plus fervents défenseurs, Emmanuel Macron, Angela Merkel et Antonio Guterres ont plaidé pro domo devant une assistance globalement acquise, dans une ambiance mêlant le forum de Davos et la COP21.Multilatéralisme et coopération apportent la paix et le progrès, ont-ils fait valoir, mettant en garde contre le nationalisme et l’unilatéralisme, pourvoyeurs selon eux de guerre et de malheur.

« Bien des éléments aujourd’hui me semblent emprunter et au début du XXe siècle, et aux années 30, laissant craindre un engrenage invisible », a jugé Antonio Guterres. « Nous voyons bien que la coopération internationale, un équilibre pacifique entre les intérêts des uns et des autres, et même le projet européen de paix sont de nouveau remis en question », a déploré Mme Merkel.

« Nous sommes fragilisés par les retours des passions tristes, le nationalisme, le racisme, l’antisémitisme, l’extrémisme, qui remettent en cause cet horizon que nos peuples attendent », a prévenu M. Macron. Dans la foule des Champs-Elysées, le Néo-Zélandais Nevan Lancaster ne dit pas autre chose: « Nous entrons dans un futur plus incertain. Je ne pense pas qu’après 70 ans de paix, nous en aurons 70 de plus ».

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