Gérald Papy

La méthode Macron est-elle compatible avec la radicalité de la jeunesse ?

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Si la résilience s’appliquait à la politique, Emmanuel Macron en serait le parangon. Sept mois après le déclenchement d’un mouvement des gilets jaunes qui l’a menacé jusqu’aux portes de son palais de l’Elysée, le monarque républicain a lancé, par l’entremise d’une nouvelle déclaration de politique générale de son Premier ministre, le mercredi 12 juin, l’acte II de son quinquennat presque comme si de rien n’était, en maintenant officiellement son cap.

La trentième mobilisation du samedi n’a rassemblé, il est vrai, qu’environ 10 000 personnes quatre jours plus tôt, un de ses plus bas niveaux, et le couperet symbolique des vacances d’été se rapproche…

Business as usual ? Soit les réponses sociales à la révolte des laissés-pour-compte de la France périphérique – quelque 17 milliards d’euros tout de même – ont rencontré le coeur de leurs revendications, soit les gilets jaunes n’étaient pas assez armés et structurés pour faire aboutir dans la durée leur cahier des charges plus politique, en matière de démocratie participative notamment, ce que l’absence d’impact de leur mouvement sur les élections européennes accrédite.

Autre élément d’explication, La République en marche et la gouvernance Macron se distinguent par une  » faculté d’adaptation  » au réel que les partis traditionnels peinent à développer. A la faveur des européennes, un nouvel électorat s’est substitué à celui qui avait porté Emmanuel Macron à la présidence deux ans plus tôt. Des partisans de la droite venus des Républicains ont remplacé des électeurs de gauche de LREM partis vers Europe Ecologie-Les Verts. Ce basculement inédit, motivé par les actes des deux premières années du pouvoir macroniste, tend à confirmer la  » trahison originelle  » d’Emmanuel Macron : censé transcender le clivage gauche-droite, il a mené une politique clairement de droite jusqu’à la révolte des gilets jaunes. La méthode de gouvernement, elle aussi, bouscule les repères. Le Premier ministre Edouard Philippe a renoncé à des mesures en faveur de la transition écologique (la hausse des taxes sur les carburants) pour répondre aux attentes sociales, gilets jaunes obligent. Il relance désormais l’action de son équipe en la parant de verts accents, succès des écologistes aux européennes aidant. Ces adaptations pourraient somme toute démontrer la faculté d’une équipe dirigeante à répondre aux demandes fluctuantes de la population si elles ne témoignaient pas d’une telle versatilité. Les électeurs in fine s’y retrouveront-ils ?

L’histoire dira si le président français a inauguré une nouvelle forme d’engagement politique, moins rigide et plus fluctuant, davantage en phase peut-être avec la démocratie individuelle qu’encouragent les réseaux sociaux et dont on mesure seulement aujourd’hui les dérives. Une étude de l’institut de sondages Ipsos et de l’entreprise de services numériques Sopra Steria a pointé la disposition des jeunes électeurs français à adhérer à  » la vague du moment « . Elle a indubitablement servi les écologistes de France, d’Allemagne et de Belgique. Dans le même temps, des politologues insistent sur le soutien des jeunes votants à des projets cohérents, y compris ceux, extrémistes, du Rassemblement national et du Vlaams Belang, et donc à une certaine radicalité, ce qui contredit l’option du gouvernement à la carte d’Emmanuel Macron. Le radicalisme d’extrême droite, on en observe la progression dans trois des cinq premières puissances économiques européennes, France, Royaume-Uni et Italie. Si on juge que le pari de la radicalité des jeunes est inscrit dans la durée, il est temps d’en promouvoir une autre, qu’elle soit écologiste ou à inventer.

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