Emmanuel Macron. © AFP

La France va fermer 14 réacteurs nucléaires d’ici 2035

Le Vif

La France, qui tire plus de 70% de son électricité du nucléaire, va progressivement fermer 14 de ses 58 réacteurs d’ici 2035, a annoncé mardi le président Emmanuel Macron, en fixant le cap énergétique du pays pour les 10 à 20 prochaines années.

Pris en tenailles entre les « gilets jaunes », ce mouvement de citoyens excédés par la hausse des taxes sur le carburant qui manifestent depuis plus d’une semaine en France, et les partisans d’une transition écologique rapide, le chef de l’Etat a présenté une stratégie à double détente.

« Nous devons entendre les protestations d’alarme sociale » mais « sans renoncer à nos responsabilités » car « il y a aussi une alarme environnementale », a-t-il lancé. « Fin du mois » et « fin du monde », « nous allons traiter les deux », a assuré M. Macron, en promettant un mécanisme visant à éviter les pics des prix sur les carburants ainsi qu’une vaste « concertation de terrain » sur la transition écologique. « Je ne veux pas qu’aux inégalités de revenus générées par la mondialisation s’ajoute pour nos concitoyens qui travaillent ou ont travaillé l’inégalité devant la transition écologique », a-t-il ajouté.

Le ministre de la Transition écologique François de Rugy recevra mardi après-midi des représentants des « gilets jaunes », à la demande d’Emmanuel Macron, a précisé la présidence. Outre sa réponse aux revendications des manifestants, le président était attendu sur un autre dossier sensible: la part du nucléaire dans le mix énergétique français.

A peine élu, Emmanuel Macron avait voulu se poser en champion de la lutte pour l’environnement, n’hésitant pas à détourner le slogan de campagne du président américain Donald Trump, en déclarant « Make our Planet Great Again » (« Rendez sa grandeur à notre planète »). Mais depuis, Nicolas Hulot, son emblématique ministre de la Transition écologique et fervent militant « Vert », a claqué la porte, regrettant de ne pas avoir « été entendu » et jetant le doute sur la détermination du gouvernement en matière écologique.

Mardi, Emmanuel Macron a fait de premières annonces visant à atteindre l’objectif gouvernemental de ramener à 50% la part du nucléaire dans la production d’électricité d’ici 2035, contre 71,6% en 2017. Avec 58 réacteurs répartis sur 19 sites, le parc nucléaire français est le deuxième plus important au monde, derrière celui des Etats-Unis (99 réacteurs). En plus de la fermeture « à l’été 2020 » des deux réacteurs de la centrale de Fessenheim, située à proximité de l’Allemagne et de la Suisse, le président français a annoncé la fermeture de 12 autres réacteurs. Quatre à six seraient arrêtés d’ici à 2030 et les réacteurs restant au plus tard en 2035.

Exercice d’équilibriste

Ce calendrier apparaît comme un compromis entre les voeux du ministre de la Transition écologique, qui voulait six arrêts en plus de Fessenheim d’ici 2028, et Bercy, qui plaidait pour repousser le début des fermetures à 2029. « On ne fait rien pendant ce quinquennat », a aussitôt déploré l’écologiste Yannick Jadot. C’est « le statu quo sur l’ère du nucléaire » et un « recul » sur les objectifs de fermeture , a jugé Audrey Pulvar, présidente de la Fondation pour la nature et l’homme (FNH).

D’autant que le gouvernement doit également respecter un autre engagement, celui de porter la part de l’énergie produite par des énergies renouvelables à 40% d’ici 2030. A cette fin, le soutien au développement des énergies renouvelables va passer de 5 milliards actuellement « à 7 à 8 milliards d’euros par an », a annoncé Emmanuel Macron. Le président a notamment évoqué un triplement de l’éolien terrestre et une multiplication par cinq du photovoltaïque d’ici 2030.

Ces annonces s’ajoutent à la fermeture des quatre dernières centrales à charbon d’ici 2022, qui est une nouvelle fois confirmée. « La montée en puissance des énergies renouvelables en France est inéluctable », a conclu Emmanuel Macron, qui n’entend pas pour autant « renoncer au nucléaire ».

Faire évoluer le mix énergétique français a tout de l’exercice d’équilibriste. Car si la fermeture de réacteurs et la promotion des renouvelables fait le bonheur des écologistes, elle a un coût social dans une filière industrielle qui emploie 220.000 salariés selon les chiffres officiels. Et le coût réel du démantèlement, difficile à évaluer précisément, pourrait atteindre plusieurs centaines de millions d’euros par réacteur selon l’électricien français EDF.

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